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femble. Les premiers iront contre mon intention, s'ils cherchent ici de l'utilité; & les feconds, s'ils n'y cherchent que de l'agré

ment.

de

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Je ne m'amuferai point à dire que j'ai choif dans toute la Philofophie la matiére la plus capable de piquer la curiofité. Il femble que rien ne devroit nous intéreffer davantage, que de fçavoir comment eft fait ce Monque nous habitons, s'il y a d'autres Mondes femblables, & qui foient habitez auffis mais après tout, s'inquiéte de tout cela qui vent. Ceux qui ont des pensées a perdre, les peuvent perdre fur ces fortes de fujets; mais tout le monde n'eft pas en état de faire cette dépenfe inutile.

f'ai mis dans ces Entretiens une Femme que l'on inftruit, & qui n'a jamais oui parler de ces chofes-la. J'ai crû que cette fiction me ferviroit & à rendre l'Ouvrage plus fufceptible d'agrément, & à encourager les Dames par l'exemple d'une Femme, qui ne fortant jamais des bornes d'une perfonne qui n'a nulle teinture de Science, ne laiffe pas d'entendre ce qu'on lui dit, & de ranger dans fa tête fans confufion les Tourbillons & les Mondes. Pourquoi y auroit-il des Femmes qui cedaffent à cette Marquife imaginaire, qui ne conçoit que ce qu'elle ne peut se dispenfer de concevoir ?

Ala vérité elle s'applique un peu, mais qu'est-ce ici que s'appliquer? Ce n'est pas pe-· netrer à force de méditation une chofe obfcure d'elle-même, ou expliquée obscurément, c'est feulement ne point. lire fans fe représenter nettement ce qu'on lit. Je ne demande aux Dames pour tout ce Siftème de Philofophie, que la même application qu'il faut donner a la Princeffe de Cléves, fi on veut en fuivre bien l'intrigue, & en connoître toute La beauté. Il est vrai que les Idées de ce Livre-ci font moins familiéres à la plupart des Femmes que celles de la Princeffe de Cléves, mais elles n'en font pas plus obfcures,

je fuis feur qu'à une feconde lecture tout au plus, il ne leur en fera rien échapé.

Comme je n'ai pas prétendu faire un Sisteme en l'air; & qui n'eût aucun fondement, j'ai employé de vrais raisonnemens de Phyfi que, & j'en ai employé autant qu'il a été néceffaire. Mail il fe trouve heureusement dans ce fujet que les Idées de Physique y font riantes d'elles-mêmes, & que dans le même temps qu'elles contentent la raison, elles donnent a l'imagination un spectacle qui lui plaît autant que s'il étoit fait exprès pour elle.

Quand j'ai trouvé quelques morceaux qui n'étoient pas tout-à-fait de cette espèce, je leur ai donné des ornemens étrangers. Virgile en aufé ainfi dans fes Georgiques, où il

fauve le fond de fa matiére, qui est tout-àfait féche, par des digreffions frequentes, &fouvent fort agréables. Ovide même en. a fait autant dans l'Art d'aimer, quoique le fond de fa matiére fût infiniment plus agréable que tout ce qu'il y pouvoit mêler. Apparemment il a cru qu'il étoit ennuyeux de par ler toujours d'une même chofe, fût-ce de. préceptes de galanterie. Pour moi qui avois plus de befoin que lui du fecours des digreffions, je ne m'en fuis pourtant fervi qu'avec affez de menagement. Je les ai autorifees la liberté naturelle de la Conversation; je ne les ai placées que dans des endroits où j'ai cru qu'on feroit bien-aife de les trouver; j'en ai mis la plus grande partie dans les commancemens de l'Ouvrage, parce qu'alors l'ef prit n'est pas encore affez accoûtumé aux Idées principales que je lui offre ; Enfin je les ai prifes dans mon fujet même, ou assez proche de mon fujet.

par

Je n'ai rien voulu imaginer fur les Habitans des Mondes, qui fut entiérement impoffible & chimérique. Fai taché de dire 1out ce qu'on en pouvoit penfer raisonnablement, & les Vifions même que j'ai ajoûtées à cela, ont quelque fondement réel. Le vrai

le faux font mélez ici, mais ils y font toujours aifez à diftinguer. Je n'entreprens point de juftifier un compofé fi bizarre, c'eft-la le

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point

point le plus important de cet Ouvrage, & c'eft cela justement dont je ne puis rendre raison.

Ilne me refte plus dans cette Préface qu'à parler à une forte de perfonnes, mais ce feront peut-être les plus difficiles à contenter, non que l'on n'ait à leur donner de fort bonnes raifons, mais parce qu'ils ont le privilége de ne fe payer pas, s'ils ne veulent, de toutes les raifons qui font bonnes. Ce font les Gens fcrupuleux, qui pourront s'imaginer qu'il y a du danger par rapport à la Religion, a mettre des Habitans ailleurs que fur la Terre. Je respecte jufqu'aux délicateffes exceffives que Fon a fur le fait de la Religion, & celle-là même je l'aurois respectée au point de ne la vouloir pas choquer dans cet Ouvrage, fi elle étoit contraire à mon fentiment mais ce qui va peut-être vous paroître furprenant, elle ne regarde pas feulement ce Siftême, où je remplis d'Habitans une infinité de Mondes. Il ne faut que demêler une petite erreur d'imagination. Quand on vous dit que la Lune eft habitée, vous vous y repréfentez auffi-tôt des Hommes faits comme nous, & puis; fi vous êtes un peu Theologien, vous voila plein de difficultez. La pofterité d'Adam n'a pas pu s'étendre jufques dans la Lune, ni envoyer des Colonies en ce Pays-la. Les Hommes qui font dans

la

la Lune ne font donc pas Fils d'Adam. Or il feroit embaraffant dans la Theologie, qu'il " eût des Hommes qui ne defcendiffent pas de Luy. Il n'eft pas befoin d'en dire davantage, toutes les difficultez imaginables fe reduifent à cela, & les termes qu'il faudroit emploïer dans une plus longue explication font trop dignes de refpect pour être mis dans un Livre auffi peu grave que celui-ci. L'objection roule donc toute entiére fur les Hommes de la Lune, mais de font ceux qui la font, qui mettent des hommes dans la Lune ; moi, je n'y en mets point. Py mets des Habitans qui ne font point du tout des Hommes, Que font-ils donc ? Je ne les ai point vûs ce n'eft pas pour les avoir vûs que j'en parle. Et ne foupçonnez pas que ce foit une defaite dont je me ferve pour éluder votre objection

que de dire qu'il n'y a point d'Hommes dans la Lune, vous verrez qu'il eft impoffible qu'il y en ait felon l'idée que j'ai de la diverfité infinie que la Nature doit avoir mife dans fes Ouvrages. Cette idée régne dans tout le Livre, & elle ne peut être contestée d'aucun Philofophe. Ainfi je crois que je n'entendrai faire cette objection qu'à ceux qui parleront de ces Entretiens fans les avoir lus. Mais eft-ce un fujet de me raffurer? Non, c'en est un au contraire très-legitime de craindre que l'objection ne me foit faite de bien des endroits.

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