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hommes, ne pouvoit se terminer que par la mort ou la fuite alternative, qui faifoit trembler cette aimable fille; elle vouloit que fes foupçons tombaffent fur Madame de Clairville, ou quelqu'autres femmes, ne trouvant aucuns dangers à l'irriter contre ce fexe, dont la réputation de foibleffe eft connue, & qui n'est®. pas dans l'ufage de fe fervir des voyes de fait. Le Comte démêla fes intentions: mais comme il n'avoit pas deffein de fe laiffer perfuader fur cette article, il changea de conversation, il lui renouvella les affurances de fon amour, lui réïtera les protestations qu'il lui avoit faite plufieurs fois de ne pouvoir vivre heureux fans elle, & des inftances qu'il feroit auprès de fon Pere pour hâter fa bonne fortune, lui promettant que rien au monde ne pourroit l'obliger de fe

donner à une autre. Mademoiselle de la Charce fentoit tout le plaifir qu'un cœur véritablement touché trouve à entendre dire ce qu'il fouhaite; elle se fouvint dans ce moment que le Comte lui avoit promis un jour, qu'il lui apprendroit ce qu'elle ignoroit de fa vie; elle le fomma de fa parole: vous n'y verrez pas, répondit-il, des évenemens bien extraordinaires, ma vie a été affez unie, & je m'imagine n'avoir vécû que depuis que je fuis attaché à vous; je ne fortirai point de la vraisemblance, en vous contant ce qui m'eft arrivé jus qu'à prefent: mais il vous faut obéir.

Mon Pere refta veuf encore affez jeune avec deux enfans dont je fuis l'aîné ; le second eft une fille; dans mon Pays elles ne font point à charge aux familles; leurs naiffances & leurs

mérites font les dotes qu'elles emportent de leurs Maisons : car pour le bien il demeure aux mâles,& les filles n'en ont que quand les mâles manquent abfolument, non feulement dans une famille, mais dans toutes les branches du nom: mon pere a eu grand soin de notre éducation; il a fi bien réuffi à celle de ma Sœur, qu'el le a épousé depuis quelques années un Comte de l'Empire, qui a plus de cent mille écus de rente; pour moy j'ai toûjours été à la Cour de l'Empereur ou à l'Armée, d'abord auprès de mon Pere, qui est un des Generaux de l'Empire, & où par la fuite, l'emploi que les fervices m'avoient fait obtenir, me conduifoit: lorfque je fus en âge raifonnable, mon Pere songea à me marier. M'eft-t-il permis, ajoûta.t.il en fouriant, de parler des effets que mon peu de mérite

produifoit dans ces tems-là. Ne Vous humiliez point tant, réprit Mademoiselle de la Charce je ne prétends pas que vous faffiez tort à mon goût, comme je n'ai jamais rien trouvé de si aimable que vous, je ne vous pardonnerois pas de mépriser ce que j'eftime; que votre modeftie, continua-t-elle, ne l'emporte done point fur la confiance que je fouhaite que vous ayez en moi; n'obmettez rien de ce que je fouhaite d'apprendre puisque vous me l'ordonnez, répondit le Comte, je vais m'expliquer avec fincerité; plufieurs jeunes perfonnes de la Cour melaifferent connoître que je ne leur déplaifois pas, peut-être que les grands biens dont mon Pere jouit avoient autant de part à leurs tendreffes que ma perfonne ; mais il n'importe toutes leurs avances n'ébranlerent point mon

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cœur, moi-même j'étois étonné de fa dureté, je ne fçavois pas qu'il étoit destiné pour un plus digne objet,ajoûta-t-il, en baisant pour la premiere fois une des mains de Mademoiselle de la Charce, cependant mon Pere voyoit avec plaifir les empreffemens que ces aimables personnes marquoient pour moi; comme leurs naiffances lui convenoient également, il ne voulut point m'en parler d'abord, pour me donner le tems de me déclarer, & enfuite ceder à mon choix 5 pour moi qui perfeveroit dans mon indifference, je regardois tout ce qui me venoit de la part de ces Dames comme des politefles, je ne pénétrois pas plus avant, parce que je jugeois de leurs fentimens par les miens ; parmi celles-là,il y en eut une,que vous trouverez bon que je ne vous nomme point: car quoi

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