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pour lui paroître auffi digne d'ê. tre aimée, qu'elle se trouvoit capable d'inspirer une paffion. Enfin l'inftant qu'elle défiroit arri. va, elle vit paroître dans la cour la brillante livrée du Comte elle en avertit la Compagnie. Mademoiselle de la Charce rougit, & fe trouva un peu embarraffée, fans pourtant vouloir con. venir avec elle-même de ce qui pouvoit caufer fon trouble. Monfieur de la Charce courut audevant du Comte, que l'on annonça le Comte de Caprara; il lui rendit mille graces des manieres gracieuses & obligeantes, qu'il avoit eues pour la femme & pour fes filles, il lui dit tout ce qui pouvoit marquer fa reconnoiffance; à quoi le Comte répondir avec une modeftie infinie, diminuant ce que Monfieur de la Charce exaltoit, de façon qu'à entendre ce jeune homme,

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on eut dit qu'il n'avoit rien fait, & que c'étoit lui qui devoit remercier de ce que l'on avoit bien voulu fouffrir les petits fervices: il fut reçu des Dames comme il le meritoit, Madame de la Charce le combla d'honnêtetés, Mademoiselle de la Charce conferva un air ferieux & poli, & parla moins que les autres; pour Madame de Clairville, elle fut d'une vivacité fi brillante, qu'elle auroit étourdi le Comte de Caprara, s'il n'avoit donné toute fon attention au plaifir de voir Mademoiselle de la Charce, & de trouver dans la perfonne qui le charmoit, une fille d'une des meilleures Maisons du Royaume, dont les manieres lui infpiroient autant de refpect, que d'amour. Après quelques momens de converfation, Madame de Clairville qui craignoit qu'il n'ofất pour la premiere fois faire une longue

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vifite, & qui souhaitoit qu'il ne fortît pas fi tôt, propofa une par tie d'Ombre. Le Comte de Caprara dit qu'il feroit tout ce qui pouroit contribuer à l'amufement des Dames; il fut donc le tiers entre Madame de la Charce & Madame de Clairville. Cette derniere n'épargna aucunes minauderies, & fe donna tous les airs qu'elle crut propres à engager le Comte, mais il n'y pensa pas plus qu'à fon jeu ; il n'étoit apliqué qu'à regarder Mademoifelle de la Charce, il gardoit pourtant les ménagemens néceffaires, pour ne caufer point de foupçons au refte de la Compagnie, de ce qui fe paffoit dans fon cœur il rencontroit quelque fois les yeux de cette aimable perfonne, mais elle les baiffoit fi promptement qu'elle ne lui don noit pas le tems de fe flater, qu'elle pût découvrir ce qu'il

cherchoît à lui apprendre par fes regards. Madame de Clairville vivoit dans la confiance,elle avoit fi bonne opinion d'elle même, qu'elle ne douta point que par la fuite le Comte ne fe rendît à fes charmes. Le jeu étant fini, on parla d'aller aux Tuilleries, le Comte fe trouva à la porte pour donner la main aux Dames lorf qu'elles defcendirent de caroffe, pendant la promenade, il eut la fatisfaction de tems en tems de dire quelques mots à Mademoi felle de la Charce, dans des mo. mens que Madame de la Charce & Madame de Clairville étoient obligées d'entretenir ceux qui les abordoient; mais ce fut avec tant de circonfpection, qu'elle n'eut pas lieu de conjecturer qu'il fen. tit rien de particulier pour elle: fa regularité vouloit lui perfuader qu'elle feroit conftante fi elle avoit fon eftime, mais certains

mouvemens qui s'élevoient dans fon cœur, lorfqu'elle penfoit de cette forte, lui faifant craindre qu'elle ne defirât quelque chofe de plus vif, elle rejettoit ces idées autant qu'il lui étoit poffible. La promenade étant finie, chacun fe retira chez foi.

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Le Comte venoit très affidu. ment au logis de Madame de la Charce, fur le prétexte de faire tous les jours fa partie d'Ombre. Madame de Clairville garde d'y manquer, elle s'imaginoit qu'elle avoit beaucoup de part aux vifites du Comte, & n'avoit point encore remarqué, que fi les paroles étoient pour les autres, les regards tendres n'étoient addreffés qu'à Made. moiselle de la Charce. Le dessein qu'elle forma de lui plaire, lui perfuada qu'elle réuffiroit: la chofe n'étoit pas fi facile qu'elle l'avoit cru, plus elle l'obfedoit,

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