mande Octave: oh, répond Arlequin, ils font à l'écurie, où ils mangent leur avoine. Octave parait fatisfait de ces répon fes, & demande à Arlequin s'il veut lui faire un portrait: fouhaitez-vous, dit Arlequin, qu'il foit vêtu de brocard ou de fimple étoffe de foie; car, ajoutet-il, cela fait une grande différence pour le prix; & je vous avertis que je ne fuis pas un Peintre à bon marché, parce que je prends la peine de commencer par faire les os, les veines & les cartilages, & enfuite j'ajoute la chair'; il faut encore que vous expliquiez fi vous voulez que le portrait foit à l'huile ou en détrempe, en vers ou en profe; car il eft bon que vous fachiez que dans mon art, je ne le cede pas à Galien, &c. IL MEDICO VOLANTE, Le Médecin Volant, Comédie en trois actes (1). Arlequin entre d'un air fort empreffé; il eft chargé d'une lettre d'Eularia pour Octave fon amant; ce dernier lui demande où eft cette lettre; Arlequin fait le lazi de la chercher par tout fon habillement; enfin, il la trouve attachée à fa ceinture derriere fon dos; il la préfente à Octave, à qui il la fait baifer, en lui difant qu'elle fort de chez le parfumeur. Octave & Cinthio lui propofent de jouer le perfonnage de Médecin; il refufe d'abord, confent après & quitte le théâtre avec toute la gravité de son nouvel état. Lorfqu'Arlequin reparaît en habit de Médecin, il est suivi d'Octave, qui paffe pour un de fes éleves; il dit en (1) A été reprise fouvent au nouveau Théâtre, fous le titre Arlequin, Médecin Volant. árrivant : au moins, que mes malades ne s'avifent pas de mourir avant je leur aye rendu vifite. que Pantalon paraît; il fait d'abord des lazis d'épouvante, & dit enfuite à Pantalon, en fe raffurant : Monfieur, vous ávez fans doute entendu parler de ma capacité Pantalon demande quelle eft fa profeffion; Octave prend la parole & répond, que c'eft le plus habile & le plus employé Médecin qui foit à dix lieues à la ronde. PANTALON. Monfieur, ma fille eft malade; je me flatte que vous la guérirez? ARLEQUIN. Sans doute. Avez-vous jamais fu cer aphorifme d'Hypocrate, qui dit : gutta cavat lapidem. L'eau qui tombe goutte à goutte, Je tomberai goutte à goutte fur vo (1) Ce font deux vers de l'Opéra d'Arys, qui étaient fort en vogue alors. tre fille, & par le moyen de ce reméde anodin, je lui procurerai une guérifor certaine. PANTALON. Oh, Monfieur, cela n'opérera pas ♣ je crois, que ma fille eft opilata.. ARLEQUIN. Ou Pilate ou Caïphe, je la guérirai vous dis-je. (Il tâte le poux de Pantalon.) Mais, Monfieur, vous me parai fez être fort mal. PANTALON. Vous vous trompez, M. le Médecin ; c'eft ma fille qui eft malade, & non pas moi. ARLEQUIN N'avez-vous jamais lu la loi Scotia, fur la puiffance paternelle, qui dit : tel eft le pere, tels font les enfans. Votre fille n'eft-elle pas votre chair & votre fang? PANTALON. Oui, Monfieur. ARLEQUIN. Hé bien, le fang de votre fille étant échauffé, altéré, le vôtre le doit être auffi, PANTALON. Le raisonnement est spécieux ; mais... ARLEQUIN. Seigneur Pantalon, votre fille eftelle légitime ou bâtarde...... ( à Eularia qui entre.) Je baise les fruits de cette belle rofe: comment vous appellez-vous ? Eularia. EULARIA. ARLEQUIN à Octave. Mon éleve, allez dans mon cabi net. |