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SCENE III.

THARBIS; OSARPHIS.

OS ARPHIS.

M Adame, pardonnez fi je vous ai mandée.

On veut troubler la paix tant de fois demandée.
De la Religion le voile specieux

Couvre ici les complots de quelque factieux.
Je pourrois cependant, quoique Phanés ordonne;
Du pied de fes Autels vous élever au Trône.
Rejetter fur lui-même un injufte courroux,
Et partager le Peuple entre fes Dieux & vous.
Mais non, & dans un Camp que la foudre environné
Venez avec ma main recevoir la Couronne.
J'y veux du moins, j'y veux confier vos attraits
Et remettre en dépôt le gage de la paix.

THARBIS.

Moi, Seigneur, qu'au mépris des Autels que l'on brave,

Je forte de Memphis & vous fuive en Esclave?
Arrachée à regret du fein de mes Etats

C'est dans l'horreur d'un Camp & parmi des foldats
Que l'on croit m'affurer un deftin plus tranquille?
On me flattoit d'un Sceptre où j'ai besoin d'azile.
Je ne trouve à Memphis en dépit des traités
Que des Peuples mutins, & des droits conteftés.
On dépouille pour moi l'heritier legitime.

Si l'on m'offre le Trône, on m'affocie au crime;
Je n'ai pour y monter que les débris des loix
Et les Dieux n'ofent plus faire entendre leurs voix.
D'un Empire à ce prix, je ne fuis point avide.

J'attendrai qu'en ces murs le deftin fe décide.
Je puis me garantir contre tout autre effort
Et ce n'eft plus à vous d'ordonner de mon fort.
OSARPHIS.

Madame à ce difcours, je n'ai pas dû m'attendre.
Mais dumoins Ofarphis commence à vous entendre
Et parmi les tranfports d'un efprit combattu
Croit voir quel interêt surprend votre vertu.
Mais pour Amenophis, foit pitié magnanime,
Soit qu'un autre motif vous touche & vous anime,
Epargnez-vous le foin d'examiner fes droits.
De pareils differends font au deffus des loix.
Sur quoi qu'il fonde ici fes plaintes éternelles,
Ma dernière victoire a tranché nos querelles.
De là ces grands projets & ces engagemens
Que de tant d'Alliés confirment les fermens.
Aujourd'hui votre main regle leur destinée,
C'eft peu d'être promife, elle me fut donnée.
Tout m'en repond, Madame, elle est tout à la fois
Le lien de la paix, le prix de mes exploits.
Dans le cœur de Tharbis trouverois-je un obstacle?
Voudroit-elle à fon tour m'oppofer quelque oracle?
Permettez que mon cœur ofe ici s'épancher.
Il eft peu d'interêts qui doivent vous toucher.
L'honneur de terminer les horreurs de la
De regler à fon gré le destin de la terre,
L'hommage de vingt Rois,tout un Peuple à genoux,
Voilà les feuls objets qui foient dignes de nous.
THARBIS.

guerre,

Pour ma gloire, pour moi trop de foin vous anime,
Et ce confeil prudent marque au moins peu d'eftime.
L'inftruction offenfe; un grand cœur doit fçavoir,
Seigneur, jufqu'où s'étend la loi de fon devoir.
Il fçait du moins, il fçait fans qu'on l'en avertiffe
Que la gloire des Rois dépend de leur justice;
Qu'elle n'eft pas toûjours bornée à leurs exploits.

C'eft par moi qu'on commence à violer les loix:
On a fait de Seba le prix de la victoire.
Sur ma propre dépouille, on établit ma gloire.
Sur les débris du mien un Trône m'eft offert,
Et je dois tenir tout de la main qui me perd.
OSARPHIS.

Quels que foient les foupçons où votre ame s'abuse,
Un homme tel que moi ne cherche point d'excufe;
Et, fi dans fes devoirs il pouvoit s'oublier,
Balanceroit peut-être à fe juftifier.

J'ofe en faire l'aveu; mais gardez-vous de croire
Que je prétende ufer des droits de la victoire
Et ne plaçant que à ma gloire & mon appui
Je tyrannise un cœur qui n'eft plus même à lui.
THARBIS.

Dites que cette main plûtôt où l'on afpire,
A des droits plus facrés en a remis l'Empire.
Du moins s'il faut un choix à ma gloire afforti
Quand il en fera tems, je prendrai mon parti.
Elle fort.

SCENE IV.

OSARPHIS feul.

Non, je ne vois que trop jusqu'au fond de son

ame

Les traits encore empreints de fa premiere flamme;
Mais à ma gloire ici qu'importe fa rigueur?
L'amour ne regle point le deftin d'un grand cœur.
Que de fes Alliés rejettant l'affiftance

Tharbis pourfuive ici le prix de fa conftance;
Que reglant fur fes feux tant de droits difcutés...

SCENE V.

OSARPHIS, AS A PH.

OSARPHIS.

MEs ordres, cher Afaph, font-ils exécutés ?

ASAPH.

Seigneur, dans tous les cœurs jamais ardeur plus belle

Ne parût s'élever contre un Parti rebelle:

Mais, Ciel! dans quel terrible & fubit embarra
Lui-même...

OSARPHIS.

Acheve...

ASAPH.

Aron s'eft fauvé de nos bras,

Dans les mains du Grand-Prêtre il vient de fe re

mettre :

Phanés de fon trépas ofe tout fe promettre,
Le peuple qui tantôt admiroit fa vertu,

Hâte le facrifice.

OSARPHIS.

O Ciel ! que me dis-tu?

Quoi! Phanés dans fa crainte injufte & légitime,
Phanés ne frémit pas au nom de la victime?
Envain fur fes Autels, il s'ofe repofer;
Moi-même de fon fang je cours les arrofer.
ASAPH.

Ah! gardez d'expofer cette tête facrée.
Quoi donc oubliez-vous quelle eft cette contrée ?
Peuple en effet ingrat & fuperftitieux!

Je ne fçai dans ces murs quel Oracle des Dieux

Sufcitant de la terre une injufte puiffance,

De la Religion exerce la licence;

Mais tout en eft à craindre; & furtout quand l'er

reur

Marque des mêmes traits le zéle & la fureur.
'Alors du châtiment qui femble légitime,
L'exemple eft dangereux encor plus que le crime;
L'ombre feule en excite un foudain changement,
Etla moindre étincelle un vafte embrasement.
OSARPHIS.

Dis plûtôt que du Ciel je connois la juftice;
Qu'il ne permettra point un fi noir facrifice;
Mais que fans trop d'égards pour ce peuple infenfé,
Je dois venger du moins mon honneur offense.
C'est trop tarder. Allons...

SCENE V I.

JOCABEL, OSARPHIS,

'Arrêtez.

ISERIDE.

JOCABEL.

Quel transport vous inspire ?

OSARPHIS.

Votre Fils m'eft plus cher que l'Empire.

Je fçai dans quels périls lui-même il s'eft jetté;
Et le Trône à ce prix feroit trop acheté.

Dans le fond de mon cœur j'ignore quel murmure,
Dans fes tranfports confus étonne la nature,
J'ai peine à concevoir tout ce que je reffens.

JOCABEL.

Calmez du moins, calmez des troubles fi preffans. Aron dans nos malheurs n'eft pas le plus à plaindre,

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