distance, le grand verre ayant 3 pouces de foyer, & le petit ayant fept lignes de foyer; le côté concave de ce verre étoit travaillé fur une forme faisant partie d'une sphere de 5 pouces de diamètre, & le côté convexe étoit travaillé dans un baffin faifant partie d'une fphere de 5 à 6 lignes de diamètre.

Comme le premier verre de 3 pouces de foyer reçoit du petit miroir les rayons moins convergens que dans la premiere difpofition, il les réunit à 2 pouces de distance, au lieu d'un pouce deux lignes, fuivant qu'on éloigne les deux miroirs plus ou moins l'un de l'autre; mais lorsque les images fe forment à 1 pouce 2 lignes près du verre,elles font plus grandes que quand elles fe forment à 2 pouces loin de ce même verre; ainsi dans une même ouverture de diaphragme il peut y avoir plus d'images, étant plus petites, & le petit verre étant d'un plus court foyer, il les groffit davantage. Par conféquent dans une même ouverture de diaphragme on voit plus d'objets qui paroiffent cependant auffi grands que dans la difpofition que j'ai donnée d'abord, où le grand verre a trois pouces de foyer, & eft éloigné de 2 pouces du petit verre qui a 10 lignes de foyer. Ces proportions m'ont paru cependant préférables; car comme le petit verre eft d'un plus long foyer, il s'enfuit que les refractions font plus douces que dans un verre d'un plus court foyer. L'on choifira de ces deux manieres celles que l'on jugera à propos. L'on remarquera feulement qu'en employant l'oculaire de 7 lignes de foyer, le trou de la demi-boule ne doit être qu'à environ 6 lignes de diftance de ce petit verre.

J'ai dit en parlant de la maniere de dreffer le petit miroir, qu'il falloit avoir un grand miroir qui ne ferviroit qu'à monter les Télescopes, lequel auroit une ouverture

de 9 lig. cependant fi on ne vouloit faire qu'un Télefcope & qu'on voulût s'épargner la peine de faire ce miroir d'épreuve, on pourroit s'en paffer en faisant au grand miroir fur le tour une ouverture de 8 lignes après qu'il est entierement achevé, & en ne donnant que 8 lignes de diamétre au petit cercle qui eft au milieu du grand cercle que l'on met à l'ouverture du Télescope lorsqu'on le monte; mais fur-tout l'on doit bien prendre garde que le petit miroir foit précisément au milieu du tuyau.

Le Télescope conftruit fuivant les proportions que je viens de donner, fait l'effet de la meilleure lunette de 8 pieds de foyer; mais comme la nuit les objets que l'on obferve au ciel font lumineux, on peut en changeant de verres le faire groffir davantage; pour cela il faut faire un autre tuyau que l'on puiffe mettre quand on voudra à la place de celui qui y eft pour le jour. On donne à ce tuyau 1 pouce 8 lignes de longueur, ce qui fait 1 pouce & demi de distance d'un verre à l'autre. Le grand verre fera de 3 pouces de foyer, mais le petit verre n'aura que 6 lignes de foyer, étant travaillé du côté concave fur une forme faifant partie d'une sphere de 5 pouces de diamétre, & du côté convexe dans un baffin faisant partie d'une sphere de 5 lignes de diamétre. Le diaphragme doit être pofé précisément au foyer de ce petit verre. Lorfqu'on fe fervira de ce tuyau ainfi difpofé, le Télescope fera l'effet d'une lunette de quinze à feize pieds.

Pour obferver le Soleil on fe fert ordinairement d'un verre enfumé que l'on tient entre le verre oculaire & l'œil. On prend un morceau de glace arrondi de 2 pouces de diamétre, on y cole un cercle de carton de même grandeur & de 2 ou 3 lig de largeur dans toute fa circonfé rence, on paffe cette glace fur la fumée d'une lumiere,

2.

on cole une autre glace fur le carton qui empêche que les deux glaces ne se touchent, & que la fumée ne s'efface. L'on peut par le moyen de ce verre obferver le Soleil en plein midi; mais comme on a l'embarras de tenir ce verre à la main, voici une maniere plus commode. On fait un verre de 6 lig. de foyer avec un morceau de glace dont la couleur foit d'un vert foncé, on le monte dans une virole, on le met à la place du verre ordinaire, & l'on obferve le Soleil, fans appréhender d'en être incommodé; car comme ce verre intercepte beaucoup de rayons à cause de fa couleur obfcure, ceux qui parviennent jufqu'à l'œil n'ont point affez de force pour nuire; mais fans cette précaution les rayons du Soleil fe réüniffant au fond de l'œil brûleroient la retine.

ARTICLE QUATRIE ME.

Il ne s'agit plus à préfent que de faire une boëte dans laquelle on puiffe renfermer le Télescope afin de le tranfporter facilement d'un lieu à un autre fans le déranger. Cette boëte doit être de la longueur du Télefcope, de 4 pouces de largeur fur 4 pouces de hauteur. A 4 pouces de distance de chaque bout, il y a des rainures dans chacune defquelles on fait entrer une petite planche de 2 pouces de hauteur, ayant une entaille en demi-cercle pour recevoir le corps du Télefcofpe, & une autre en taille plus petite pour recevoir la grande tige. A l'égard du pied, on le pofe dans un bout de la boete en le mettant de côté. Il eft arrêté dans une entaille de la planche faite exprès, & en même tems il est foutenu par le bout de la grande tige. Deux autres planches de 2 pouces de hauteur avec de pareilles entailles entrent dans les rainures, & contiennent le Télescope, la grande tige & le pied,

pied, de maniere que la boëte étant fermée, toutes ces piéces n'ont aucun mouvement.

Il eft bon de mettre dans la boëte une tariere de la groffeur de la vis de fer qui est au bout de la grande tige, pour pouvoir, quand l'occafion le demande, faire un trou convenable pour y faire entrer cette vis, & rendre le Télescope fixe & immobile, afin d'obferver commodé

inent.

Après tout ce que je viens de dire de la conftruction du Télescope, je crois que pour peu qu'on veuille s'y appliquer, l'on pourra fe flater d'une prompte réuffite. Je fuis entré dans un grand détail fur tout ce qui concerne cette piéce, j'ai appris à faire des formes éxactes, j'ai donné la compofition de la matiere des miroirs, j'ai enfeigné la maniere de les travailler & de les polir, j'ai donné les proportions des piéces qui compofent le tuyau, & montré à les conftruire éxactement, enfin j'ai établi des regles füres & faciles pour monter les miroirs & finir le Télescope, que peut-on defirer davantage? Il ne me reste à présent qu'à parler de ses usages le plus briévement qu'il fera poffible.

LE

CHAPITRE V.

Usages du Télescope..

E Télefcope tel que je viens d'en donner la constru ction, eft non-feulement propre à découvrir fur terre ou fur mer les objets éloignés, mais encore à obferver les corps céleftes qui nous environnent.

Lorfque l'on s'en fert pour regarder la Lune, elle pa

I

roît confidérablement rapprochée. On voit pendant qu'elle eft dans fon croiffant de grands rochers escarpés dont l'ombre s'étend fort loin fur fa furface & fe racourcit à mesure que le Soleil s'y éleve. On y voit beaucoup d'endroits qui paroiffent creux en forme de baffin, dont les bords font élevés, & au milieu de chacun defquels il y a comme une montagne. Pendant le croiffant un de ces bords couvre tout le fond du baffin de fon ombre qui s'étend jufques fur l'autre bord, dont il n'y a qu'une partie d'éclairée. Le pied de la montagne eft auffi dans l'ombre, pendant que le fommet eft dans la lumiere. Il y a un de ces creux ou baffin d'où l'on voit partir de grands traits illuminés, qui tendent vers d'autres prefque femblables. On voit auffi de grandes taches obfcures, qui refléchiffent moins de lumiere. Il y a eu des perfonnes qui ont prétendu que c'étoit des mers, mais il n'y a pas d'apparence, car cela étoit, il y auroit des vapeurs qui s'é, leveroient & formeroient des nuées qui couvriroient tantôt une partie de la Lune & tantôt une autre, mais on ne découvre rien de femblable avec les lunettes; ce qui prouve qu'il n'y a point d'eau dans la Lune, & parconféquent point d'animaux, malgré ce qu'on en a dit.

Lorfque l'on obferve le Soleil avec les précautions que j'ai déja marquées, c'eft-à-dire, en fe fervant d'un petit verre de couleur verte, l'on y remarque des taches en plus grande quantité dans un tems que dans un autre, quelquefois même iln'y en a point. Ces taches paroiffent aller d'orient en occident, & faire une révolution entiere en vingt-fept jours; elles ne gardent aucune figure particuliere, elles font fouvent entourrées d'une espece de fumée. Il y en a qui ne paroiffent que comme un sim2 ple nuage, il femble qu'elles flotent immédiatement fur la furface du Soleil, comme l'écume flote fur le métal