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il ne pouvoit pourtant employer que cette Dame; il lui dit que fon amour avoit levé tous les obftacles qu'il avoit d'abord trouvé à fe lier entierement ; qu'il la prioit d'aflurer Monfieur de la Charce, qu'il ne souhaitoit rien avec autant d'ardeur que d'entrer dans fon alliance. Madame de Clairville ne fit aucune difficulté de fe charger de cette commiffion; Monfieur de la Charce la reçut poliment, & répondit qu'il ne pouvoit décider, qu'il n'eût confulté fa Fille; qu'il ne doutoit point que fi elle avoit moins d'éloignement pour le ma. riage qu'elle en avoit paru autrefois, elle ne regarda le Marquis de Parville comme un parti avantageux pour elle; mais qu'il n'avoit pas deffein de la contrain. dre. Monfieur de la Charce fit cette propofition à Mademoiselle de la Charce; laquelle répondit,

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puifque vous me permettez de vous parler librement, je vous dirai, Monfieur, qu'ayant refufé un parti qui vous convenoit, & qui m'attachoit dans la Province où vous faites votre fejour, il me feroit impoffible d'en accepter un qui me conduiroit à l'au tre extremité du Royaume; ainfi je vous fupplie de remercier le Marquis, qui n'ignore point que mon intention n'eft pas de m'établir en Normandie, puifque j'ai été inftruite la premiere de fa bonne volonté, & que je l'avois prié de ne plus penser à cette affaire: je ne la fouhaite pas autant,reprit Monfieur de la Char. ce, que je faifois la premiere; par conféquent nous en demeurerons là; dès qu'il eut joint Madame de Clairville, il lui dit qu'il avoit beaucoup de reconnoiffance de l'eftime que le Marquis marquoit pour fa Famille, qu'il auroit fou

haité que fa Fille eût été difpofée à en profiter; mais qu'elle n'avoit nulle inclination pour le ma riage, que fon alliance lui auroit fait honneur & plaifir, ce pendant qu'il ne pouvoit retrac ter la loy qu'il s'étoit impofé, de ne jamais faire de violence à aucun de ses enfans, fur une chose qui dure autant que la vie : le Marquis de Parville fut fi piqué, lorfque fa parente lui rapporta ces difcours, qu'il ne ménagea plus rien, & lui découvrit ce qu'il avoit réfolu de lui cacher; nous fommes vous& moi,lui dit-il avec emportement, les duppes de Ma demoiselle de la Charce & du Comte de Caprara, vous aimez ce dernier, il feroit inutile de me le nier, je m'en fuis bien apperçu, vous vous êtes même flatté qu'il n'étoit point ingrat; détrompez-vous, vous avez appa remment l'avantage auffi bien

moi d'être un des objets de leurs plaifanteries

que

pour ce qui me regarde, je n'ai pas eu la fatisfaction de me croire aimé ; mais je confiderois mà cruelle comme une indifferente & comme une perfonne vertueuse, avec laquelle on ne devoit efperer de liaisons, que par les noeuds indif folubles, l'excès de ma paffion m'avoit déterminé à prendre ce parti, elle l'a refufé, voulant paffer pour infenfible, ce qu'elle n'eft point du tout;elle aime & eft aimée avec ardeur,j'en ai des cer titudes inconteftables: elle eft aimée autant qu'elle le peut fou haiter, mais demeurerai-je trans quille au milieu des offences dont on m'accable? non, je me venge. rai, ou tous les moyens de le faire me manqueront. Quels rapports, interrompit la veuve, toutes vos plaintes ont-elles avec le Comte de Caprara ? est-il cause

que vous n'êtes pas aimé : Quoi, répondit le Marquis impatiemment, vous êtes affez prévenuë pour ne point entendre que c'eft cetAllemand qui est maître de fon cœur, & qu'elle poffede le fien: ce que vous me dites, réa prit Madame de Clairville toute troublée, feroit-il poffible, & aurois-je le déplaifir de penfer qu'ils triomphent ensemble de la foibleffe que j'ai euë de dire au Comte que je l'aimois? la douleur que je reffens me con. traint à vous avouer qu'il est vrai qu'il a fçu me plaire, que je n'ai pu lui cacher ma tendreffe, & qu'il m'a flatté du retour que je defirois ? Ah! qu'elle trahifon s'écria-t-elle; mais peut-être que vous vous trompez, pourfuivit la veuve, les amans croyent fou vent plus qu'ils ne voyent & plus qu'ils n'entendent, puifque vous êtes incrédule, reprit le Marquis,

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