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accordés qu'avec difcernement: il eut de même obtenu tous ceux de la poftérité, fans les obfcénités & les traits licencieux dont il fouilla trop fouvent la fcène. Enfin les Poëtes comiques fe rendirent fi redoutables, qu'il leur fut défendu, par un Édit, de nommer les perfonnes; & ce fut encore Aristophane qui trouva le fecret de conferver à la Comédie toute fa malignité, en mettant plus de fineffe dans les allufions, & en traçant ingénieufement des portraits dont on devinoit aifément la reffemblance. Tel fut le fecond âge de la Comédie. Il fe paffa plus d'un fiécle avant qu'elle prît une forme nouvelle, & qu'elle devint plus décente & plus digne d'être applaudie des gens vertueux. Ménandre opéra cet heureux changement, & la porta au point de perfection qui la rendit auffi agréable qu'utile & régulière Ce changement au refte prouve combien les Athéniens étoient

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médie étoit tout à la fois politique & fatirique; & comme elle n'avoit rien à redouter de l'autorité qui réfidoit tout entière dans le Peuple, elle attaquoit fans aucun ménagement la conduite des Chefs de la République & celle des Particuliers, en les nommant, ou en les défignant de façon à être reconnus. C'eft principalement dans ce genre, que Cratès, Eupolis, Cratinus, Hermippus brillèrent, & qu'Ariftophane excella. Ils tirèrent la Comédie de l'enfance, où fans eux elle feroit peut-être encore; tandis qu'à la 'même époque, la Tragédie, dès fon premier vol, avoit atteint déja le degré de perfection, qui a fondé à jamais la gloire du Théâtre Grec, & rendu immortels les trois plus grands Poëtes tragiques que la nature ait produits.

Efchyle après avoir fignalé fa valeur dans les mémorables journées de Marathon, de Salamine & de Platée, choifit un autre genre de gloire moins périlleux, plus paifible, auffi brillant peut-être,

pour faire paffer fon nom d'âge en âge,. à la postérité la plus reculée. La Tragédie, jufqu'à lui, informe & fans art, telle que Thefpis la représentoit, n'étoit qu'un mélange groffier de fatire & de bouffonneries; & tantôt un récit férieux d'une action vraie ou feinte, rendu par un feul Acteur, qui ne paroiffoit que lorfque le Choeur ceffoit de parler ou de chanter: mais ce n'étoit encore là qu'une ébauche bien imparfaite de la Tragédie. Efchyle, par l'infpiration de fon génie, ajoutant un fecond Acteur, diminuant le nombre de ceux dont le Choeur étoit formé, inventant l'ufage des mafques, habillant d'une robe traînante (1) fes Héros, auxquels il chauffa le cothurne; enfin conftruifant un Théâtre un peu élevé, jeta les fondemens de la Tragédie d'une manière affez folide, pour

(1) Poft hunc perfonæ pallæque repertor honeftæ
Æfchylus & modicis inftravit pulpita tignis,
Et docuit magnumque loqui, nitique Cothurno.

que les heureux changemens qu'elle fubit par la fuite, n'aient point empêché de lui attribuer la gloire d'en être l'inventeur; & c'eft le fentiment d'Ariftote (1) & de Quintilien (2).

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Mais Eschyle ne conçut l'idée, ne traça le plan n'éleva l'édifice du Théâtre tragique que fur les deffins de I'Iliade. Il fentit d'après cet admirable modèle, que la Tragédie, comme l'Épopée, devoit avoir une action fimple & déterminée, vraie ou vraisemblable, & dont la durée fût également déterminée: qu'il falloit que fa marche fût rapide, & que l'intérêt allât toujours croiffant: qu'elle ne devoit employer que le langage des paffions, & ne produire d'autre effet que la terreur ou la pitié: enfin qu'il étoit néceffaire qu'elle eût un but moral.

(1) Poët. d'Ariftote, Ch. IV, pag. 37, édit. de l'Abbé Batteux.

(2) Tragoedias primus in lucem Æfchylus protulit, — fublimis & gravis & grandiloquus, fæpè ufque ad vitium, fed rudis in plerifque & incompofitus. QUINTIL. Lib. X, Cap. I, pag. 741.

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C'eft ainfi que le génie d'Homère éclaira, féconda le génie du Poëte,' auquel la véritable Tragédie doit fa naiffance.

que

Efchyle avoit déja fourni plus des trois quarts de fa glorieufe carrière, courbé, pour ainfi dire, fous le poids de fes couronnes, lorfqu'un rival redoutable, dans la force encore de l'âge, fe préfenta fur l'arêne, difputa le prix & triompha. C'étoit Sophocle. Guerrier comme Efchyle, Général des armées Athéniennes fous Périclès, non content des lauriers fes actions militaires lui avoient mérités, il voulut y ajouter ceux des jeux fcéniques. Il lui étoit facile de vaincre, l'art n'étant encore qu'ébauché, & fes refforts peu connus. Il s'agiffoit de le perfectionner ; & c'est ce que fit Sophocle, en donnant à la Tragédie plus de régularité, de pompe & de majesté. Fidèle obfervateur des convenances théâtrales, il eft bien fupérieur à Efchyle, foit pour les plans & la con

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