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infernaux, & la menace de faire mou rir Arlequin à fes yeux.

SILVIA.

Ah! Madame la Fée! vous n'avez qu'à le faire venir, je m'en vais lui dire que je le hais, & je vous promets de ne point pleurer du tout, je l'aime trop pour cela.

La FÉ E.

Si vous ne paraiffez tranquille, fi vous verfez une feule larme, il eft per du & vous auffi: (elle fort).

SILVIA, feule..

Achevons vîte de pleurer, afin que mon Amant ne croye pas que je l'aime.... Ah! maudite Fée ( dès qu'elle voit Ar-lequin, elle s'effuie bien vîte les yeux).. ARLEQUIN.

Mon amie... regarde moi.

SILVIA, d'un air libre.

Hé bien... A quoi fert tout cela On m'a fait venir pour vous parler, j'ai hâte; qu'est ce que vous voulez?

ARLEQIN, tendrement.

Eft-ce vrai que vous m'avez trompé?

SILVIA

Oùi, tout ce que j'ai fait, ce n'était que pour me donner du plaifir.

ARLEQUIN.

Mon amie, dites franchement, cette coquine de Fée n'eft point ici, car elle en a juré? Allez, vous êtes la femme d'un vilain Berger ?

SILVIA.

Oui, encore une fois, tout celâ eft

vrai.

(Arlequin pleure de toute fa force.)

SILVIA, à part..

Le courage me manque.

Arlequin fouille dans fes poches fans rien dire, il en tire un petit couteau, qu'il éguife fur fa manche & découvre fon eftomach.

SILVIA, effrayée.

Ah! il va fe tuer! arrêtez-vous, mon Amant, j'ai été obligé de vous dire des : menteries, (puis en parlant à la Fée qu'elle croit à côté d'elle), Madame la Fée, pardonnez-moi, vous voyez-bien ce.qui en eft,

}

ARLEQUIN, refferrant vite fon

couteau.

Ah quel plaifir! je m'évanouis d'aife.. Trivelin paraît tout à coup à leurs yeux, & Silvia s'écrie dans fa furprise,. Ah! voilà la Fée.

Trivelin leur apprend qu'il n'eft pas la Fée, mais qu'elle lui avait donné fon anneau afin de les écouter fans être vu; il les affure qu'il a été touché de leur amour & qu'il les aidera de tout fon. pouvoir à tromper la Fée, d'autant plus: volontiers qu'elle trompe elle-même l'enchanteur Merlin, à qui il eft attaché. Il confeille enfuite à Arlequin deparaître mécontent en quittant Silvia,. qui de fon côté feindra de le railler & de le quitter avec plaifir; Arlequin pa raîtra fe confoler facilement de fon infidélité, & en feignant de jouer avec la Fée, il lui prendra fa baguette dont il la touchera; alors elle n'aura plus de pouvoir fur eux. Arlequin exécute de point en point tout ce que Trivelin lui a recommandé, il dit des injures à Silvia, il careffe la Fée, il lui dérobe fa baguette avec beaucoup de fineffe, it la touche, elle tombe fur un fiege de gafon en s'écriant, je fuis trabie,je fuis

perdue. Arlequin fe moque d'elle, faute, danfe, & donne la baguette à Silvia, parce qu'il veut qu'elle foit auffi la maîtreffe à fon tour; Silvia prend la baguette & tous les efprits accourent à fes ordres, elle en a peur, & Arlequin les rofle d'importance. Ils vont ensuite faire quelques reproches à la Fée, mais Silvia dont l'ame eft bonne & généreufe, prie Arlequin de ne la plus tour

menter,

ARLEQUIN.

Je lui pardonne, mais je veux qu'on chante & qu'on danse; nous irons après nous faire Roi quelque part, & je donnerai à Trivelin, plein fon chapeau de liards pour le remercier de nous avoir fi bien fervi.

"Cette Piece eft la premiere que M. de Marivaux ait donnée au théâtre Italien. On admira la vérité des caracteres & la fineffe du dialogue dans lequel il a toujours excellé. Elle réuffit beaucoup, & a toujours été revue avec le même plaifir.

Pendant les vacances de Pâques, les Comédiens firent changer la toile qu'ils avaient fait mettre lors de leur rétablis

fement en 1716. Elle repréfentait un Phénix fur un Bucher, avec ces mots pour devife: Je renais. Ils firent remettre fur celle qui la remplaçait, la Mufe Thalie, couronnée d'une guirlande de lierre, tenant un mafque à la main. Cette figure de grandeur naturelle était accompagnée de quatre Médaillons, repréfentant Ariftophane, Eupolis, Cratinus & Plaute. On voyait au haut de la toile un Soleil, & ces deux vers au bas. Qui quærit alia his,

Malum videtur quærere.

Cette devife ayant déplu à certains Critiques, on la changea & l'on mit à fa place, celle qui y eft reftée depuis jufqu'à la reconstruction du Théâtre en 1760, & qui eft tirée d'un vers d'Ho

race.

Sublato jure nocendi.

La nuit du 6 au 7 d'Août, les Comédiens Italiens donnerent un Bal gratis, pour contribuer par quelqu'endroit à l'allegreffe publique caufée par le rétablissement de la fanté du Roi; ils avoient deux jours auparavant donné dans la même intention, fur le théâtre du Palais Royal, une Piece nouvelle en

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