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je me fuis donnés, & que vous vous fouveniez, qu'en me perdant vous perdez un bon pere. On pria Monfieur de la Charce de fe tranquilifer, pour qu'il pût donner à ceux qui s'interefloient à fa fanté la fatisfaction de ne point troubler l'effet des remedes; ils réuffirent fi bien, que quelques jours après on commença d'avoir un peu d'efperance. Mademoi. de la Charce ne partoit pas d'auprès de fon lit, & lui prefentoit elle-même tout ce qu'il prenoit. Il parut content de fes affiduitez & des fervices continuels qu'elle s'empreffoit de lui rendre lorfqu'il fut convalefcent, il lui marqua autant d'amitié qu'il avoit fait avant qu'il eût fujet de s'en plaindre on pouvoit même dire que cette maladie avoit aprivoifé fon humeur, il n'avoit jamais paru plus traitable, il ne fon geoit qu'à ce qui feroit agréable à fa femme & à fes filles.

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Dans ce tems-là, qui étoit l'année 1679, on parloit des plus grands mariages qui puffent fe faire en Europe; c'étoient celui de Charles II. Roi d'Espagne avec Mademoiselle d'Orleans fille aînée de Monfieur, & celui de Monfeigneur le Dauphin, avec la Princeffe de Baviere. Monfieur de la Charce étant en. tierement rétabli de fa maladie & revenu de fes chagrins contre Mademoiselle de la Charce, lui dit un jour en riant: Puifque vous avez rant de repugnance pour le mariage, voulez-vous que j'employe la fomme que je vous deftinois, à vous faire voir les Fêtes magnifiques que l'on prépare pour les auguftes nôces, dont il est question. Mademoifelle de la Ĉharce répondit en riant de même, qu'il étoit le maître de disposer de tout ce qui pouvoit la regarder, qu'elle Îui

avouoir

avouoit qu'elle aimoit mieux qu'il ne lui donnât jamais que la vie & l'habit, & avoir le plaifir de voir des Spectacles auffi rares & auffi fomptueux, que ceux dont il s'agifsoit, c'est àdire, continua Monfieur de la Charce en plaifantant toujours, que les plaifirs préfens vous paroiffent plus agréables que les

commodités à venir.

Mademoiselle d'Aleyrac, con tinua-t-il, s'adreffant à la cadet. te, veut-elle bien auffi diminuer fes prétentions pour un pareil fujet? Je ne dédirai jamais ma fœur, repartit-elle, & je vous avouerai ingenuement, que depuis que j'ai l'ufage de raifon, j'ai toûjours fouhaité d'aller à Paris, non pas avec les mêmes fentimens que la plupart des perfonnes de mon âge & de mon fexe le défirent; mais parce que je fçai que c'est le centre de la po

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liteffe, & où les Sciences regnent avec le plus d'empire.

Hé bien ma petite Muse, ininterrompit Monfieur de la Charce, tâchez d'inspirer le même goût à votre mere; & fi elle y confent, je rangerai mes affaires pour vous donner fatisfaЯion.

Il est aisé de préfumer, que la complaifance feule ne faifoit pas marcher Monfieur de la Charce; un voyage de cette confequence ne pouvoit s'executer fans une grande dépense, fa curiofité le faifoit agir autant que fa bonté. Outre les raisons, une affaire effentielle l'appelloit à Paris; il eft vrai qu'il auroit pû s'y rendre feul, & c'eft en cela qu'il marqua l'envie qu'il avoit de contribuer aux plaisirs de sa famille. Madame de la Charce, quoique fort revenue des amufemens du monde, fut charmée

d'en procurer un pareil à fes filles, furtout s'agisfant de voir des chofes qui ne pouvoient pas arriver plufieurs fois pendant la vie; ainfi le départ fut fixé pour le mois de Juin.

Monfieur de la Charce manda à fes fils le Marquis de la Charce & le Comte de la Tour qui étoient à Paris, de lui retenir un logement convenable; ils n'en trouverent point de plus commode qu'à l'Hôtel de Tours, où il y a ordinairement bonne compagnie. Toute la famille arriva dans le tems marqué, il venoit du monde de tous côtez foit des Provinces du Royaume, foit des Etrangers de toutes les nations, attirés par le défir de voir les magnificences de la nôce du Roi d'Espagne, qui devoit fe faire fix mois avant celle de Monfeigneur. Le premier Spectacle fut la fuperbe Entrée

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