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Tirée de l'idée que nous avons de l'Etre infini.

CHAPITRE PREMIER. Que l'idée de Dieu prouve en plufieurs manieres fon Existence actuelle.

la

L me femble que feule maniere d'éviter toute erreur,eft de douter fans exception de toutes les chofes dans lesquelles je ne trouverai pas une pleine évidence. Je me défie donc de

tous mes préjugez; la clarté Doute ge- avec laquelle j'ai crû jufques-ici neral pour voir diverses chofes, n'eft point n'admettre une raifon de les fuppofer vraïes. que ce qui Je me défie de tout ce qu'on apeft certain. pelle impreffion des fens; prin

parvenir à

raifon de

cipes accoûtumez, vrai-femblances, je ne veux rien croire s'il n'y a rien qui foit parfaitement certain je veux que ce foit la feule évidence & l'entiere certitude des chofes qui me force à y acquiefcer, faute dequoi je les laifferai au nombre des douteuses.

Sommeil ; Cette regle pofée, je ne comdouter. pte plus fur aucun des Etres que j'ai cru jufques-ici appercevoir autour de moi. Peut-être ne font-ils que des illufions. J'ai toû jours reconnu qu'il y a un temps toutes les nuits où je crois voir ce que je ne vois point, & où je crois toucher ce que je ne tou

che pas; j'ai appellé ce tems le tems du fommeil: mais qui m'a dit que je ne fuis pas toujours endormi, & que toutes mes perceptions ne font pas des fonges?

ter.

Si le fommeil dans un certain Folie; raidegré peut caufer une illufion, fon de douque la veille fait découvrir, qui est-ce qui me répondra que la veille elle-même n'eft pas un autre espece de fommeil dans un autre degré, d'où je ne fors jamais, & dont aucun autre état ne me peut découvrir l'illufion? Quelle difference fuppofe-t-on entre un homme qui dort, & un homme que la fièvre met dans le délire ? Celui qui dort ne rêve que pendant quelques heures, enfuite il s'éveille, & le réveil lui montre la fauffeté de ses songes: celui qui eft en délire, fait des efpeces de fonges pendant Dd iiij

plufieurs jours; la guerison est pour lui ce que le réveil eft pour 'autre, il n'apperçoit les erreurs qu'après la fin de fa maladie. Voilà une illufion plus longue, mais qui a pourtant fes bornes, & qu'on découvre après qu'on n'y eft plus. Il y a d'autres illufions encore plus longues, & qui durent même toute la vie. Un insensé qui eft incurable paffera fa vie à croire voir ce qui n'est point devant fes yeux, jamais il ne s'appercevra de fon illusion c'est un fonge de toute la vie qu'on fait les yeux ouverts & fans être endormi. Comment pourrai-je m'affurer que je ne fuis point dans ce cas? Celui qui y eft ne croit pas y être, il se croit auffi fûr que moi de n'y être pas. Je ne crois pas plus fermement que lui voir, ce qu'il me femble que je vois que je vois, mais

quoi je n'en fçaurois pourtant douter dans la pratique: il eft vrai; mais cet infenfé dans la pratique ne peut non plus que moi douter de tout ce qu'il s'imagine voir & qu'il ne voit pas. Cette perfuafion inévitable dans la pratique n'eft donc point une preuve. Peut-être n'eft-elle en moi non plus que dans cet infenfé qu'une mifere de ma condition, & un entraînement invincible dans l'erreur. Quoique celui qui fonge ne puiffe s'empêcher de croire ce que fes fonges lui reprefentent, il ne s'enfuit pas que fes fonges foient vrais. Quoiqu'un infenfé ne puiffe s'empêcher de fe croire Roi, & de penfer qu'il voit ce qu'il ne voit point, il ne s'enfuit pas que fa roïauté & tous les autres objets de fon extravagance foient veritables. Peut-être que dans le moment de ce que j'appelle

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