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monfieur, puifque vous me permettez de vous parler franchement, fouffrez encore quelques queftions fur vos affaires : le féjour de Paris a dû les déranger.

DURVA L.

N'importe je puis attendre....

DES OR MEAUX.

Pourquoi me refuferiez-vous la fatisfaction de vous offrir quelques avances fur votre ouvrage? Cette propofition doit d'autant moins blesser votre délicateffe, que je fuis dépofitaire de fonds qui vous appartiennent à préfent, puifque tous les frais font à couvert, & qu'ainfi je pourrai me payer par mes mains....

DURVA L.

Ah, je fuis pénétré, comme je le dois,

perfonnalités, la mauvaise foi, & que l'amere & fauffe gaieté de la méchanceté s'efforce d'embellir de tous les lieux communs d'ironie & de froides plaifanteries de ce genre méprisable, qui demande auffi peu d'efprit & de talens, qu'en exige au contraire la véritable critique, toujours impartiale, modérée, fine & délicate qui peut feule inftruire & corriger fans offenfer, perfectionner le goût, & mériter l'eftime des auteurs même qu'elle éclaire & qu'elle reprend.

d'une

d'une reconnoiffance auffi vive qu'elle est fondée... Que je ferois vil à mes yeux, fi j'étois capable d'abufer de tant d'honnêteté!... Ce n'eft point mon orgueil qui vous refufe; non, je vous regarde comme un pere, vous m'en donnez les confeils, vous en avez les procédés ;... mais la délicateffe du cœur furpaffe encore celle de la vanité... Et vous avez déjà tant fait pour moi!...

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DESOR ME A U X.

Toute délicateffe exagérée n'eft plus qu'une bizarrerie, un excès produit par une caufe estimable fans doute, mais que la raison désapprouve, & que l'amitié fur-tout doit corriger, Me dire que vous daignez me regarder comme un pere, c'eft m'en donner les droits: ainfi je fuis autorifé à terminer de vains complimens... Je vais envoyer cent louis chez vous. Au refte, ce procédé n'a rien que de fort fimple j'ai cet argent, je vous le prête, & pour un tems très-limité; car le débit de votre ouvrage me rembourfera vraisemblablement avant deux mois.

DURVA L

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Je ne puis vous répondre... Je fuis trop

Tome IV.

P

ému.... trop touché.... Ah, monfieur Deformeaux, fi vous faviez l'étendue du fervice que vous me rendez!....

DES OR MEAU X.

Mais ne fuis-je pas heureux autant qu'honoré de pouvoir vous donner cette foible marque de zele & d'attachement?...

DURVAL, après un moment de réflexion. Je ne dois plus rien vous cacher...( 1l tire un manufcrit de fa poche. ) Ayant le plus preffant befoin d'argent, animé d'ailleurs par toutes les critiques qu'on a faites de mon ouvrage, j'ai compofé en huit jours un petit poëme fatyrique contre tous ceux que j'ai foupçonné mes ennemis...

DES OR MEAUX.

En huit jours un poëme!...

DURVA L. '

Ce genre odieux eft fi facile! Il n'exige ni ordre, ni plan, ni raison; il ne faut, pour s'y diftinguer, que de la raillerie, du fiel & de l'injuftice. J'étois violemment aigri, je fis avec rapidité cet ouvrage indigne de mon caractere, & que défavouent mon cœur & ma raifon. J'abjure un emportement dont vos fages confeils

m'ont fait connoître l'imprudence & la noirceur. (Il lui donne le manufcrit.) Tenez, mon refpectable ami, lifez cette méprifable production : je veux que vous foyez inftruit de tout ce que je vous dois; vous ne pouvez le favoir qu'en parcourant ce manufcrit. Alors vous goûterez véritablement la plus douce joie dont une belle ame foit fufceptible, celle d'avoir ramené un cœur honnête à l'amour de fes devoirs & de la vertu.

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DESORMEAUX, jetant les yeux fur le manufcrit. Que vois-je!... Je connois cet ouvrage !... Leroux devoit l'acheter!...

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Oui. C'est à lui que je me fuis adreffé, fachant bien qu'il n'avoit ni vos principes, ni votre honnêteté... On ne pourroit vous offrir une fatyre de ce fatyre de ce genre fans vous outrager; mais Leroux s'eft facilement décidé à devenir mon complice: on m'a dit tout-à-l'heure de fa part, qu'il acceptoit ma propofition. J'ai fait redémander mon ouvrage, avec l'intention de le lui renvoyer demain, après y avoir fait quelques changemens. Mon bonheur m'a conduit

chez vous; vos confeils ont éclairé mon efprit, perfuadé mon cœur; votre amitié m'a tiré d'embarras; vous me confervez ma réputation, & vous m'épargnez enfin la douleur infupportable des remords affreux que m'auroit infpirés ma faute.

DES OR MEAUX.

Oh, que je m'applaudis en effet d'avoir pu mériter votre confiance!.... Cet ouvrage. ... qui vous perdoit.... je l'ai lu....

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DES OR MEAU X.

Combien il est indigne de vos talens, & de cette nobleffe, de cette fenfibilité qui vous dif tinguent!...

DURVA L..

Je le fens.... ce premier égarement m'en. traînoit à mille autres, & me livroit à tous les emportemens de la haine & de l'injuftice.... Vous avez banni de mon cœur ces noirs mouvemens qui l'agitoient. Je ne puis fonger, fans frémir, que j'étois au moment de perdre toutes. mes vertus!... A préfent je ne fuis plus enAammé que du defir de me diftinguer par

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