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feules, Mademoiselle d'Aleyrac lui dit, fi je vous ai paru ferme jufqu'ici,ma Sœur, je vous avouë cependant que je tremble, lorfque je penfe à ce que je vais faire. Le livre dont vous venez de parler est donc bien terrible, in. terrompit Mademoiselle de la Charce? vous en allez juger, répondit la cadette, & du perfon. nage que mon amitié pour vous m'oblige de faire ; enfuite elle ouvrit le cabinet, duquel Made. moiselle de la Charce vit fortir une Dame qui fe jetta à fes genoux; il ne lui fallut pas beaucoup de tems pour la reconnoître Ah! ma Sœur, dit-elle à Mademoiselle d'Aleyrac, que vous m'avez épargné de peines & d'agitations differentes, en me faifant trouver ici cette aimable Dame, fans m'en avertir d'a vance je n'avois garde, reprit Mademoiselle d'Aleyrac, crai

gnant que vous ne puiffiez pas conferver votre modération or dinaire: enfuite elle conta ce qui s'étoit paffé entre elle & la Servante; le Comte leur recita auffi la façon dont il s'y étoit pris pour être introduit & caché dans la maifon; elles trou. verent le tout fi bien conduit qu'elles eurent bonne opinion de l'adreffe de la Servante, & se crurent delivrées des inquiétudes d'être découvertes; que de graces j'ay à vous rendre, dit le Comte en parlant aux deux Sœurs, de traiter fi favorablement un malheureux banni de l'unique Compagnie dont il fou haiteroit de ne fe feparer jamais ; par où me fuis je attiré cette infortune j'ai examiné mes ac. tions & mes paroles, il me femble que je n'ai rien fait, ni rien dit qui pût donner connoiffance de mes fentimens à d'autres qu'à

celle qui regne fouverainement dans mon coeur, ajoûta-t-il en regardant tendrement Mademoiselle de la Charce. Je ne fuis gueres plus fçavante que vous fur ce fujet, reprit Mademoiselle de la Charce, je ne vous trouve coupable en aucune manieres je fçai feulement que nos ennemis n'oferoient nous attaquer en face, puifqu'ils ont la baffeffe de fe cacher, en répandant le ve nin de leur mauvaise volonté ; enfuite eile lui conta que l'on s'étoit fervi de la voye d'une Lettre anonyme pour leur nuire, que fa lecture avoit bleffé l'aufterité de fon Pere & de fa Mere 3 qu'il ne devoit pas leur en fçavoir mauvais gré, puifqu'ils avoient toujours regardé l'honneur comme le premier de tous les biens, & fur lequel on ne pouvoit avoir trop de délicateffe. Vos précautions, interrompit le

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Comte, pour me faire approu ver le procedé de vos proches font inutiles, je vois bien que vous ne cherchez qu'à les excu fer, je fuis le premier à prendre leur parti, ils vous ont donné le jour, c'eft affez pour qu'ils me parroiffent dignes de mon refpect & de ma foumission à toutes leurs volontés; je n'ai garde de les foupçonner d'avoir compofé cet te fatale Lettre ; ils l'ont reçûës & ont cru faire leur devoir d'a bréger les difcours des critiques, en finiffant ce qui donnoit lieu de les tenir, elle part de gens qui s'interreffent trop à ce qui nous regarde, Madame de Clair ville me fait affez d'avance pour la croire coupable, fi elle avoit plus de jugement que je ne lui en connois; mais elle est trop étourdie pour conduire une pareille fourberie, je ne peux donc avoir d'opinion solide que fur

fon Parent; il vous aime, vous l'avez méprifé, il ne s'eft point rebuté,& il est d'un païs où les rufes pour venir à fes fins ne coutent rien; ainfi je ne doute pas que ce coup ne parte de lui; cependant il faut qu'il foit bien clairvoyant, s'il a pénétré mes fentimens: car j'ai eu grand foin de les lui ca cher, me défiant plus de ce Normand que de personne; je ferai à mon tour tant de perquifitions, que j'efpere de m'éclaircir, & fi

découvre l'auteur de mes maux, il fçaura quel prix on doit attendre, quand on a offensé un homme comme moi. C'étoit juftement ce que Mademoiselle de la Charce appréhendoit, elle fit fon poffible pour diffuader le Comte des pensées qu'il avoit contre le Marquis, elle aimoit mieux refter fans vengeance, que de voir expofer fon amant ; une difpute en France entre deux

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