Des Animaux divers. J'ai même traversé les mers. (C'est ainfi qu'il nommoit l'eau de quelque goutiére) Malheur à qui ne fort jamais de fa taniére. Tu devrois m'imiter, & demeurer fous terre, Aux tiens livre fouvent la guerre. Adieu: j'entens du bruit: Je rentre dans mon trou. Elle fit prudemment. C'étoit un gros Matou, Qui, s'étant mis en embuscade, Prit le Voïageur fanfaron. Le Pauvret ne put fuir les grifes du Larron Le commerce du monde eft toujours dangereux; Et qui vit ignoré n'eft pas le moins heureux. L'ASNE ET LE LE'ZARD. FABLE I X. SE foumettre à fon fort eft fans doute le mieux. Dans des états divers le Ciel nous a fait naître. Des Animaux l'Homme eft le Maître. Il obéït aux Rois, qui font foumis aux Dieux. Le Sage s'acommode aux Loix de la Nature, Et n'imite pas le murmure De l'Ane, dont mes Vers font ici le tableau. Pourquoi, s'écrioit-il, ne fuis-je pas oiseau? En un inftant, plus léger qu'un faucon. Plus de bât, & fur-tout plus de coups de bâton. Du matin jufqu'au foir je n'aurois rien à faire : Quelle félicité ! Perché fur un ormeau, Mon chant feroit le plaifir du hameau ; Au lieu qu'on fe met en colére Le plus fouvent; lorsque l'on m'entend braire. Des Oiseaux ce Baudet ignoroit la misére, Et regardoit leur fort du côté le plus beau: Telle est des Envieux la méprife ordinaire. Quand tout à coup du haut des cieux Un Aigle, ateint d'un trait, tombe mort à ses yeux. Oh oh! qu'est-ce que je propose, Dit nôtre Ane furpris? Suis-je bien avisé Ne regarde point sur ta tête, Mais à tes piez, & voi quel eft mon fort. L'Ane, le regardant, convint qu'il avoit tort, Si parmi nous les rangs font inégaux, Plus ils font élevez, & moins ils font tranquiles: Mais fi nous envions le deftin des oiseaux, Confolons-nous, en voïant les reptiles. LE VIEUX C O Q ET LA POULE. FABLE X. Près d'une Poule un vieux Coq gris Nuit & jour faifoit sentinelle. Il en étoit fi fort épris, Qu'il ne pouvoit foufrir que l'on aprochât d'elle. Il redoutoit l'enlèvement. Le chant de fon voifin lui donnoit de l'ombrage. Ce Coq étant de ce tempérament, Sa jeune Poule étoit dans l'esclavage, Et n'eût pas même ofé regarder un Chapon. Lorsqu'il paffoit un Papillon, Nôtre Jaloux hériffoit fon plumage. Fatiguée à la fin de vivre fous fes loix, Elle lui dit : Voici tantôt fix mois Que vous n'avez dormi. Soufrez que ma tendresse A vôtre fanté s'interrelse. Me foupçonneriez-vous d'une infidélité ? Quitez un tel penfer: Fermez l'œil fans fcrupule, Si l'Amour eft jaloux, il n'est pas moins crédule. Nôtre vieux Coq s'endort avec fécurité. La Poule alors gagne la porte, Mon Voifin eft coquet, dit-elle, mais n'importe : LES DEUX ENFANS. FABLE X I. UN N jour Perrinet & Colin, Deux enfans de même âge, entrez dans un jardin, S'égaïoient à la promenade, Et fous des marronniers faifoient mainte gambade; Quand ils virent fur le gazon Un fruit piquant, comme un chardon. Colin le ramaffa: Son petit Camarade Se mit à le railler. Tu tiens, dit-il, un mets Des plus friands pour Meffieurs les Baudets. Aimes-tu les chardons: C'en eft un: car il pique; Et l'on va t'apeler Bourique. Pour moi, je voi des pommes d'or: Voilà mon fait : j'y cours; & la main me demange. Perrinet, à ces mots, fe faifit d'une orange, |