difficultés, & exige infiniment plus de circonfpection dans les femmes, que les autres méthodes; auffi eft il d'avis, lorsque la groffeur de la pierre empêche qu'on puiffe la tirer fans incifion, qu'on donne la préférence au haut appareil, ou qu'on incife le vagin en même tems que le fphincter & le corps de la veffie, fur la crenelure d'une fonde. Buffiere (a) aime mieux faire l'incision fur la pierre même, qu'il pouffe avec les doigts dans le cou de la veffie, ce qui paroît être auffi le fentiment de Sharp. M. Falconet ajoute, à l'endroit cité, que Raw ne se fervoit point de fa méthode fur les femmes mais uniquement fur les filles, & il ne dit pas d'où il l'a fçû. Quant à moi, je peux affurer que pendant l'efpace de cinq ans que j'ai paffé en Hollande, & fur-tout à Amfterdam, je n'ai jamais vû ni oui dire que Raw ait taillé une feule femme par l'appareil latéral; la même chofe eft attestée encore par Sermefius, Médecin d'Amfterdam, qui a vécu dans cette ville avec Raw dans le tems où ce dernier jouiffoit de fa plus grande réputation. M. Mery (b) propose une méthode pour les femmes qui ne paroît pas différer de celle qui eft recommandée par M. Falconet pour prévenir la trop violente diftenfion ou le déchirement du cou de la veffie, & l'incontinence d'urine, qui en est souvent la fuite, M. Mery veut qu'on introduife dans la veffie de la femme une fonde crenelée, femblable à celle dont on fe fert pour les hommes, qu'on

:

(a) Voyez les tranf. phil. an. 1699 pag. 106. & l'abrégé de Lowthorp tom. III. pag. 185 & fuivantes. (b) Voy. fes obf. fur la manière de tailler de Frere Jacques pag. 30.

déprime le cou de la veffie avec la convexité de la fonde, & qu'on incife enfin ce cou avec la partie du vagin qui y correspond & qui s'y trouve adhérente (a), en pouffant même l'incifion, fi je ne me trompe, jufqu'au corps de la veffie, ainsi qu'on le pratique dans le petit appareil de cette manière l'urethre n'eft ni dilatée ni déchirée, mais feulement incifée, ce qui eft beaucoup moins dangereux qu'une dilatation forcée ou le déchirement; car c'étoit déja un axiome reçu en Chirurgie dès le tems de Celfe, que les plaies fimples entraînent moins d'accidens & fe guèriffent plutôt, que les contufions & les dilacérations. Il n'y a donc pas lieu d'être furpris que Fab. Hildanus ait heureufement réuffi, par un procédé à peu près femblable à celui qu'on vient de décrire, à délivrer ́une femme d'une pierre groffe comme un œuf de poule, qui avoit ufé & percé par le frottement la veffie & la portion du vagin qui y répond; il aggrandit, partie avec le doigt & partie avec le bistouri, la plaie du vagin & de la veffie, jufques au cou de cette dernière, après quoi il tira la pierre avec des tenettes & guèrit parfaitement fa malade (b).

,

(a) Avant M. Mery Lifter a décrit brièvement cette méthode dans fon voyage de Paris pag. 237, où il dit que le moyen le plus facile de délivrer les femmes de la pierre, eft de faire l'incifion par le vagin jufques dans la veffie.

(b) Voyez fa première cent. obf. 68. & fa III. obf. 69. Il rapporte encore un autre cas de la même espèce; il paffa beaucoup de petites pierres par l'ulcere qui ouvroit la veffie & le vagin, ce qui ne J'empêcha pas de fe cicatrifer, d'où il réfulte encore que ces plaies de la veffie ne font pas mortelles, & qu'elles peuvent être amenées à guèrifon.

Haut appa

thode de Douglas,

I X.

M. Jean Douglas, l'un des plus grands Chireil, ou mé- rurgiens d'Angleterre, propose encore, pour tailler les femmes, une méthode différente de celles que nous venons de décrire. Après avoir dit qu'on peut tirer très doucement une petite pierre de la veffie d'une femme, en dilatant peu-à-peu & graduellement l'urethre, au point qu'on puisse introduire commodément les tenettes jufques dans la veffie ( voyez ci-devant le § V.), il ajoute que fi la pierre eft d'un volume un peu confidérable, il eft d'avis qu'on en fasse l'extraction par le haut appareil; & pour cela il veut qu'on commence par bien remplir la veffie d'eau tiéde, avec une groffe feringue, à peu près comme on le pratique dans la taille hypogaftrique des hommes ; qu'un aide en passant le doigt dans le vagin comprime l'urethre; qu'on faffe enfuite l'incifion immédiatement au - deffus de la fymphife des os pubis, de la manière dont nous l'avons expofé au chapitre du haut appareil; & qu'après avoir tiré la pierre, de la façon dont on l'a dit au même endroit, on travaille enfin à réunir convenablement la plaie. Cette méthode ne me paroît nullement à rejetter lorfque la pierre eft groffe & la femme jeune & faine, enforte qu'on ait lieu d'efpérer la guèrifon de la plaie: la préférence que je lui accorde dans ces circonftances, eft fondée fur les fuccès multipliés qu'elle a eu fur les hommes, ainfi qu'on l'a vu plus haut, & fur ce qu'on n'a pas à craindre d'affoiblir ou d'offenfer le cou de la veffie, ni par conféquent l'incontinence d'urine. Je crois cependant que quand la pierre eft peu volumineuse, il vaur

mieux la tirer par le petit appareil ou par le latéral, comme moins dangereux. M. Morand paroît être en cela de mon avis; il veut qu'on taille les femmes par la méthode ordinaire lorfque la pierre eft petite, mais qu'on recoure au haut appareil quand elle eft groffe, afin d'éviter l'icontinence d'urine, accident extrêmement incommode & très - fréquent en pareil cas.

X.

,

La pierre a quelquefois

pour bafe une

Il est important de remarquer, avant de finir ce chapitre, que les pierres de la veffie ne fe forment pas toujours fpontanément, mais éguille, ou tel quelquefois auffi à l'occafion d'une éguille, autre corps étranger ind'une groffe épingle à cheveux, d'un fil ciré, troduit dans ou de telle autre chose semblable, qu'une fem- la veffie. me ou une fille aura pouffée par l'urethre jufques dans la veffie, foit pour appaifer une démangeaifon incommode foit pour repouffer une pierre qui fe préfente à l'orifice de l'urethre, foit enfin pour fatisfaire un tempérament amoureux. Comme tous les corps qui reftent quelque tems dans l'urine fe couvrent bientôt d'une matière calculeufe, il eft impoffible que ceux qui féjournent dans la veffie ne fubiffent peu-à-peu le même fort, & ne se convertiffent enfin en une groffe pierre, qui produira les accidens les plus graves, & fera même périr miférablement à la longue la malade, fi on ne fe hâte de l'en délivrer à tems d'une manière convenable. Molinetti (a), Al

(a) Differt. anat. pathol. pag. 310,

7

ghifi (a), Greenfield (b), les Eph. d'Allemagne (c) Chefelden (d) & d'autres Auteurs, fourniffent non-feulement des exemples, mais encore des figures de plufieurs de ces pierres qui avoient pour base des épingles ou des éguilles. On trouve fur-tout un cas merveilleux, ou plutôt incroyable de cette efpèce, dans les tranfactions philofophiques (e) & dans les actes de Leipfic (f), au fujet d'une fille d'environ vingt ans à qui Proby, Chirurgien Anglois, tira par le haut appareil, fans avoir injecté préalablement la veffie, une éguille à cheveux recouverte de toute part de matière calculeufe, après avoir inutilement effayé de la faire fortir par l'urethre fuivant la méthode ordinaire; la fille difoit avoir avallé cette éguille, ce que je ne crois pas en effet, comment fe perfuader qu'une éguille qui avoit près de fix travers de doigts de long, & qui étoit groffe à propor

(a) Lib. de lithotomia, pag. 12. it. tab. III. fig. 2 & 4.

(b) Comment. de lithotomia anglico fermone confcripta, pag. 62.

(c) Cent. I. pag. 183. obf. XCIV.

(d) Traité du haut appareil pl. X. fig. F.

(e) Ann. 1700. n°. 260. pag. 455.

(f) Ann. 1701. pag. 230. Cette obfervation se trouve encore dans l'abrégé des tranfa&t. philofoph. par Lowthorp, tom. III. pag. 162. Lifter dans les tranf. philof. n°. 168. pag. 882. dit que Colot tira à un enfant une pierre dans laquelle étoit une éguille d'acier, que cet enfant avoit introduit dans fa veffie deux ans auparavant. En 1735 mon fils vit tirer à Berlin de la veffie d'un homme, par feu M. Senf, une pierre où il fe trouva un épi de bled: le malade ne fçavoit pas comment cet épi étoit parvenu dans la veffie, & perfonne ne put le deviner. Il y a encore un cas femblable dans les obfervations de Denys.