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pour s'en fervir. C'est ainfi qu'il a en couragé le mauvais goût.

Si l'on confidère Voltaire comme Philofophe; eh! qui l'eft moins que lui? Tous fes écrits font pleins de variations & d'incertitude, de vérités & d'erreurs, de vues fages & d'idées folles, de maximes honnêtes & de traits indécens, de peintures délicates & d'images groffières. Tantôt il vous éclaire, & tantôt il vous. plonge dans les ténèbres. On diroit qu'il a un bon & un mauvais génie qui con-duifent fa plume. Le vrai Philofophe a des principes fondés fur la vérité : il ne varie jamais: Voltaire n'a que des idées fans fuite & fans fyftême; il s'abandonne à l'impulfion de fon efprit inconftant & volage. Le Philofophe puise dans fes réflexions une tranquillité d'ame, une égalité d'efprit, un amour pour le bien, un zèle pour la vérité, une conduite pleine de fageffe & de prudence, que rien ne peut troubler, altérer, ni démentir Voltaire jouiffoit-il de ces

:

heureuses difpofitions d'ame, d'efprit & de fentimens ? Il a été l'Oracle du Philo fophifme & non de la Philofophie. Ses Compagnons d'armes l'ont déclaré leur Chef, & il méritoit de l'être; car fans lui qu'étoient-ils ? Que font-ils depuis qu'il n'eft plus? C'étoit lui qui faifoit la guerre pour eux, non qu'il eût le courage de fe montrer à découvert (1), mais en fe traveftiffant fans ceffe, tan

(1) Jamais auteur n'a été plus hardi, & en mêmetemps n'a montré plus de pufillanimité. Il n'avoit acheté la Terre de Ferney, que parce que, craignant: toujours d'être arrêté, il pouvoit dans la minute fortire du Royaume, & fuir chez l'Étranger par la porte de fon jardin. Son nom de guerre, parmi les Philofophes, étoit Raton; celui de fes Lieutenans, Bertrand. Ces. noms ne font pas auffi nobles que ceux de Solon, d'Anaxagore, de Platon & de Socrate; mais en fe rappelantr la fable de la Fontaine, ils défignent affez bien les fonctions particulières de chacun. Les Philosophes avoientils besoin d'un pamflet, bien assaisonné, bien groffier, hien cynique, contre quelque Défenseur de la Religion, ou quelqu'ennemi de la Philosophie nouvelle? Ils engageoient leur Général à le faire, & le pamflet paroifsoit, Il leur difoit pourtant quelquefois: Mes chers Berirands, vous me faites fi fouvent tirer les marons du feu, qu'à le

/tôt fous le nom de Jérôme Carré, de Guillaume Vadé; tantôt fous celui de L'Abbé Bazin; & tantôt s'affublant de la Robe du Révérend Père Lefcarbotier, Ca-pucin indigne, Prédicateur & Cuifinier du grand Couvent. Un pareil tabarinage con-vient-il à un Auteur raisonnable & fenfé? Un Philofophe peut-il fe déshonorer s'avilir jufqu'à jouer le rôle d'un vil Farceur de la foire! N'est-ce pas auffi refpecter trop peu le Lecteur, que de croire qu'il s'amufera de tant de fadaises, qui n'ont d'autre mérite que l'effronterie, l'impudence, la mauvaise foi, & le rire de la malignité?

Détournons les yeux d'une foule d'autres ouvrages, funeftes productions des ténèbres & de l'impiété, condamnées à un éternel oubli. Croit-on que la Postérité foit plus indulgente à l'égard de ces diatribes amères, de fes fatires pleines. de fiel & du reffentiment le plus injufte? Indépendamment des injures, inconnues même aux Halles, dont il acca

ble fes prétendus ennemis, que de menfonges il accumule pour les rendre odieux (1) ou méprisables! Gonflé d'amour-propre & d'orgueil, la plus légère critique allume fa bile, & plus la critique eft fondée, plus il exhale fon courroux & perd la raison.

(1) Un exemple, entre mille, fuffit. Le favant M. Larcher, de l'Académie des Infcriptions & BellesLettres, fait une critique accablante de la Philosophie de l'Hiftoire, par M. l'Abbé Bazin, démontre l'ignorance groffière, relève & prouve par les autorités les plus pofitives, les bévues de M. l'Abbé, avec toute la force de la vérité & toute l'honnêteté d'un galant homme, qui connoît & pratique les égards que l'on fe doit mutuellement. Le Neveu de l'Abbé Bazin prend la défense: de fon Oncle, en furieux, & vomit contre M. Larcher les calomnies les plus atroces, les injures les plus grof fières, les plus inouies, le moins fufceptibles du grand jour de l'impreffion. Si les outrages d'un homme en délire pouvoient faire la moindre fenfation contre M.. Larcher, qui voudroit fe lier d'amitié avec ce modefte & refpectable Académicien, digne par sa naissance, par fes mœurs & par fon profond favoir, de la confidération & de l'eftime dont il jouit généralement dans le monde, & dans l'illuftre & favante Compagnie dont i eft Membre ? Ces injures viennent d'être répétées

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Que l'efprit humain doit être humilié, en voyant un homme auffi spirituel s'abandonner à de pareils excès, & fe dégrader aux yeux de ceux mêmes qui lui ont érigé des ftatues! On peut peindre Voltaire, comme Paterculus a peint Marius, infatiable (1) de gloire, violent dans fes défirs & dévoré d'une ambition inquiéte & jaloufe. Il pouvoit être ce qu'il auroit voulu, fi l'ambition d'être tout ne l'eût pas aveuglé. Quel Poëte auroit mieux mérité des Mufes? Quel Auteur eût mieux écrit en profe? Rival de Corneille & de Racine, il les eût peut-être égalés dans la Tragédie, s'il n'avoit voulu exercer que leur Art ? Jamais Hiftorien n'eût traité auffi agréablement l'Histoire, s'il eût choifi de préférence ce genre de travail,

& que

la

complettes de VOLTAIRE. Les Éditeurs, qui connoiffent parfaitement M. Larcher, ont oublié de lui rendre la justice que nous lui rendons ici.

(1) Immodicus glorie, insatiabilis, impotens femper que inquietus. RATERCUL. Lib. II, no 11.

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