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Mais pleine de douleur, auffi-bien que d'effroi,
Oubliant qui je fuis, je m'adreffe à mon Roi.
Je viens pour un Epoux vous demander justice;
Et s'il eft criminel ordonnez fon fupplice.
Mais de fon innocence aujourd'hui défenseur
De l'impofture auffi confondez la noirceur.
En vain j'ai recherché les crimes d'une vie
Et toujours enviée, & toujours poursuivie ;
De tous côtez, Seigneur, je ne vois que vertus,
Que des Rois fubjuguez, des Peuples abatus,
D'un fuperbe Ennemi l'audace reprimée,
D'Ifraël confterné la gloire ranimée,

Et tant d'autres exploits dont votre cœur épris,
Dans mon Hymen alors lui fit trouver le prix.
Errant & fugitif avec quelques Cohortes,
On dit que Siceleg l'a reçu dans fes Portes;
Mais fur Amalec détournant tous les coups,
que
Parmi vos ennemis, il n'agit que pour vous.
Qu'Achis même, trompé par fes marches couvertes
Croit tous les jours par lui s'enrichir de nos pertes,
Lorfque le même bras qui devient notre appui,
N'a pú nous épargner fans retomber fur luj.
Mais fi dans ces remparts Siceleg le recelle,
Que de vos mains, Seigneur, un ordre l'en rappelle:
Ces monftres dont l'envie attira le courroux,
S'enfuiront devant lui, s'il paroît devant vous.
JONATHA S.

Oui, Seigneur, écartez un foupçon qui l'outrage;
De fes perfecuteurs votre haine eft l'ouvrage,
Leur envie alluma ce courroux éternel,

David moins vertueux feroit moins criminel.
Quand l'oreille d'un Roi s'ouvre à la calomnie,
D'injuftices, de maux, quelle fuite infinie!
Des plus nobles dehors le méchant revêtu,
Attaque l'innocence, & pourfuit la vertu ;
Et jaloux d'un Sujet dont la gloire le gêne,

Fait fervir & l'Empire, & les Rois à fa haine.
Dût enfin m'accabler, Seigneur, votre courroux
Je ne ménage rien quand je parle pour vous.
De ma Sœur en ces lieux diffipez les allarmes,
Accordez un Epoux à fes vœux,
à fes larmes;
A vous même, aux deftins d'Ifraël hazardez....
SAUL.

Hé bien, il faut vouloir ce que vous demandez.
Immolons à David votre gloire & la mienne.
Vous voulez fon retour, je confens qu'il revienne;
Qu'à fon ambition ici nos propres mains,

D'un Trône qu'il dévore ouvrent tous les chemins
Malgré moi, contre vous, il vous faut fatisfaire.
par tous les complots que j'attens pour falaire
Il juftifie encore un fi jufte courroux,

Si

Sa perfidie au moins me vengera

MICHOL.

de vous.

Ah! dans mon Roi, Seigneur, je retrouve mon Pere.
Ainfi le Ciel s'apprête à finir ma mifere.

Sur nos facrez Autels que d'encens va bruler!
Courrons hâter l'inftant qui doit le rappeller.
Bien-tôt vous le verrez voler pour vous deffendre.
Mais, que vous veut Affer?

SCENE IV.

SAUL, JONATHAS, MICHOL, ASSER,

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D'un Enfant d'Ifraël apprenez l'attentat.
De l'Empire déja partageant la conquête,
Le Philiftin s'avance, & David à leur tête.'
L'élite de nos Juifs par lui-même féduits

A paru dans leur Camp fous les Drapeaux d'Achis.
Et que fert à Sion l'appui de fes murailles,
Lorfque fes propres mains déchirent fes entrailles?
Du combat dans le Camp on a femé le bruit,
Et l'on ne doute point que le jour qui nous luit,
De vos fiers ennemis n'excite le courage,
Et n'éclaire entre vous un horrible carnage.

'Ah! Ciel!

MICHOL.

JONATHAS.

Qu'entens-je ?

SAUL.

Hé bien, daignez ouvrir les yeux,

Reconnoiffez enfin ce Héros glorieux.

C'est donc là pour fon Roi cette ardeur qui le preffe?
Où m'alloit emporter une aveugle tendreffe?
Mon courroux dans mon cœur étoit prêt d'expirer.
Ah! barbare! avec toi tout femble confpirer.
De tous fes attentats le Ciel même eft complice.
Allons, je vais moi feul pourfuivre fon fupplice.
Trahi de toutes parts, je mourrai fans effroi,
Si j'entraîne en mourant le perfide avec moi.

SCENE V.

JONATHAS, MICHOL, ACHAS, ELISE.

MICHOL.

E tout ce que j'entens, grand Dieu, que doisje croire?

Ꭰ DE

Quoi! jufques-là David auroit trahi fa gloire?

Quoi!

Quoi! de Sion en pleurs le trifte fouvenir,
Votre amitié, le fang n'ont pû le retenir ?
Si malgré tant de noeuds, le foin de fa vengeance
Entre un barbare & lui remet l'intelligence,
S'il dément en ce jour tant d'exploits immortels,
Et du Dieu d'Abraham foule aux pieds les Autels.
Hélas! puis-je penfer que fidele à fa flamme,
Quand il immole tout, il épargne fa femnie?
JONATHAS.

Vous écoutez peut-être un injufte transport :

D'Eliezer au moins attendez le

rapport. Adieu, de mon côté je vais moi-même apprendre D'où naît ce bruit fâcheux que l'on vient de répandre. L'impofture fans doute aura pû le femer.

SCENE VI.

MICHOL, ELISE,

MICHOL. 1

AH! courons fur leurs pas pour mieux m'en infor

mer.

Hélas! de quels deffeins faut-il qu'on le foupçonne ? Et toi, qui vois la crainte où mon cœur s'abandonne, Daigne m'apprendre, ô Ciel, dans un mal fi preffant,

Si David eft coupable, ou s'il eft innocent.

Fin du premier Acte.

C

E

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Life, ce rapport n'étoit que trop fidele;

Et confirmant d'Affer la fanglante nouvelle, Eliezer déja de retour dans ces lieux,

A des pleurs plus cruels ouvre encore mes yeux.
On dit qu'avec Achis David d'intelligence,
Par des liens plus forts s'unit à fa

vengeance:

Et le coup qu'à mon Pere il adreffe aujourd'hui, Doit me percer le cœur pour aller jufqu'à lui.

ELISE.

Quel eft le fondement d'un difcours qui m'étonne? O Ciel! que dites-vous?

MICHOL.

Que l'ingrat m'abandonne.
Par quel éclat trompeur d'amour & de vertu
Au dernier des affronts, Ciel, me préparois-tu?
Quelle honte pour moi, pour toute ma famille,
Si de ce Roi barbare il épouse la fille!

Ce bruit dont à tes yeux mon cœur est éperdu,
Dans toute la Judée eft déja répandu.
Aux filles d'Ifraël mon malheur se raconte,
Tout l'Univers bien-tôt fera plein de ma honte.
Mais, chere Elife, enfin connois-en tout l'excès,

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