Rends-moi Chrétienne & libre,à tout je me soumets! Va, d'un pere expirant, va fermer la paupiere, Je pars, adieu, ma fœur, adieu, puifque mes vœux Je reviendrai bien-tôt, par un heureux Baptême, T'arracher aux enfers, & te rendre à toi-même. 1 SCENE V. ZAYRE, feule. Me voilà feule, ô Dieu ! que vais-je devenir ? Dieu, commande à mon cœur de ne te point trahir : Hélas! fuis-je en effet, ou Françoise du Sultane, faits! Mon pere, mon païs, vous ferez fatisfaits. Fatime ne vient point, quoi ! dans ce trouble extrê me, L'Univers m'abandonne ! on me laisse à moi-même ! Mon cœur peut-il porter feule & privé d'apui, Le fardeau des devoirs qu'on m'impose aujourd'hui, A taloi, Dieu puiffant, oui, mon ame eft rendue, SCENE V I. ZAYRE, OROS MAN E. OROŚ MANE. PAroiffez, tout eft prêt, le beau feu qui m'anime Ne fouffre plus, Madame, aucun retardement, Les flambeaux de l'hymen brillent pour votre amant, íes, Heureufes de vous fuivre & de vous obéir, Devant vos volontés vont aprendre à fléchir. Où fuis-je, malheureuse! & tendresse ! ô douleur ! Donnez-moi votre main, daignez, belle Zaïre.... Dieu de mon pere! hélas ! que pourai-je lui dire ? Que j'aime à triompher de ce tendre embaras! ZAYRE. OROSMAN E. Hélas! Ce trouble à mes defirs vous rend encore plus chere, D'une vertu modefte il est le caractere, Digne & charmant 'objet de ma conftante foi, Seigneur. ZAYRE. Fatime, foutien-moi... OROSMANE. O Ciel! eh quoi ! ZAYRE. Seigneur, cet hymenće, Etoit un bien fuprême à mon ame étonnée : 1 Je n'ai point recherché le Trône & la grandeur, OROSMAN E. Ces Chrétiens... quoi, Madame? Qu'auroient donc de commun cette Secte & ma flâ me? ZAYRE, Lufignan, ce vieillard accablé de douleurs, Eh bien ! quel intérêt fi preffant & fi tendre, A ce vieillard Chrétien, votre coeur peut-il pren dre? Vous n'êtes point Chrétienne, élevée en ces lieux, Vous fuivez dès long-temps la foi de mes ayeux : Un vieillard qui fuccombe au poids de ses années Cette aimable pitié qu'il s'attire de vous, Doit fe perdre avec moi dans des momens fi doux. ZAYRE. Seigneur, fi vous m'aimez, fi je vous étois chere.... OP OSMAN E. Si vous l'êtes, ah Dieu! ZAYRE. Souffrez que l'on differe.... Permettez que ces nouds par vos mains affem blés.... OROSMAN E. ་ Que dites-vous ? ô Ciel ! eft-ce vous qui parlez, Zaïre? Zaïre? 3. ZAYRE. Je ne puis foutenir fa colere. OROSMAN E. ZAYRE. Il m'eft affreux, Seigneur, de vous déplaire, Excufez ma douleur.... non, j'oublie à la fois, Et tout ce que je fuis, & tout ce que je dois, Je ne puis foutenir cet aspect qui me tue, Je ne puis.... ah, fouffrez que loin de votre vue, |