J'en dois le facrifice, & l'exemple à ma gloire;
Ah! gardez-vous de croire Que d'un fupplice affreux les terribles apprêts, Seigneur, faffent aux Juifs refpecter vos arrêts. J'ignore quel pouvoir foutient leurs grands courages: Mais je ne puis penfer que parmi tant d'outrages, Qu'au milieu des tourmens pouvant se secourir, Pour une indigne caufe, ils brûlent de mourir. Quel fruit efperez-vous d'une injufte pourfuite? Des contradictions l'humanité s'irrite; Et jufqu'en fa ruine eft étrange à tel point, Que fon orgueil gémit, & ne fe dompte point. Paré d'un droit augufte, autant que légitime, Quoi que vous me difiez, je compte que Phoftime; Chargé d'exécuter un ordre généreux,
N'a point en vain prêté fa voix aux malheureux; C'eft juftice en effet, Seigneur, ce n'eft point grace ANTIOCH US.
Ce grand zéle pour eux doit paffer pour audace. Et quant à ces traitez qui pourroient nous lier, Il n'eft pas temps encor de m'en justifier, 'Aux portes de Memphis, fuivi de mon armée, J'irai de mes raifons informer Ptolomée. Attendant que mes pas s'en ouvrent les chemins,] Il pourra mandier le fecours des Romains. PHOSTIME.
Hé bien, fi fon appui que l'Orient révére, Ne peut ravir aux fers, & les fils, & la mere; Si négligeant des cris portez jufques aux Cieux Vous ofez vous fouiller d'un fang fi précieux; Si toûjours dépendant des confeils tyranniques, De tant de cruautez, de miferes publiques, Le cours trop dangereux n'eft bien-tôt arrêté, C'eft à vous de longer à votre fûreté.
ANTIOCHUS.
Ah! je pourrois, après une telle menace....... Mais, non, c'eft à ton Maître à punir ton audace. Va, fors de mes Etats où je donne la loi,
Etrends grace à des droits que je refpecte en moi.
Je parts. Non, cependant que d'indignes allarmes Souillent ici ma gloire & l'honneur de mes armes Connoiffez mieux Phoftime, & tel qui dans ce jour Ordonne mon départ, doit craindre mon retour.
SCENE IX. ANTIOCHUS, ACHA S.
Out eft à redouter de leur intelligence, Seigneur, affurez-vous une jufte vengeance. ANTIOCH US.
Oui, c'en eft trop. Tu fçais que cinq de ces Hébreux Sont dans le Fort. Suis moi. Je vais ouvrir par eux Cette fanglante épreuve, où leur fureur les livre. Qu'on leur montre mes loix, qu'ils jurent de les fuivre ;
que leur mort apprenne aux Juifs humiliez, Que je crains peu l'Egypte, & fes fiers Alliez..
ANTIOCHUS
ANTIO CHUS, ACHAS.
Salmone a vû cinq fils à tant de maux en prove?
Et n'a verfé, dis-tu, que des larmes de joye, Et de chacun d'entr'eux les fupplices nouveaux Ranimoient leur courage, & laffoient les Bour) reaux ?
O fureur, qu'à l'envi chacun a fait paroître, Que du nom de vertu l'on honore peut-être! ACHAS.
Ils fembloient foutenus par un pouvoir divin, Et beniffoient le Dieu qu'ils imploroient en vain Salmone, à qui fa foi prefentoit fes Oracles, Qui, fans être ébranlée à ces triftes fpectacles, Suit, d'un zéle impofteur, les attraits décevans, Sans regretter les morts pleure fes fils vivans. Le plus jeune fur tout excite fa tendreffe. C'est au feul Azaël que fa douleur s'adreffe : Et ce fils, par votre ordre amené dans ces lieux; Eft prefent à fon cœur, s'il ne l'eft à ses yeux. Mais, Seigneur, on s'étonne avec quelque juftice D'un ordre qui le femble arracher au fupplice, Et de votre faveur paroît feul le flatter.
De vos premiers deffeins, qui peut vous écarter?
Toi-même ignores-tu ce qui fait fa défense, Que cher à Zoraïde, elle aime fon enfance, Qu'au berceau même en elle un foin trop com plaifant
L'amufoit des erreurs d'un culte féduifant? Par lui, je puis mouvoir fa tendreffe inquiéte, Et m'ouvrir vers fon cœur une route fecrete. Et quant à cet Enfant, pourfuivant mes projets, Je vais tourner les yeux fur de plus doux objets.
N'en doutez point; pour lui dans fes vives allarmes, Zoraide à vos pieds ira mettre fes charmes : A l'honneur de fon Dieu, toûjours prête à céder, Vous l'y verrez en pleurs vous le redemander. ANTIOCHUS.
Ah! c'eft où je l'attens. Au zéle, qui l'enflâme, L'état de cet Enfant doit ébranler fon ame. Par mon ordre, en ces lieux, à l'envi careffé, Il ignore, dit-on, tout ce qui s'eft paffé.
Mais j'ai craint que mon rang ne l'étonnât peut-être Il doit être introduit ici fans me connoître. Plus libre en fes difcours, il s'expliquera mieux. Enfin, pour l'amener au culte de nos Dieux, Des moyens les plus doux, j'ai voulu faire ufage. Mais on entre. C'est lui. Grands Dieux ! fur fon vifage,
A fa noble pudeur, quels charmes font unis!
ANTIOCHUS, AZAEL, ACHAS, Gardes.
OU fuis-je, Dieu puiffant ?
ANTIOCHUS.
Approchez-vous, mon fils
Je crois devoir ce nom à la jufte tendreffe, Dont pour vous en ce lieu le mouvement me
Ofez parler. Mes foins préviendront vos defirs. Mais vous ne répondez que par de longs foupirs. AZAEL.
De vos foins généreux, grace vous foit rendue. Mais d'où vient qu'à vos yeux mon ame est éperduë?
Je ne refpire ici qu'une fecrette horreur.
Mes fens frémiffent tous. Ah! d'un cruel malheur, Seigneur, n'eft-ce point là l'effet, ou le préfage? Vous le dirai-je? Enfin, plus je vous envifage, Plus mon fang fe fouleve, & mon cœur eft frappé. Ah! dans ce fang, vos mains n'ont-elles point trempé ?
Pardonnez ces craintes indifcrettes;
Et ne me laiffez plus ignorer qui vous êtes.
Ne craignez rien, mon fils, j'en attefte les Cieux, Vos interêts, vos jours, pour moi font précieux. Zoraïde pour vous fans doute eut moins de
Quel nom, quel fouvenir votre bonté rappelle! En quittant le Tyran, helas! que fes efprits, Et d'horreur, & d'effroi nous ont paru furpris! Je lui dois tout, Seigneur : Le zéle qui l'entraîne, A fon gré m'enflâmoit, ou d'amour, ou de haine. ANTIOCHUS,
« ÀÌÀü°è¼Ó » |