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LA LINGERE,

COMED I E.

Le plus beau droit des vertus malheureuses
Eft la faveur des ames généreuses.

J. B. Rouffeau.

ACTE I.

SCENE PREMIERE.

Le théatre représente une chambre.
ALINE, feule.

(Elle tient une boîte d'or, une bourse pleine d'argent, & un billet. )

O CIEL, que ferai-je !.... Comment se

peut-il qu'on foit entré dans ma chambre, qu'on ait mis fur ma table cette boîte, cet argent, ce billet, fans que perfonne ait été vu

dans la maifon!... Catherine n'eft pas fille à fe laiffer corrompre; elle eft honnête. . . . Je ne puis foupçonner que Jofeph, le petit marmiton... Je n'ai que faire de lire ce billet; je ne fais que trop d'où tout cela vient!... Infames préfens!... Et ce marquis d'Olfey eft justement le colonel de mon pere! mon pauvre pere! comment le tirerai - je de là?... Qui m'auroit dit que je verferois tant de larmes en apprenant des nouvelles de mon pere! . . . Oh que je ferois heureuse fi je pouvois le voir, l'embraffer!... Mais le fecret eft néceffaire... fa fûreté, fa vie dépend de ma difcrétion. Ah Dieu!... Et ce méchant marquis d'Olfey eft fon colonel! Et je ne puis, dans cet embarras, me confier à madame Durocher!.... Ciel! quelqu'un vient; cachons vite cette boîte & cet argent.... (Elle les met dans fa poche.)

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les yeux rouges ! Vous avez pleuré, je gage? A LINE.

Non, Catherine, je vous affure... Mais, dites-moi, avez-vous vendu mes habits?

CATHERINE.

Pas encore. Tenez, s'il faut vous avouer la vérité, j'ai des fufpicions dans la tête... des fcrupules, enfin. ... Une jeuneffe comme vous, vendre comme ça toutes fes nippes, & en cachette, ça fonne mal....

ALINE..

Mais ne vous ai-je pas dit, Catherine, que j'avois en Bourgogne une vieille tante dans la mifere, qu'elle m'a fait écrire pour me des mander des fecours, & que je veux vendre mes habits pour lui en envoyer?

CATHER IN E.

Oui, une vieille tante, vous m'avez dit ça. Que diantre! vendre fes hardes pour une vieille tante, c'eft ben fort. Si c'étoit pour une mere ou un pere, je le croirois volontiers; mais vous êtes orpheline, nous favons ça, & cette vieille tante, qui vient là tout d'un coup, me met martel en tête.

ALINE.

>

Ne vous fouvenez-vous pas que j'ai reçu

hier une lettre ?

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....

CATHERINE.

Oui, je vous ai furprise comme vous la lifiez en pleurant à chaudes larmes....

ALINE.

Eh bien cette lettre étoit de ma pauvre

tante....

,

CATHERINE.

Et fi au lieu de cela c'étoit un billet doux... Dame, excufez excufez... vous n'avez que quinze ans, & vous êtes fi gentille!...

ALINE, tirant une lettre de fa poche.

Eh, Catherine, regardez fi cela reffemble à une lettre d'amour.... Vous ne favez pas lire, mais voyez comme ce papier eft fale & groffier....

CATHERINE, regardant la lettre.

Non, il n'y a qu'un beau monfieur que je foupçonne, & fûrement il n'écriroit pas làdeffus. Oh, les billets doux ont une autre mine que ça. D'abord, faut qu'il y ait du doré, & puis y font tout petits, tout petits. . . . J'en ai vu da!.... J'ai fervi la veuve d'un avocat, qu'en recevoit à foifon; elle n'étoit pas jolie comme vous, mais elle étoit riche; ça revient -au même.

ALINE.

Vous vous rappellez bien que c'est cette même lettre que je tenois hier quand vous êtes entrée dans ma chambre?

CATHERINE.

Oui, je la reconnois; c'eft ce gribouillagelà qui vous faifoit pleurer, c'eft vrai ; & fùrement n'y a non plus d'amourettes là-dedans que dans mon œil, j'en conviens. Vlà à préfent que je crois à la vieille tante, d'autant que depuis deux ans que vous êtes ici en apprentiffage, je ne vous ai jamais vue faire la plus petite menterie.... Mais pourquoi voulezvous cacher ça à not maîtreffe madame Durocher?...

ALINE.

Je vous le répete, c'est que je crains qu'elle ne veuille s'opposer à la vente de mes habits...

CATHERINE.

Mais elle eft fi bonne !...

ALINE.

1

Sans doute, & elle m'offriroit de m'avancer

de l'argent....

CATHERINE.

D'autant que cette dame qui vous a édu

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