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Pour aller dépouiller une rive fleurie
Des dons faits pour orner & la tête & le fein,

Je ne fai quelle rêverie

La conduifoit dans la prairie ;

Ce n'étoit point l'amour qui la faifoit rêver;
Ou du moins cet amour ne faifoit que de naître.
On le fuit, que l'on croit à peine le connoître ;
On le reffent, qu'on ofe encore le braver :
Mais laiffons-là ce petit traître ;

Ce font des fleurs qu'il faut trouver.

La campagne en étoit abondamment pourvûe;
Mais, quelle aventure imprévûę!

Voici que, recevant l'organe de la voix,

Ces mêmes fleurs, dont, par la vûe,
Anette avoit déja fait choix,
Parlent pour la premiere fois.

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Refpecte-nous, jeune bergere;
Refpecte nos vives couleurs,

» Que va bientôt flétrir le plus grand des malheurs,

» Si, pour la gloire paffagére

» D'une parure vaine, & qui t'eft étrangére,
»Tu nous fais éprouver les plus vives douleurs.

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A peine ferons nous cueillies,

Que, perdant tout-à-coup notre premier éclat, » Par le plus chétif odorat,

» Nous ne ferons pas accueillies.

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Qui n'ajouteroit rien à tes traits qu'on encense; » Et puisse, au nom d'un dieu fatal à l'innocence, > Une aimable rougeur couvrir toujours ton front!

En écoutant ces fleurs, qui, de fi bonne grace, Peignoient & déploroient leur prochaine disgrace, Anette reffentit une douce pitié ;

Et pour ce bon office, eut de ces fleurs nouvelles, Dans le confeil fuivant, propre à toutes les belles, Un gage de bonne amitié.

Ce que, dans un péril extrême,

» Nous t'avons dit pour nous, Anette; pour toi-même, » Pour toi, tu peux le prendre en toute fureté :

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Chaque jour, au village, on vante ta beauté ; Mais la beauté, qu'eft-elle ? Une fleur paffagére,

Qu'un moment voit briller, qu'un inftant fait vieillir : » Ne compte donc pas trop fur cette fleur, bergere ; » Et gardes-toi furtout de la laiffer cueillir.

*****

***

FABLE VII

La Fleur & le Fruit.

A La vanité près, une fleur toute aimable
Dédaignoit un fruit estimable,

Mais qui n'étoit pas encor mûr !

Le fruit, fur fa durée, interroge la belle.
En bon françois, cela s'appelle

Mettre les gens au pied du mur.

Ton règne, dit le fruit, eft brillant, je l'avoue;
Mais, malheureux qui fe dévoue,

A n'encenfer que tes autels!

Au bout de quelques jours, ce beau régne s'envole :

On ne parlera plus de ton éclat frivole,
Lorfque j'embellirai la table des mortels.
L'oracle s'accomplit. Dès la même journée,
La fleur mourante, abandonnée,

Perd fes adorateurs, ainfi fon éclat ;

que

Et le fruit, au milieu des feftins qu'il décore,
Dans l'hiver même, charme encore

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En excellens avis, cette fable eft fertile :
Un feul aujourd'hui me suffit.
L'agréable toujours doit céder à l'utile;
Puiffé-je en faire mon profit!

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UN lierre, à fon voifin, tint un jour ce langage.
Camarade, dis-moi, quel espoir nous engage
A refter encore attachés

A cet arbre inutile, à cet antique chêne,

Dont les rameaux font defféchés?
Rompons une stérile & fatiguante chaîne :
Ce tendre attachement jadis nous étoit bon;
Mais, que faire à préfent de ce chêne barbon?
Loin de fournir encore à notre subsistance,
Comme lorfqu'il étoit robufte, jeune & verd,
Il prend toute notre substance

De nos feuilles il eft couvert,

Et mourroit fans notre affistance.

Va, croi-moi, faifons trêve à des foins fuperflus; Choififfons autre part un patron d'importance, Qui nous coûte bien moins, & nous rapporte plus.

Ingrat, répondit l'autre lierre,

D'un ton par le zéle excité,

As-tu donc oublié, dans ta profpérité,
Que tu ferois dans la pouffiére.

Si, pour te garantir de cette indignité,
Ce chêne bienfaifant ne t'avoit adopté ?
Et ce patron verra fa bonté méprisée

Par ce même arbriffeau qu'il a fi bien traité!...

Mais

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