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chement: oui, Madame,je l'aime, interrompit le Comte, quoique je parle à la mere de celle que j'adore, la diffimulation est un vice fi méprifable, que je n'en ferai jamais aucun ufage; je l'aime donc plus que perfonne n'a jamais aimé; mais c'eft d'une maniere fi pure, que la plus auftere vertu n'y pourroit trouver à redi re; je borne tous mes defirs au feul plaifir de l'aimer & de n'en être point haï ; quant à ce que vous pensez de l'inutilité de ma paffion, vous ne la nommeriez pas de cette forte, fi j'étois abfolument maître de mes volontez : j'aurai d'affez grands biens & des emplois affez confiderables, pour la mettre en état de n'avoir rien à fouhaiter. Je ne doute point, répondit Madame de la Charce, que la fortune qui vous eft deftinée, ne pût remplir les defirs des perfonnes les plus ambitieufes i

mais vous convenez que vous dépendez d'un Pere; il eft vrai Madame, je n'avancerai point une chofe pour une autre ; mais ce Pere, continua le Comte,n'eft pas inflexible, & je me flatte, que lorfque je lui apprendrai que Mademoiselle de la Charce est la plus parfaite personne de la terre, & que je ne peux être heureux qu'en paffant ma vie avec elle, il aura des égards pour ce que je fouhaite: voilà, Madame,quels ont été mes fentimens, depuis que j'ai l'honneur de la conoître. Monfieur, dit Madame de la Charce, ils font très avantageux pour ma Fille; mais comme l'execution n'en eft pas aifée, & que fi elle perdoit l'eftime du Public, elle ne feroit pas digne de il faut la ménager, quoi qu'il en coûte, ainfi trouvez bon que je vous fupplie de joindre à toutes les obligations que nous

vous,

vous avons, celle de rendre vos vifites moins fréquentes: je vous obéirai, Madame, répondit le Comte; mais après l'aveu que je viens de vous faire, vous pouvez juger avec quelle douleur je reçois la loi que vous m'impofez; je vous demande la grace de ne me point bannir entierement de votre préfence,tant pour vos interêts que pour ma fatisfaction, la chofe feroit trop marquée & donneroit à penfer ce qui n'est point; de plus, mes ennemis triompheroient avec trop d'or gueil de la réuffite de leur noirceur, je tâcherai pourtant de les découvrir, & de leur apprendre qu'il ne fait pas bon offenfer un homme de ma forte, Ah! Monfieur, interrompit Madame de la Charce, une affaire d'éclat feroit un tort infini à ma Fille; plus on parle des perfonnes de nôtre fexe, plus elles font exposées à la

cenfure: le mieux pour nous est d'être oubliée ; fi vous l'aimez, ajoûta-t-elle, menagez fa gloire: elle m'eft plus chère qu'à qui que ce foit, repartit le Comte, fi j'ay le bonheur de connoître l'objet de ma haine, je ne la compromettrai en rien & me gouvernerai de la façon que l'honneur & la probité le permettent; je ne me fuis jamais éloigné des principes de l'honnête homme, je fçai ce que l'on doit aux Dames, & furtout à celles pour qui on facrifie. roit fon fang; mais je sçai auffi qu'il faut punir les outrages que l'on ne s'eft point attiré; je ne me fens pas en difpofition de paroître devant la joyeuse Compa gnie qui eft dans votre apparte ment, ainfi, Madame,je vais prendre congé de vous; enfuite il lui donna la main, pour la remettre à la porte, puis il fortit de la

maison.

Madame de la Charce rendit compte à Monfieur de la Charce de la conversation qu'elle avoit eue, fans lui parler de ce qu'elle avoit découvert des fentimens de fa Fille, elle étala les bonnes intentions du Comte: il fe peut faire, répondit Monfieur de la Charce qu'il foit amoureux de ma Fille, mais fon Pere ne l'eft pas, & a fans doute depuis longtemps des vûës pour l'établif fement d'un Fils que je fçai bien qui eft un grand parti, jugeonsen par nous-même: fi mon Fils me propofoit pour fa femme une étrangere, dont je ne connoîtrois ni la naissance ni le bien, aurois. je beaucoup de condescendance pour des fantaisies qui paffent auffi promptement qu'elles naiffent, pour finir tout, ajoûta-t-il, lorfqu'il fera venu quelque tems, moins fouvent, il faudra nous en défaire entierement; de plus, le

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