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c'eft pour examiner de quel front il pourroit colorer son inconstance en ma présence. Ne defirez point, repartit fa Sœur, une chose qui ne peut arriver & dont la chimere ne laifferoit pas de vous entretenir dans une erreur de laquelle il faut vous défaire; vous devez travailler à oublier un ingrat,& tâcher par ce moyen de recouvrer le repos qu'il vous a ôté défiez-vous des fentimens que vous infpire, comme yous vous l'imaginez, l'envie de le confondre ; ils font causez par la joye que vous auriez de l'entretenir, & ils fe mafquent du defir de lui faire des reproches. Si vous vous donnez la peine de démêler tous les mouvemens qui vous agitent, je crains que vous n'y découvriez plus d'amour que de colere. J'écouterai toujours, continua Mademoiselle d'Aleyrac, tout ce que vous me direz

à ce fujet, mais pour votre fatisfaction, je voudrois que vous puffiez prendre fur vous de m'en parler moins fouvent, puifque ce feroit une marque que vous vous en fouviendriez plus rarement; ne croyez pas que je m'ennuye de vous entendre, fi ce que vous m'en dites pouvoit foulager vos chagrins, je vous prie rois de ne point ceffer. Ma chere Sœur, interrompit Mademoifelle de la Charce, ayez quelque indulgence pour mes malheurs, j'apporterai tous mes foins afin de mettre vos confeils en ufage, je ne fçai fi j'y parvien drai; cependant fongez que ce n'eft qu'avec vous que j'ai la trifte confolation de me plaindre. Je vous le repete, répondit Mademoiselle d'Aleyrac, vos peines me touchent comme les miennes propres, c'eft pourquoi je fouhaiterois que vous puffiez

furmonter un mal qui eft fans remede. Ces converfations recommençoient fréquemment entre ces deux belles perfonnes, la promenade, la chaffe & les autres amusemens de la Campa. gne occupoient tour à tour Mademoiselle de la Charce, fans diftraire fon cœur de la funeste paffion dont il étoit rempli,

Dans ces tems-là la guerre étoit allumée par toute l'Europe, il y avoit même déja quelques années; c'est celle qui fe termina par le Traité de Rifwick, & où l'on pouvoit regarder la Princeffe Adelaïde de Savoye comme la Déeffe de la Paix puifque le mariage de Monfei. gneur le Duc de Bourgogne avec cette augufte Princeffe fut l'article le plus confiderable, & celui qui rendit le repos à toutes les Nations mais il faut revenir au tems de ces difcor

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, pour fuivre mon fujet. Le Duc de Savoye s'étoit li gué avec l'Empereur contre la France, notre grand Roi ayant toujours paru fi redoutable à tous les Souverains, qu'ils uniffoient leurs forces pour tâcher de réfifter aux fiennes. L'Empereur envoya des Troupes au Duc de Savoye, le Comte de Caprara fe trouva un de ceux qui furent nommez pour les commander. Mademoiselle de la Charce, qui ne perdoit aucunes occafions de s'inftruire des marches du Comte, n'ignora pas long-tems qu'il étoit fi près d'elle. Madame de la Charce avoit une terre fur les Frontieres du Dauphiné & de la Savoye. Un mouvement que Mademoiselle de la Charce ne put vaincre, l'obligea de dire à fa mere qu'il feroit neceffaire d'al ler en ce lieu, pour empêcher par fa préfence les défordres que

pourroit caufer le voisinage des Troupes, & en cas qu'elle ne voulût pas y refter long-tems, il falloit au moins en ôter les meubies. Madame de la Charce approuva la penfée de fa fille, elle fe difpofa à aller demeurer dans cette terre environ l'année 1694. Après que ces Dames eurent sejourné quelques mois dans cet endroit, un jour que Mademoifelle de la Charce étoit en habit d'Amazone, prête à monter à cheval pour aller à la chasse avec les domeftiques qui avoient ac coûtumé de la fuivre, elle entra dans l'appartement de Madame de la Charce, pour la prier, comme elle faifoit ordinairement, de trouver bon qu'elle allât s'amufer à cet exercice, & profiter d'une très-belle journée. Dans le tems qu'elles s'entretenoient, on entendit un grand bruit dans la cour du Château,

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