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ALEXANDRE.

Ah! Seigneur, eft-ce à moi que ce difcours s'adreffe?'
Permettez-moi plûtôt de me plaindre à mon tour.
A peine en ce moment j'apprens votre retour?
Que n'avez-vous pû voir dans nos juftes allarmes
Le trouble de la Reine, & le cours de mes larmes ?
Ce Palais de nos cris doit encor retentir.....
HERODE.

De ma préfence allezvous-même l'avertir,
Et l'embraffant pour moi, dites à l'inhumaine,
Que pour elle en ces lieux l'amour feul me ramene..
Dites-lui que je mets au bonheur de la voir.

Ma plus chere efperance, & mon premier devoir;
Que je viens à fes pieds par un retour bien jufte
Dépofer. les honneurs que j'ai reçus d'Augufte,,
Et qu'il fembloit lui-même en fecret combattu
Refufer à ma caufe, & rendre à ma vertu.
Je n'ai point oublié ni mon rang, ni ina gloire..
Rome de ma fierté gardera la mémoire.

En parlant aux Romains, à ce Peuple de Rois,',
Pour excufe à Cefar j'ai donné mes exploits.
Mais dans l'impatience où mon amour me livre,
Je ne vous retiens plus, & vais bientôt vous fuivre..

SCENE V..

HERODE, SOESME, THARE'S, ALCIME, Suite du Roi, Gardes..

HEROD E..

Lcime, prenez foin d'affembler le Confeil, Et vous Tharés, qu'au Temple un pompeux appareill En l'honneur de Cefar annonce un facrifice:.

Je lui dois des Autels. A ce pieux office
Appellez de ma part les Pontifes Sacrés.
Ne perdez point de tems. Soëlme demeurez.

SCENE V I.

HERODE, SOESME.

HERODE.

VIens-je éprouver ici ta faveur ou ta haine,

O Ciel? approche. Avant que d'entrer chez la Rei

ne

Soefme, j'ai voulu te parler un instant.
Il doit te fouvenir de quel ordre en partant,
J'ai fçu charger pour moi ton amitié fincere..
Cet ordre à mon repos devenoit nécessaire,
Le Ciel n'a pas voulu qu'il fût exécuté,
Il a fervi mes vœux. Mais je me fuis flatté
Qu'un myftere éternel cacheroit à la Reine
Ces dangereux excès où mon amour m'entraîne.
SOESME.

Puis-je entendre, Seigneur, avec tranquillité
Un difcours..... doutez-vous de ma fidelité?

HERODE.

Je crois qu'à tes devoirs rien ne peut te fouftraire.
Loin de te foupçonner, je rends grace au contraire
A tes yeux furveillans, à tes foins affidus,
Sans qui mes fens peut-être à tout heure éperdus
N'auroient pû foûtenir les rigueurs d'une absence...
SOESME.

Je fçai ce qu'aux dépens fouvent de l'innocence
Peut foupçonner un cœur trop plein de fon amour;
Quels mouvemens divers l'agitent tour à tour;
Que fouvent le jouet de fa fureur extrême,

On n'a dans fes foupçons de rival que foi-même,

Mais que dis-je? Seigneur, un Heros tel que vous
Se livre rarement à fes tranfports jaloux.
HERODE.

Soëfime, tu dis vrai. Je ne fuis point injufte.
Mais pendant le féjour que j'ai fait chez Auguste,
Que faifoit Mariamne? & de quels foins divers..

SOESME.

Seigneur,fans ceffe aux pleurs j'ai vu fes yeux ouverts.
HERODE.

Et ce font là ces pleurs dont l'ingrate m'opprime,
Dont toûjours mon amour lui devroit faire un crime.
Le fouvenir des fiens bien plus cruels que moi
L'accompagne en tous lieux, & la remplit d'effroi,
Et toûjours fur mon cœur rachetant fes allarmes,
Jufqu'au lit d'un époux elle porte fes larmes;
Confume en vains regrets tous fes jours les plus
beaux,

Sans ceffe fon efprit erre autour des tombeaux,
Se repaît de leur cendre. Eft-ce donc là qu'éclatte
Cette auftere vertu dont fe pare l'ingrate?
Au rang de fes devoirs met-elle fes mépris,
Et de mes feux ardens eft-ce là tout le prix ?
SOESME.

Vous le fçavez, Seigneur, fur tout ce qui vous touche,
La verité toûjours a parlé par ma bouche.
Du fruit de vos travaux, il eft temps de jour.
L'éclat de votre regne a fçu tout éblouir;
Mais le foin d'être heureux eft une autre fcience.
Il faudroit moins d'amour & plus de confiance.
Que ne peut point l'eftime?& c'eft n'en point marquer,
Que de croire toûjours qu'on puiffe nous manquer.
L'honneur eft orgueilleux dans le cœur d'une femme..
Sur tout, Seigneur, fur tout daignez fermer votre ame
A ces traits qui fouvent avec art détachés
Servent nos interêts fous d'autres noms cachés.
Banniffez vos foupçons : fi vous devez m'en croire,

La vertu de la Reine égale votre gloire,.
Egale fa beauté qui paroît à nos yeux,

Comme aux vôtres, Seigneur, le chef d'œuvre des
Cieux..

HERODE.

Oui, je fens croître encor le beau feu qui m'enflâme. J'en croirai tes confeils, cher Soëfme, & mon ame Va fur ton amitié fonder tout fon bonheur.

Entrons. Mais quelqu'un vient.

SOESME..

C'eft la Reine, Seigneur..

SCENE VII.

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HERODE, MARIAM NE, ALEXANDRE, SOESME, PHOEDIME, Suite de Mariamne..

HERODE.

CIel, qui la viens d'orner d'une grace nouvelle Infpire-lu pour moi ce que je fens pour elle!

MARIAM NE.

Quelle affreuse contrainte ? & que veut-on de moi!* HERODE..

Divine Mariamne, eft ce vous que je voi? Craignez-vous ma préfence?6 Ciel!le puis-je croire?

MARIAMNE.. Jbuiffez à loifir, Seigneur, de votre gloire,. Des dépouilles d'Antoine, & laiffez-moi mes pleurs. HERODE..

Ah! que vous me percez de mortelles douleurs ! ́ Mais a plainte fied mal, lorsqu'après tant d'allarmes, A mes défirs brûlans le Ciel rend tous vos charmes, Madame, & rien ne peut troubler dans ce moment.

La douceur que je goûte en cet embrassement.
Peut-être à mon Fils feul je dois votre présence.
Je vous fçai gré pourtant de cette complaifance.
MARIAMNE.

Que parlez-vous de plainte ? & fur quoi fondez-vous
Seigneur, ce dernier trait d'un injufte courroux?
Eft-ce que fous vos loix comme une autre rangée,
A toute heure, en tous lieux, de témoins affiegée,
De vos ordres preffans j'ai voulu m'affranchir

HERODE.

Hé quoi! votre courroux ne peut-il fe fléchir ?
Quand la gloire m'éleve au deffus de l'envie,
Quel chagrin domeftique empoisonne ma vie?
Te dois-je quelque grace, ô Ciel ! pour tes bienfaits
Si mes plus chers défirs ne font point fatisfaits?
Ou reprends des faveurs dont l'éclat m'importune,.
Ou réunis pour moi l'amour & la fortune.
L'un me manquant, je fuis de tous les deux trahi.
Que fervent tant d'honneurs, fi j'en fuis plus hai?
Si dans le cours pompeux d'une gloire fi grande.
L'ingrate Mariamne en rejette l'offrande;
Si fa rigueur toûjours cherche à me déchirer,
Et fi dans fes bras même il me faut foupirer?
Songez-vous quel lien nous unit l'un & l'autre ?
Vous troublez mon repos, même au dépens du vôtre ;,
Et lorfque tout s'empreffe au-devant de mes pas,
Mes yeux vous cherchent feule & ne vous trouvent

pas.

Le retour d'un époux......

MARIAMNE..

Je vois avec furprise
Dans quel reproche ici votre cœur. s'autorife.
Quelques avis du moins devoient me préparer
A ce retour. foudain qu'on me laiffe ignorer ?
Je dois en foupçonner d'indignes artifices.
Dans le Temple pour vous fumoient des facrificess

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