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même les objets qui semblent lui être le plus étrangers.

Dans le centre éclatant de ces orbes immenses,

Qui n'ont pu nous cacher leur marche et leurs distances,
Luit cet astre du jour, par Dieu même allumé,

Qui tourne autour de soi sur son axe enflammé :
De lui partent sans fin des torrens de lumiere;
Il donne, en se montrant, la vie à la matiere,
Et dispense les jours, les saisons et les ans,
A des mondes divers autour de lui flottans.
Ces astres asservis à la loi qui les presse,
S'attirent dans leur course, et s'évitent sans cesse,
Et servant l'un à l'autre et de regle et d'appui,
Se prêtent les clartés qu'ils reçoivent de lui.
Au-delà de leurs cours, et loin dans cet espace,
Où la matiere nage, et que Dieu seul embrasse,
Sont des soleils sans nombre et des mondes sans fin:
Dans cet abîme immense il leur ouvre un chemin.
Par-delà tous ces cieux le Dieu des cieux réside.

dans

Entendez-vous le chant du poëte? n'est-il pas les cieux ? n'y êtes-vous pas avec lui ? sont-ce là des beautés assez originales? où en était le modele? qui lui a servi de guide quand il prenait ce sublime essor? Son génie, le génie de la poésie, dont l'œil sait tout voir, dont le pinceau peut tout rendre, dont la voix peut tout chanter. Et des barbares oseront comparer, préférer même !.... Je m'arrête. Ne passons pas de l'admiration à la colere : il Y

aurait trop à perdre. J'en dirai davantage lorsque, dans le dix-huitieme siecle, nous retrouverons, marchant d'un pas plus ferme sur les traces de Voltaire, la Muse de l'épopée, qui n'a fait que s'égarer dans le précédent. Il est tems de suivre, au point où nous en sommes, une Muse plus heureuse, celle de la tragédie qu'alors le grand Corneille placait avec lui sur le même trône.

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CHAPITRE II.

Du théâtre français et de P. Corneille.

SECTION PREMIERE.

Poëtes tragiques avant Corneille.

MoN dessein n'est pas de faire l'histoire de ce qu'on appelle les premiers âges du théâtre français. On ne doit pas même donner ce nom aux tréteaux des Confreres de la passion, des Enfans sans souci et des Clercs de la Bazoche. Une partie de ces farces intitulées Mysteres, publiées dans les premiers tems où l'imprimerie fut connue, se conserve encore dans les bibliotheques des curieux, qui mettent un grand prix aux livres qu'on ne lit point. On en trouve des extraits multipliés dans cette foule de compilateurs qui se copient les uns les autres, et dont les recherches historiques sur notre théâtre se reproduisent tous les jours dans ces recueils où l'on a tout mis, excepté de l'esprit et du goût. La seule nomenclature des auteurs de Mysteres et de Moralités (ce sont les titres de nos anciennes pieces) est presqu'aussi nombreuse que

celle de nos poëtes dramatiques depuis Corneille. Je remarquerai seulement qu'il n'est pas étonnant que nos livres saints aient fourni la matiere de toutes ces productions informes: c'étaient les objets les plus familiers au peuple qui ne lisait point; et dans un tems où les connaissances étaient aussi rares que les livres, la multitude aimait à retrouver au spectacle les mêmes sujets qui l'édifiaient à l'église. Les croisades, qui avaient transporté l'Europe en Asie, ajoutaient encore à cet esprit religieux, échauffé par la vue des lieux saints qui avaient été le théâtre des souffrances d'un Dieu sauveur, ou par les récits qu'en faisaient ceux que le zele y avait conduits; et cette espece de ferveur subsistait encore long-tems après ces expéditions lointaines, dans des siecles où la religion, bien ou mal appliquée, était le ressort le plus universel qui pût mouvoir les peuples.

Le diable jouait ordinairement un grand rôle dans ces représentations grotesquement mystiques, tel qu'il le joue encore dans les autos sacramentales ou actes sacramentaux du théâtre espagnol. Il n'est que trop facile de s'égayer sur ces productions des tems d'ignorance et de grossiéreté; mais il ne faut en ce genre employer le ridicule qu'au profit de l'instruction, et nous n'avons rien à gagner ici à nous moquer de nos peres. Les

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auteurs pouvaient-ils en savoir davantage, quand les spectateurs ne savaient pas lire ?

Si nous leur reprochons de n'avoir pas deviné ce qu'ils ne pouvaient pas savoir, ne seraient-ils pas plus fondés à nous reprocher de corrompre tous les jours ce qu'on nous a si bien appris?

Je ne vous arrêterai pas plus long-tems sur cette premiere enfance de l'art, bien différente de celle de l'homme autant celle-ci est aimable et intéressante dans sa faiblesse, autant l'autre est insipide et dégoûtante. C'est vers le commencement du seizieme siecle, que nous avons essayé de marcher avec des lisieres. Les premiers pas ont été bien faibles: ils se sont un peu affermis depuis Jodelle. Je ne les suivrai qu'un moment, et autant qu'il le faudra pour mieux faire sentir la force de celui qui le premier alla si loin dans une carriere que ses devanciers n'avaient guere fait qu'entrevoir, à peu près comme ces deux conducteurs d'Israël, qui découvrirent de loin la terre promise sans qu'il leur fût permis d'y entrer.

Avant Jodelle, on avait imprimé des traductions en vers de quelques tragédies grecques, et ces essais montraient du moins que les modeles commençaient à être connus. Lazare Baïf avait traduit l'Électre de Sophocle et l'Hécube d'Euripide: un' auteur qui n'est connu que des bibliographes, Sy→

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