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mariage de Monfeigneur fe terminera dans peu de jours, & nous partirons enfuite. Madame de la Charce, qui craignoit que l'on ne foupçonna les chagrins de fa Fille, lui manda par Mademoiselle d'Aleyrac de fe rendre où étoit la Compagnie, celleci lui apprit la promenade du Jardin, où elle n'avoit pû affifter, & le départ du Comte fans revoir perfonne, ce qui caufa une douleur difficile à exprimer à Mademoiselle de la Charce, qui eur beaucoup de peine à fe réfoudre à executer les ordres de fa Mere; toute l'éloquence de Mademoiselle d'Aleyrac fut neceffaire pour la déterminer ; elle la pria de compofer fon exterieur, de maniere que l'on ne pût déméler ce qui fe paffoit dans fon cœur, elle lui reprefenta que fi fes ennemis étoient dans la Compagnie, comme elle le foup

çonnoit, fe feroit augmenter leur triomphe, en laiffant paroître fon chagrin, cette derniere raifon eut plus de force fur Mademoiselle de la Charce que toutes les autres; elle parut donc avec un air affez tranquilles le Marquis de Parville s'avifa de lui vouloir dire quelques galanteries, qu'elle reçût d'une maniere trèsfroide & très méprisante: on parla beaucoup de l'arrivée de Madame la Dauphine, cette Affemblée fit des projets pour fe trouver à toutes les Fêtes qui devoient fuivre le mariage, la feule Mademoiselle de la Char ce ne prenoit aucune part aux plaifirs que les autres fe promettoient, & auroit trouvé plus de fatisfaction à être dans un defert en liberté de ne voir perfonne & de réver fans distraction à fon cher Comte; il étoit auffi à plaindre qu'elle.

Après avoir quitté Madame de la Charce, il fe retira chez lui, accablé de douleur & animé de fureur contre ceux à qui il devoit tous les maux; fon inquiétude redoubloit fur l'état de Mademoiselle de la Charce; fi elle étoit instruite de leurs disgraces, il la plaignoit autant qu'il fe trouvoit à plaindre lui-même ; fi elle les ignoroit, il craignoit qu'elle ne l'accufa de negligence pour elle, que faire en de pareilles ex tremitez, difoit-il, je ne fçai perfonne à qui pouvoir me fier, pour lui rendre une Lettre, elle eft peut-être dans la même peine; c'est à moi à imaginer les moyens de lui apprendre mon defefpoir; elle a plus de furveillans que je n'en ai, après avoir bien rêvé, rejetté & approuvé divers projets qu'il forma, il s'en tint à celui de fe rendre aux Cordeliers le lendemain matin à l'heure qu'elle

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avoit accoûtumé d'y aller en ha. bit de femme très-caché dans fes coëffes, & de lui donner une Lettre affez adroitement pour que fa mere ni perfonne ne s'en apperçût, l'amour métamorphofa donc le Comte d'un beau jeune homme qu'il étoit, en une femme de trés-petite apparence, qui fe plaça dans l'Eglife, affez à portée de Mademoiselle de la Charce pour tirer fa robe, de fa çon que malgré fa distraction,elle ne douta pas qu'il n'y eût du mif tere; fon cœur fut en cette occafion plus clairvoyant que fes yeux, il lui dit que le Comte avoit part à l'action de cette femme, dans la main de laquelle elle ap perçut un papier qu'elle prit fans affectation, & jetta un regard fi gracieux fur la femme, qu'il lui fut aifé de juger qu'elle ne lui avoit pas déplû ; cette perfonne difparat un moment après

se trouvant très foulagée d'avoir fi bien réuffi; Mademoiselle de la Charce, mit ce papier dans fa poche jufqu'à ce qu'elle fût en lieu à le pouvoir lire en libertés cependant elle fentoit une fe crete fatisfaction, dans la pensée qu'il ne pouvoit y avoir que le Comte qui eût imaginé ce ftratagême pour lui donner de fes nouvelles, elle fe retira le plutôt qu'il lui fut poffible, pour contenter l'impatience qu'elle avoit d'éclaircir les doutes, elle ou vrit le papier, & y trouva ces

mots.

Si vous êtes inftruite de mes «‹ malheurs, je me flatte que vous « y ferez fenfible, fi vous les igno- « rez, vous pourriez foupçonner ma rendreffe; c'eft pourquoi je « me fers d'une voye fi extraordi- « naire , pour vous demander une « heure d'audience particuliere; « nous ne fommes plus en termes «

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