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SALO ME.

L'ordre eft pour tous, Seigneur.

ALEXANDRE.

Quoi, Madame, fa vúc

Libre à vous feule ici, me feroit défenduë?
SALOME.

Ignorez-vous, Seigneur, quels transports douloureus
Agitent chaque jour ce Prince malheureux ?
Ce n'eft plus ce Héros que la fageffe infpire
Que la gloire amena de fi loin à l'Empire
Qu'Antoine à fes deítins avoit affocié
Et dont Céfar vainqueur envia l'amitié.
Jugez de quelle horreur fa fortune eft fuivic;
Aux derniers des humains Hérode porte envie.
De fon amour encore à toute heure occupé,
Des plus noires terreurs il eft toûjours frappé.
Après quinze ans entiers fon defefpoir redouble 4
De la Reine en ces lieux l'image encor le trouble
Il croit qu'en ce Palais, pour l'accabler d'ennuis
L'ombre de Mariamne erre toutes les nuits;
Et le fuivant partout à travers les tenebres
Exale fa douleur par mille cris funebres.
Sur tout l'aspect d'un fils retrace fes malheurs
Et loin de le calmer, irrite fes douleurs.
De ses rigueurs enfin Hérode eft la victime....
ALEXANDRE.
Madame, fa douleur n'eft que trop légitime;
Et je ne doute point que fes reffentimens
Ne le livrent fans ceffe aux plus cruels tourmens:
Mais s'il pleure ma mere, à fa douleur fidéle
Ne peut-il la chercher dans ce qui refte d'elle;
Mêler fes pleurs aux miens.. Ah! loin de m'éviter
Il eft d'autres objets qu'il devroit écarter.

SALOM E.

Seigneur, dans une cour à ses vœux affervie,
Ce font fes feuls regrets qui tourmentent la vie;

Ses Juifs pour lui de crainte & d'amour prévenus.
ALEXANDRE.

Madame, tous les cœurs ne lui font pas connus :
Je ne le vois que trop: mais quoi qu'il en puiffe être,
Sans fon ordre à fes yeux je crois devoir paroître.
Ne fuis-je pas ici dans ces auguftes lieux,

Où long-temps de ma mere ont régné les ayeux?
Où rien ne s'offre à moi qui ne me puiffe apprendre
Quels font les droits d'un fang dont ils m'ont vû dẹf-
cendre?

SALOM E.

Je le vois, le courroux dont vous êtes épris
Vous a fait oublier ce qu'ils vous ont appris;
Et loin de modérer...

ALEXANDRE.

Je vous entends, Madame ; Je vois quel fouvenir on rapelle à mon ame. Vous voulez, infultant encore à ma douleur, Me mettre fous les yeux ma honte & mon malheur. D'un triomphe cruel je reconnois la trace. Mais enfin j'envifage un terme à ma difgrace. De nos Tyrans communs les projets dangereux, Peut-être quelque jour retomberont fur eux. Adieu.

SALOME à part.

Va, c'est à toi de craindre ma colére.

SCENE V.

SALOME, PHILON; PHE DIME.

JA

PHILO N.

'Ay de tous fes deffeins découvert le mystére. Den fes reffentimens toûjours plus affermi...

SALOM E.

Je fçai jufqu'à quel point il eft mon ennemi,
Et vois depuis long-temps ce qu'il en faut atten
Mon courroux inquiet brûle de vous entendre ;
Mais rempliffez des foins commis à votre foi,
Et volant fur fes pas, fuivez-le chez le Roi.
L'éclat de fon courroux rend fa perte certaine.

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Tu t'éton

SALOM E.

U t'étonnes, Phédime, & j'entrevois ta peine
PHEDI ME.

O Ciel! que faites-vous, Madame, en quelles mains
Ofez-vous confier de semblables deffeins?
Tout ce qu'a fait Philon n'a donc pû vous apprendre
Le zele qui l'attache au parti d'Alexandre?
Les malheurs de la mere, & les périls du fils,
Long-tems dans ce Palais ont excité fes cris.
SALOM E.

Hé ne connois-tu pas ces flatteurs mercenaires!
Auprès de nous voilà leurs retours ordinaires.
Inquiets, incertains, leur cœur toûjours flottant
Dans leur legereté n'a qu'un objet conftant,
La faveur : elle obtient leurs hommages finceres;
Déteftables amis, mais pourtant néceffaires,
Tout autre fur leur choix fe pourroit abuser;
Mais tout devient utile à qui fçait en ufer.
Ardens à nous fervir ils fe font nos victimes;
Sur eux la politique a des droits légitimes;
Souvent dans fes deffeins un grand cœur combattu
Met en œuvre le crime ainfi que la vertu.

Philon m'affure feul la perte d'Alexandre;
Ce qu'il a fait pour lui m'en laiffe tout attendre
Phédime, il ne va point me fervir à demi :
Un traître va toujours plus loin qu'un ennemi.
PHEDI M E.

Par tant d'événemens depuis long-tems inftruite
Madame, de vos foins craignez plûtôt la suite:
D'Alexandre plûtôt recherchez l'amitié :

Ses malheurs ont d'Augufte excité la pitié.
Le peuple le chérit: Que dis-je, Hérode l'aime :
Tout a changé pour lui, changez auffi vous-même ;
Et quand pour lui les vœux fe réuniffent tous.
SALOM E.

Et c'eft-là ce qui doit exciter mon courroux
Toi-même, tu veux donc que ma haine ftérile,
Le reyoye en ces lieux triomphant & tranquile?
Tu veux que mon crédit y paroiffe abaiffé?
Et quel feroit le prix du fang que j'ai verfé?
Fai fait mourir fon oncle, & j'immolai fa mere:
Que dis-je, digne objet d'une jufte colére,
D'un vil peuple en ces lieux follement révéré,
Hircan, le vieux Hircan vient d'être maffacré.
Des Rois Afmonéens Alexandre eft le reste.
Quand je n'en craindrois point la vengeance fun:fes
Crois-tu que le deffein qui m'occupa toûjours
Etonne mon courage, & périffe en fon cours?
Non, non, il faut combler un espoir légitime;
Juftifier ma haine, & jouir de mon crime.
PHED IM E.

Je vous vis les pourfuivre & ne rien épargner.
Mais que prétendez-vous, Madame, enfin?
SALOM E.

Regner

Voilà le feul objet & l'espoir qui m'entraine.
Ce n'eft que pour cela que j'ai perdu la Reine;
Que j'écartai fes fils; que d'Hérode à mes yeux

La gloire eft importune, & le fang odieux.
PHEDI ME.

Et le fang odieux! mais cependant, Madame,
Vos foins d'Antipater autorisent la flame;
Et quoique dès long-temps liée à d'autres nœuds,
La main de la Princeffe eft promise à ses vœux.
Quel intérêt peut donc vous...

SALOME.

Arrête, Phédime. Son interêt n'eft point ici ce qui m'anime. Sur ce que je prétens ne vas point t'abufer. Ce grand zele pour lui cherche à les divifer; De deux cœurs orgueilleux j'excite le murmure, J'oppofe en mes deffeins l'amour à la nature; J'allume un fier courroux dont j'attens tout le fruit. Dans leur défunion l'un & l'autre eft féduit : Pour moi fans le fçavoir contr'eux d'intelligence, L'un travaille à ma gloire, & l'autre à ma ver

geance.

Sur eux de mes deftins je vais me reposer.

Dans l'efpoir qui les flatte ils pourront tout ofer;
Et je répons enfin, pour fervir ma colére,
De l'attentat des fils, & de la main du pere.
PHEDI ME.

Et ne craignez-vous point que fon cœur éperdu,
Ne redemande un fang par fes mains répandu?
Et que de tant d'efforts tôt ou tard le falaire....
SALOM E.

Ecoute, contre moi fi je n'ai que mon frere
De fa vengeance alors je préviendrai l'ardeur.
Repofe-toi fur moi du foin de ma grandeur;
Mais fi je n'ai tenté qu'un effort inutile
Si le Ciel me trahit, j'ai besoin d'un azyle;
Et c'est ce que fur-tout j'ai voulu ménager.
PHÉDI ME.

Quels lieux peuvent vous mettre à l'abri da danger?

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