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pauvre fils, pour le tuer si cruellement ? L'autre sa, chant que c'étoit son ami, se mit à crier et s'arracher les cheveux et au lieu de demander pardon à cette bonne mère, il se met à genoux devant elle, et la supplie de le mettre entre les mains de la justice, voulant expier publiquement une faute si barbare.

Cette mère, qui étoit extrêmement chrétienne, et miséricordieuse, fut si touchée du repentir de ce jeune homme, qu'elle lui dit que, pourvu qu'il en demandât pardon à Dieu, et promît de changer de vie, elle le laisseroit aller; ce qu'elle fit sur sa parole.

Ce grand exemple de clémence fut si agréable à Dieu, qu'il permit que l'ame de ce fils apparût à cette bonne mère, l'assurant que le pardon si charitable qu'elle avoit fait à celui qui l'avoit tué, sans le cons noître, et duquel elle pouvoit si légitimement et si facilement poursuivre la vengeance avoit été si agréable à Dieu, qu'en sa considération il avoit été délivré du Purgatoire, dans lequel, sans cela, il ent été détenu long-temps. O que bienheureux sont les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde, et pour eux et pour autrui !

V

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CHAPITRE I X.

Du Purgatoire.

Son opinion étoit que de la pensée du Purgatoire

nous pouvions tirer plus de consolation que d'appréhension. La plupart de ceux, disoit-il, qui craignent tant le Purgatoire, le font en vue de leur intérêt et de l'amour qu'ils ont pour eux-mêmes, plus que pour l'intérêt de Dieu; et cela vient de ce que ceux qui en parlent dans les chaires, ne représentent ordinairement que les peines de ce lieu, et non les félicités et la paix qu'y goûtent les ames qui y sont.

Il est vrai que les tourmens en sont si grands, que

les plus extrêmes douleurs de cette vie n'y peuvent être comparées; mais aussi les satisfactions intérieures y sont telles, qu'il n'y a point de prospérité ni de contentement sur la terre qui les puissent égaler.

1. Les ames y sont dans une continuelle union avec Dieu.

2. Elles y sont parfaitement soumises à sa volonté, ou, pour mieux dire, leur volonté est tellement transformée en celle de Dieu, qu'elles ne peuvent vouloir que ce que Dieu veut; en sorte que, si le Paradis leur étoit ouvert, elles se précipiteroient plutôt en enfer, que de paroître devant Dieu avec les souillures qu'elles voient encore en elles.

3. Elles s'y purifient volontairement et amoureusement, parce que tel est le bon plaisir divin.

4. Elles veulent y être en la façon qu'il plaît à Dieu, et pour autant de temps qu'il lui plaira.

5. Elles sont impeccables, et ne peuvent avoir le moindre mouvement d'impatience, ni commettre la moindre imperfection.

6. Elles aiment Dieu plus qu'elles-mêmes et que toute chose, d'un amour accompli, purjet désintéressé, 7. Elles y sont consolées par les Anges.

8. Elles y sont assurées de leur salut, dans une espérance qui ne peut être confondue dans son attente.

9.

Leur amertume très-amère est dans une paix trèsprofonde.

10. Si c'est une espèce d'enfer quant à la douleur, c'est un Paradis quant à la douceur que répand la charité dans leur coeur ; charité plus forte que la mort, et plus puissante que l'enfer, de qui les lampes sont de feu et de flammes.

11. Heureux état plus désirable que redoutable, puisque ces flammes sont flammes d'amour et de charité !

12. Redoutables néanmoins, puisqu'elles retardent la fin de toute consommation, qui consiste à voir Dieu et à l'aimer, et par cette vue et cet amour,

le

louer et le glorifier dans toute l'étendue de l'éternité. Sur ceci il conseilloit fort de lire l'admirable Traité du Purgatoire qu'a fait la bienheureuse Catherine de Sienne. Sur son conseil, je l'ai souvent lu et relu avec attention, mais toujours avec un nouveau goût et de nouvelles lumières; et j'avoue qu'en cette matière je n'ai jamais rien lu qui m'ait tant satisfait. J'ai même invité quelques Protestans à le lire, qui en sont demeurés fort contens, entr'autres un très-savant, qui me déclara que, on lui eût présenté ce Traité à lire avant sa conversion, il en eût été plus touché que de toutes les disputes qu'il avoit eues à ce sujet.

Si cela est ainsi, me dit-on, pourquoi donc tant recommander les ames du Purgatoire ?

C'est que malgré ces avantages l'état de ces ames. est fort douloureux, et vraiment digne de notre compassion et d'ailleurs c'est que la gloire qu'elles rendront à Dieu dans le Ciel, est retardée. Ces deux motifs doivent nous engager à leur procurer une prompte délivrance par nos prières, nos jeûnes, nos aumônes, et toute sorte de bonnes œuvres, mais particulièrement par l'offrande du sacrifice de la sainte Messe.

APRÈS

CHAPITRE X.

Il refuse de donner une dispense.

PRÈS avoir remontré, avec toute la douceur et la patience possibles, l'injustice de la demande que lui faisoit un particulier, sans le pouvoir contenter ni faire désister de sa poursuite; le Bienheureux, qui étoit impliable dans ces occasions, fut contraint de le refuser tout-à-plat, lui disant qu'il lui étoit impossible de le satisfaire. L'autre lui dit : Ce n'est pas faute de puiscar vous le pouvez), mais faute de bonne

volonté pour moi.

Un homme de bien, reprit le Bienheureux, borne

son pouvoir à ce qui est licite, et appelle impossible ce qui n'est pas permis.

L'autre le menaçant de se ressentir de ce refus, le Bienheureux répondit : Si je vous requiers de choses injustes, vous m'obligerez en me refusant; si de choses justes, vous êtes trop équitable pour me les dénier.

L'autre témoignant qu'il les dénieroit, quand elles seroient les plus justes du monde: Vous n'êtes pas si peu soigneux de votre salut éternel, reprit le Bienheureux, que d'agir ainsi. Pour moi, je vous confesse, tout misérable que je suis, que j'ai des prétentions pour le Ciel, et que je ne puis me résoudre à vendre mon droit pour une portion de lentilles.

SAINT

CHAPITRE X I.

Des Miracles..

AINT Bernard, qui avoit reçu du Ciel le don des miracles à un si haut degré, en faisoit néanmoins si peu d'état, qu'il estimoit beaucoup plus de crucifier sa chair avec toutes ses convoitises, et son esprit avec toutes ses volontés, que de ressusciter les morts.

Notre Bienheureux étoit dans ce même sentiment; et quand on parloit d'un acte de vertu fait en la charité et par la charité, il l'appeloit un miracle de la grace. Sa raison étoit, que comme le miracle est une œuvre de Dieu, qui surpasse les lois et les règles ordinaires de la nature; aussi l'œuvre méritoire, faite par la grâce surnaturelle en nous et par nous, étoit une opération comme miraculeuse. Notre Bienheureux ajou toit qu'une once de grâce sanctifiante valoit mieux que cent livres de celles que les Théologiens appellent gratuitement données, entre lesquelles est le don de faire des miracles; car celles-ci peuvent subsister avec le péché mortel, et ne sont pas nécessaires au salut, plusieurs les ayant eues qui ne seront pas sauvés; au

lieu que quiconque meurt avec le moindre degré de grâce justifiante, ne peut être damné, et il a part à l'héritage du salut.

Ajoutez que les grâces que l'on appelle gratuitement données, ne sont pas ordinairement pour le sujet qui les possède, mais pour l'édification du prochain; au lieu que la grâce justifiante et sanctifiante est pour le sujet où elle est répandue par le Saint-Esprit, et y forme le caractère des enfans de Dieu.

CHAPITRE XII.

Ce que le Bienheureux répondit au conseil qu'on lui donna au sujet du Livre de l'Introduction.

PLUSIEURS

LUSIEURS de ses amis prudens de la prudence du siècle, ayant vu le grand accueil que le public avoit fait à son Livre de l'Introduction, que l'univers a lu en toute sorte de langues, lui conseillèrent de ne plus écrire, n'étant pas possible qu'il pût jamais rien faire qui eût un pareil succès.

Il me dit un jour à ce sujet, que l'esprit de la prudence divine et chrétienne étoit bien différent de l'esprit de la prudence humaine et du siècle, et que les maximes du Crucifix étoient bien opposées à celles du monde. Voyez-vous, disoit-il, ces bonnes gens m'ai ment, et c'est l'amour qu'ils me portent qui les fait parler ainsi : mais s'il leur plaisoit de détourner tant soit peu leurs yeux de moi, homme vil et pauvre, et de les arrêter sur Dieu, ils parleroient bien un autre langage.

Čar si Dieu a voulu donner sa bénédiction à ce petit ouvrage, pourquoi la dénieroit-il à un second? et si de ce premier il a tiré sa gloire, comme autrefois il fit sortir la lumière du milieu des ténèbres, et le feu sacré du milieu de la boue, son bras est-il raccourci

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