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Il fallut en venir aux excuses. M. l'ambassadeur dépêcha promptement vers lui un de ses gentilshommes, qui lui dit tout simplement d'où venoit le malentendu, et que le cocher François ayant compris qu'on lui crioit ferme, avoit fouetté si fermement ses chevaux, qu'ils avoient pris la course, et que ce mot de ferme, en françois, vouloit dire: allez fermement et promptement.

Le cardinal reçut cette excuse tellement quellement, estimant qu'il falloit recevoir de mauvais payeurs toute sorte de monnoie; et comme il s'en plaignoit, il fallut s'éclaircir de cela. D'autres cardinaux qui savoient notre langue, l'assurèrent que l'excuse étoit très-bonne, et la faute innocente; le cardinal répondit froidement: Y francesi hanno ogni cosa à la roverscia, et la lingua, come il cervello : Les François ont toutes choses à la renverse, et la langue aussi bien que la tête.

Un cavalier qui étoit en la compagnie, ajouta qu'il n'étoit pas bien séant à un Italien de parler de renverse; qu'ils ont en ce pays-là des médailles dont les revers ne valent guère mieux, et qu'ils sont de dangereux joueurs de reversis.

ETOIT

CHAPITRE X.

De la Passion de Notre-Seigneur.

C'érorr la pensée de notre Bienheureux, qu'il n'y avoit point de plus pressant aiguillon pour nous faire avancer dans le saint amour, que la considération de la mort et des souffrances de Notre-Seigneur. Il l'appeloit le plus doux et le plus violent de tous les motifs de piété.

Et comme je lui demandois comment il pouvoit joindre la douceur avec la violence.

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En la même manière, me répondit-il, que l'Apôtre dit, que la charité de Dieu nous presse; en la même manière que le Saint-Esprit nous apprend dans le Cantique, que l'amour est fort comme la mort, et ápre au combat comme l'enfer. On ne sauroit nier, me dit-il, que l'amour ne soit la douceur des douceurs, et le sucre de toutes les amertumes; néanmoins voyez comme il est comparé à ce qu'il y a de plus violent, qui est la mort et l'enfer. La raison en est, que, comme il n'y a rien de si fort que la douceur, il n'y a aussi rien de plus doux ni de plus aimable que sa force.

Il n'y a rien de plus doux que l'huile et le miel ; mais quand ces liqueurs sont bouillantes, il n'y a point d'ardeur pareille. Rien aussi de plus doux que l'abeille; mais quand elle est irritée, rien de plus perçant que son aiguillon.

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Jésus en croix est le lion de la Tribu de Juda, et l'énigme de Samson, dans les plaies duquel se trouve le rayon de miel de la plus forte charité, et c'est de cette force que sort la douceur de notre plus grande consolation et certes comme la mort du divin Rédempteur est le plus haut effet de son amour envers nous, ce doit être aussi le plus fort de tous les motifs de notre amour envers lui. Ce qui faisoit dire à S. Bernard : O Seigneur ! Hé je vous supplie que la force embrasée et emmiellée de votre amour crucifiant absorbe mon cœur, afin que je meure pour mour de votre amour, ô Rédempteur de mon ame qui avez daigné mourir pour l'amour de mon amour.

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C'est de cet excès d'amour, qui ôta la vie à l'amant de nos ames sur la montagne du Calvaire, que parloient Moïse et Elie sur celle du Thabor parmi la gloire de la Transfiguration, pour nous apprendre que même dans la gloire céleste, dont la Transfiguration n'étoit qu'un échantillon, après la considération de la bonté de Dieu comtemplée et aimée en elle-même et pour elle-même, il n'y aura point de

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plus puissant motif d'amour envers le grand Sauveur, le souvenir de sa mort et de ses douleurs. C'est dans ce souvenir que les Anges et les Saints chantent ce Cantique : L'Agneau qui a été mis à mort est digne de recevoir vertu, divinité, sagesse, force, honneur, gloire et bénédiction.

CHAPITRE X I.

De l'odeur de piété.

JE ne saurois exprimer combien grande étoit l'estime que faisoit notre Bienheureux de l'odeur de la piété et combien il estimoit heureux ceux ou celles qui, par un bon exemple, la répandoient dans le monde, non pour leur propre gloire, mais pour celle du Père céleste, de qui procède tout bien excellent et tout don parfait.

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Il n'y a point de doute que ceux qui parfument let monde de l'odeur de leur bon exemple, et qui parlà montrent le chemin de la justice aux autres, ne reluisent un jour comme de brillantes étoiles dans le Firmament.

Certes, si le malheur est prononcé par celui qui ne peut mentir, contre ceux qui portent du scandale au monde, quelle bénédiction sur ceux qui y donnent de l'édification par leur vie exemplaire, et qui attirent les ames à leur imitation par l'odeur de leurs vertus ! Saint Paul disoit de ces personnes, qu'elles étoient la bonne odeur de Jésus-Christ, odeur de vie à la vie, et que les scandaleux étoient une odeur de mort à la mort.

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Quelqu'un n'approuvant pas son Institut de la Visitation, et le traitant de nouveauté, en la présence de notre Bienheureux, lui dit : Mais enfin de quoi servira cet Institut à l'Eglise ?

Le Bienheureux répondit fort gracieusement: A faire le métier de la reine de Saba.

Et quel est ce métier, reprit cet homme? De rendre honneur à celui qui est plus que Salomon, et à remplir de parfums et de bonne odeur toute la Jérusalem militante.

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LE Bienheureux avoit coutume de dire que, quand nous voulions nous justifier devant les hommes, cela se faisoit bassement, lâchement, obscurément; mais que, quand nous nous en remettions à Dieu, cela se faisoit hautement, fortement et évidemment. Si nous sommes innocens, il fait paroître tôt ou tard notre innocence avec éclat, ne permettant jamais que ceuxlà soient confondus qui mettent en lui toute leur espérance. Parce que le Juste a espéré en moi, dit-il par la bouche du Prophète-Roi, je le délivrerai; je le protègerai, parce qu'il a connu mon nom et lui a rendu gloire.

Il rapportoit, pour confirmation de cette vérité, l'illustre exemple de la sainte Vierge, laquelle n'ignorant pas la perplexité de S. Joseph au sujet de sa grossesse, et sa modestie ne lui permettant pas de lui découvrir la grâce incomparable dont Dieu l'avoit honorée, la rendant Mère du Verbe Incarné, elle se remit entièrement au soin de la Providence, qui ôta ce nuage de l'esprit de son Epoux par l'ambassade d'un

Ange.

S. Paul, nous conseillant de ne nous défendre pas quand on nous outrage, ou quand nous sommes injustement accusés, mais de faire place à la colère, nous donne une excellente leçon de remise en Dieu pour tout ce qui nous regarde.

CHAPITRE X II I.

De l'égalité d'esprit.

JE ne vois rien que notre Bienheureux inculquât plus soigneusement, que la sainte égalité d'esprit. Il avoit coutume de dire que, puisque cette vie étoit une navigation vers le port du salut, nous devions être semblables aux bons Pilotes, qui tiennent toujours leur timon juste parmi l'inégalité des flots.

Pour cela, il faut imiter les mêmes Pilotes, qui se conduisent en la mer par le regard continuel du pole. Et quel est ce pole, sinon la très-sainte volonté de Dieu, que nous devons regarder continuellement pour nous y fixer? Car les inégalités d'esprit ne procèdent que du regard des créatures non rapporté à Dieu; et ainsi, selon la variété des accidens qui arrivent en cette vie, nous changeons d'humeur et d'inclinations.

Mais quand nous regardons toute cette diversité dans l'uniformité toujours égale de la très-sainte volonté de Dieu, qui distribue, selon qu'il lui plaît, les prospérités et les adversités, la santé et la maladie, les richesses et la pauvreté, la vie et la mort, et quand nous venons à penser que de tout cela nous pouvons tirer des sujets de glorifier Dieu, nous entrons dans cette aimable indifférence chrétienne, qui produit la sainte égalité d'esprit.

CHAPITRE X I V.

De l'empressement.

NOTRE Bienheureux faisoit grand état de cette de

vise d'un Empereur ancien: Hâtez-vous lentement ; et de cette autre : Assez tôt, si assez bien. Il ne vouloit

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