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que l'on a refusé, & on ne le retrouve plus: je n'ai jamais compté fur mes charmes, dit Mademoifelle de la Charce, je n'en veux faire aucun ufage,je fuis attachée, à mon pere & à ma mere, & je fais fi grand cas de ma liberté, que je tâcherai de la conferver le plus qu'il me fera poffible, ainsi Madame, je vous fupplie de rendre grace au Marquis de fa bonne volonté, que je le prie de la réferver pour quelqu'autre qui ait moins d'averfion pour le mariage. Madame de Clairville dit encore tout ce qu'elle crut capable de fléchir Mademoifelle de la Charce, mais elle n'en put tirer que des refus pleins de politefle, elle tâcha de les adoucir en rendant réponse au Marquis, & lui donnoit toûjours quelques lueurs d'efperances, qu'il ne recevoit pas avec la tranquilité qu'elle fouhaitoit, plus il trouvoit

de résistance, plus il fentoit redoubler fon amour: il faut abfolument, repartit le Marquis, qu'elle ait quelque chofe dans le cœur, foit dans fa Province, foit ici, elle aime, je n'en fuis que trop convaincu, fi c'eft ici, je le découvrirai bientôt, si c'est ailleurs, ou fon mépris & fon indifference me guérira, ou je lui ferai connoître,auffi-bien qu'à mon rival,où peut aller le reffentiment d'un amant outragé. La veuve, qui ne croyoit pas avoir fujet de haïr Mademoiselle de la Charce, tâcha de calmer fes vivacitez,elle employa toute fon éloquence pour réuffir; le Marquis parut rendre, mais en rufé Normand; il fe promit d'examiner fi bien toutes les actions de Mademoi felle de la Charce, qu'il décou vriroit la cause de fes dédains ; il venoit donc tous les jours, auffi bien que les Allemands, & plu

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fieurs Dauphinois; il crut s'appercevoir de quelques régards d'intelligence entre le Comte de Caprara & Mademoiselle de la Charce: un jour cette Compagnie délibera d'aller à Saint Germain voir les préparatifs que l'on faifoit pour recevoir la Princeffe de Baviere, qui devoit être Madame la Dauphine; le Marquis fe mit de cette partie; il parloit beaucoup moins de fa paffion voulant laiffer croire qu'elle étoit diminuée, pour être plus à porté de s'éclaircir de fes doutes, quand on ne le regarderoit pas comme un surveillant interreffé, le même foir que l'on fut à Saint Germain, Madame de la Charce se trouva un peu incommodée après le foupé, elle alla fe coucher & permit à fes Filles de refter avec Madame de Clairville, qui jouoit, fur le minuit on entendit un grand bruit dans l'Hôtellerie,

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& plufieurs voix qui crioient au feu d'un ton à épouvanter les courages les plus intrépides: il eft vrai que le péril étoit évident, car on vit auffi-tôt l'endroit où étoit la Compagnie illuminé de tous côtés, fur tout la porte, que les flammes gagnoient dėja; les Dames eurent tant de frayeur qu'elles refterent comme évanouiës: chacun fongeoit à se fauver, le Comte de Caprara ne balança pas un moment fur ce qu'il devoit faire; il oublia le danger où il étoit, pour ne fon. ger qu'à fauver Mademoiselle de la Charce; il la prit entre fes bras & pafla au travers des flammes pour la mettre en lieu de fureté le mouvement rappella les efprits de cette aimable fille. Le Marquis qui étoit forti quelques momens avant que le feu parût, accourut dès qu'il entendit le bruit que caufoit cet accident;

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il rencontra le Comte de Caprara, lorfqu'il emportoit Mademoiselle de la Charce; ce dernier étoit fi occupé de l'agréable fardeau dont il étoit chargé, qu'il ne prit point garde au Mar. quis, outre que la confufion étoit affez grande pour ne pas démê ler ailement tout ce qui fe préfentoit; le Marquis fut moins diftrait, dès qu'il eut apperçu le Comte avec fa proye, il oublia le refte de la Compagnie fans s'embaraffer de leur donner le fe cours dont ils avoient befoin pour fuivre ceux à qui il s'interreffoit davantage; il prit pourtant fes mefures pour qu'ils ne le remarquaffent point;ainfiil entendit que Mademoiselle de la Charce, fe croyant feule avec fon amant, lui dit : Ah Comte! qu'il m'est agréable de n'avoir obligation qu'à vous, je vous dois deux fois la vie, mon deffein n'est pas

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