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ARLEQUIN.

J'entens une voix qui me reffufcite, é Nina, mia cara, te voilà donc enfin?

NINA.

Oui me voilà, me voilà, tiens me vois-tu?

ARLEQUIN.

Oui, je te vois, je crains encore de me tromper, es-tu Nina? Affuurément.

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Je crois que tu as raison, viens donc que je t'embraffe, que je te mange.

NINA.

Bellement donc, point de folie; je fommes dans le village, je ne fommes pas aux champs.

ARLEQUIN.

Dans le village! Eh! qu'importe?
NINA.

Si fait vraiment ça importe, ylia ici

tout plein de contrôleux.

ARLEQUIN.

Mais quand je rions ensemble par bonne amiquié, gnia rien à contrôler, ça ne fait mal à perfonne.

NINA.

C'eft ce qui me femble itou; & fi pourtant on ne trouve pas bon que les filles batifollent avec les garçons, à caufe qu'on dit que l'honneur ne veut pas le permettre.

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Voici une converfation qui doit être curieufe; écoutons.

ARLEQUIN.

L'honneur! l'honneur! l'honneur eft une bête; car puifque j'ai de l'amitié pour toi, la raifon veut, que tu en ayes pour moi; & la raifon eft plus raifonnable que l'honneur.

'Affurément.

NINA

ARLEQUIN.

Je n'entens parler que de ft'honneur; qui eft-il donc, l'honneur? Apprens-le

moi.

NINA,

NINA.

Eh! mais je te le demande à toi

-même?

ARLEQUIN.

Mais tu as plus d'efprit que moi, car tu fais lire & je ne le fais pas moi; c'est à toi à me dire qui eft l'honneur.

NINA.

Je n'en fais pourtant rien; mon pere vient par fois me farmoner fur ft'honneur, n'fait que m'dire que je l'garde, & il ne me dit point ce que c'eft: le moyen de l'garder?

ARLEQUIN.

Il me fouvient que ma grand-mere me difait que l'honneur était une chose plus précieufe que l'or, les diamans, les påffemens de foye; fi cela eft, ce n'eft donc pas à faire à nous autres Payfans, d'avoir d'l'honneur.

ΝΙΝΑ.

Oh! j'nous pafferons bien de fte bra

verie là.

ARLEQUIN.

Et toi, qu'est-ce que tu fais de l'hon

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NINA.

Tout ce que j'en fais, c'eft qu'il faut que ce foit quelque chofe de bien femillant,car ma mere me difait que quand elle était fille, fon honneur lui donnait plus de peine à garder que fes mot tons (1). Oh! je n'ai pas tant d'efprit que ma mere, je le perdrais.

ARLEQUIN.

Je le crois bien; mais ne nous embarraffons point de cela, cara Nina, laiffe-moi prendre feulement un petit baifer fur l'petit bout d'tes doigts. NINA.

Dépêche-toi donc.

ARLEQUIN, mettant fa main fur fa poitrine.

Toc, toc, toc; ouais, il y a là qu'euque chofe que j'nentends pas; quand ta main m'donne un foufflet ou un coup de poing, j'nen fens rien, ça ne me fait point de mal, & quand j'la baise, ça m'donne la fievre.

(1) Sans chien & fans houlette, j'aimerais mieux garder, &c.

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Oiii, je fens une certaine chaleur, un feu qui s'promene dans ma poitrine, puis j'ai des envies comme un malade; quand j'baife ta main droite j'ai envie d'baifer l'autre, & puis il me prend encore je n'fais combien d'envies.

Ν Ι Ν Α.

Eh bien! tiens, queufi qu'eumi; quand tu m'prens la main je fens itou que ça m'fait trimouffer le cœur, & pis m'eft avis que tout le corps me fourmille, tantia que ça me rend toute je ne fais comment.

ARLEQUIN.

Cte maladie eft bouffonne?

NINA.

Oui, elle eft drôle; mais je crois que c'eft toi qui me l'as donnée, car je ne fens point cela avec les autres; gnia qu'avec toi que ça me prend.

ARLEQUIN.

Mais, cara Nina, je te demande par

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