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il ne put malgré les témoins s'empêcher de la porter à fa bouche, en lui, rendant graces de cette faveur par des regards très- paffionnés & très tendres, où fa joie étoit vivement dépeinte ; il abre. gea fa vifite le plus promptement qu'il lui fut poffible. Le Jardin de Luxembourgétoit fi près de l'Hôtel de Tours, qu'il crut qu'il n'y avoit pas d'endroit plus à portée de fatisfaire fon impatience,& s'y fit donc conduire, & chercha les lieux les plus deferts, pour ouvrir le papier qu'il avoit reçû. Il contenoit ces mots:

Mademoifelle de la Charce au Comte de Caprara.

J'ai lû votre Billet avec plaisir, la fincerité de cet aveu ne vous ,,paroîtra t il point trop libre? ,, j'aurois peutêtre dû faire plus de difficulté à le recevoir, mais ces

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fortes d'artifices ne conviennent" point à mon humeur : vous m'a-" vez paru digne de mon eftime, " je vous l'ai accordé & je perse- " vererai dans ces fentimens, au- “ tant que je croirai que vous fon-" gerez à les meriter.,,

Le Comte baifa mille fois ces lignes avec des tranfports difficiles à exprimer, il voyoit un gé nie fi fuperieur à celui des autres femmes, dans toutes les manie. res de Mademoiselle de la Charce, qu'il ne pouvoit affez rendre graces à fon étoile, de l'avoir conduit dans les lieux où il avoit eu le bonheur de la connoître: fa fatisfaction étoit complette. lorfqu'il s'imaginoit qu'il ne lui étoit pas indifferent ; car mal gré la referve de Mademoiselle de la Charce, il ne pouvoit douter que fon amour ne lui fûr agréable dans fes épanchemens de joie, il se promit de l'aimer

avec une fidelité égale à la tendreffe qu'il fentoit. Mademoiselle de la Charce ne fit point un mystere à Mademoiselle d'Aleyrac, du Billet du Comte, & de la réponse qu'elle avoit faite, en lui difant: Je ne fçai, ma fœur, fi vous ne trouverez point que j'ai été trop vîte; la diffimulation eft fi peu de mon goût, que je n'ai pû resister au plaifir que m'a caufé l'affurance de l'amour du Comte en cette occafion, comme en toutes les autres; je ne veux rien avoir de caché pour vous, pour vous, vous êtes vous êtes prudente & fage, votre cœur eft libre; ainfi je vous prie d'examiner mes actions, s'il y en a quelquesunes qui vous paroiffent s'éloigner tant foit peu des regles de Pexacte bienséance; ne me ménagez point, corrigez-moi je vous prie, je recevrai vos avis avec docilité. Vous êtes née, répondit

ce,

Mademoiselle d'Aleyrac, avec des fentimens fi bons & fi nobles, que vous n'avez pas befoin de furveillante, étant perfuadée que vous n'en trouveriez aucune auffi rigide que vous même. La bonne opinion que vous me marquez,re. partit Mademoiselle de la Chartire fa fource de l'amitié que vous avez pour moi, auffi n'ai je pas affez de préfomption pour me flatter de mériter les louanges que vous me donnez; je vous réïtere la priere de ne me point abandonner à ma propre conduite. Ces deux aimables perfonnes fe dirent encore beaucoup de chofes femblables, où les affurances de. tendreffe ne furent point épar gnées, ni de part ni d'autre.

Lorsque le Comte arriva, Madame de Clairville étoit occupée dans fon appartement à rece voir des Normands, & Madame de la Charce entretenoit des gens

qui l'étoient venu voir; ainfi le Comte trouva le moyen de joindre Mademoiselle de la Charce dans un coin de la Chambre, où il lui dit avec un air paffionné : Quelle grace n'ai-je point à vous rendre, Mademoiselle je baile à tous les momens de la journée le charmant billet que j'ai reçû; c'est mon tréfor, je n'en poffede aucun, que je n'abandonnaffe vo lontiers pour conferver celui qui me vient de vous: que ne m'est-il permis de vous marquer l'éten. duë de ma reconnoissance! vous verriez qu'elle égale le bienfait qui me comble de joie. Vous exaltez trop, répondit Mademoiselle de la Charce, une chofe qui n'en vaut pas la peine, où vous me ferez appercevoir, que je devois apporter plus de façons avant que de me réfoudre fi aifement à vous écrire, qu'il falloit vous laiffer fouhaiter quelque

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