L'inconftant m'abandonne au mépris de fa foi, DAMON. Il vous abandonne, vous ? Rien n'égale fa perfidie. Evitez un deftin pareil; Moi J'ofe vous donner ce confeil, Vous ma rivale, ah! Ciel. LAURE. Je la fuis à regret. Ce nom vous éclaircit de tout ce que j'ai fait Oui, puifqu'il faut que je vous le confeffe, COMEDIE. Je fuis frere de la Comtesse, 99 Qui, pour vous éprouver, m'a fait prendre fon nom. LAURE à part. Douce furprise! ah! quel trait de lumiere! Par un évenement fi doux, Qui me ravit & qui m'éclaire, Je vois juftifier le penchant que pour vous Fixez fur moi vos yeux, ah! vous les détournez, Ma bouche vous l'avoue, & mon front en rougit. DAMON. Pouvez-vous l'être trop ce difcours me ravit. De plaifir mon ame en foupire, Tantôt ici vous m'avez dit Tout ce que je devois vous dire. Nos yeux étoient deçus par l'erreur des hats Mais nos cours étoi nt mieux inftruits; Par le fecret inftinct qui les fçavoit conduire, Sans nous tromper, nous nous fommes mépris. C'est à vous maintenant de faire Ce tendre aveu que vous me demandiez. Il est mieux à sa place, & m'est trop nécessaire, Pour mon bonheur je l'attends à vos pieds. LAURE. Quelle étoit mon erreur fatale ? De mon courroux, vous éteignez l'éclat, J'ai cru punir en vous une rivale, Et c'est vous dont l'amour me vange d'un ingrat. DAMON. Ma fortune m'enchante; il n'eft rien qui l'égale. SCENE IX. LAURE, DAMON, LE COMMANDEUR, LA COMTESSE. LE COMMANDEUR. CIel! que vois-je? une Dame au pied d'un Cavalier? O fiécle! ô tems! ô mœurs! renversement en tier ! DAMON fe relevant avec transport. Ah! mon Oncle! ah! ma Sœur ! prenez part à ma joye. L'E COMMANDEUR. Quoi ? cette belle est mon neveu ? DAMON. Oui, pour ma gloire. LE COMMANDEUR. Il n'eft pas mal, parbleu. Rien n'eft égal au bien que le hazard m'envoye. Mon Oncle, embraffez-moi. LE COMMANDEUR. Mais es-tu fou, Damon ? DAMON. Je le fuis de plaifir, je le fuis de raifon. Vous, ma fœur, raffurez votre ame. De tout ce que j'entens je demeure furpris. DAMON, Oui, la plus accomplie en tout. 1 Jugez, en la voyant, fi je fuis d'un bon goût. LA COMTESSE à Damon. Pourquoi donc, du Marquis, faire le perfonnage DAMON. Pour punir cet Amant volage, De le fixer, vous aurez l'avantage. Je n'ai pas cette vanité; Je renonce à l'Hymen, & m'en tiens au veuvage. Cette avanture eft digne de mon tems ; DAMON. Approuvez donc mon choix fans tarder d'avanta gc. LE COMMANDEUR. Oui, pour la rareté j'y donne mon fuffrage; DAMON. Avec fon mérite à fon âge, Peut-elle manquer de parti ? A Laure & à la Comteffe. Mes Dames, à préfent baifez-vous l'un & l'autre. |