SCENE IX. LAURE, FINETTE. FINETT E. JE fuis feule avec vous. Je puis parler fans fard. En vérité, Mademoiselle, Je ne vous conçois pas, dans vos hardis projets. Je frémis de la fuite, & j'en crains les effets. Moi, j'augure bien du fuccès, Et ce Plumet me donne une audace nouvelle. FINETTE. Moi, fous ce fier bonnet, j'ai prefque le friffon. nom De votre Marquis infidele? Pourquoi, fous ces habits, venir dans la maifor De l'Oncle de votre Rivale; A la veille du jour & de l'heure fatale, Qui doit former leur union? LAURE. Pour leur jouer, Finette, un tour de ma façon. Dans ce déguisement, qui caufe tes allarmes, J'écoûte, de mon cœur, beaucoup moins le dépit Et l'ardeur de venger la gloire de mes charmes, Que l'enjoûment de mon efprit. FINETTE. L'enjoûment ! pouvez-vous employer ce langage Quand le Marquis vous fait le plus fenfible outra ge; Il vous aime, il vous rend un hommage affidu; A vos Parens dont il est bien reçû; Et pour gagner fon Pere, entreprend fon voyage, Puis l'ingrat, tout à coup, fans vous dire pourquoi, Vous quitte pour une autre, & moins belle, je gage. LAURE. que moi, La Comteffe d'Erval a plus de bien Et veut que la plus riche obtienne l'avantage. FINETTE. Moi, j'irois dans fon cœur enfoncer un poignard, Ou, le Sabre à la main, l'attendant au paffage, Je le tû.... LAURE. Pour le coup, tu parles en Houfard. J'en veux avoir raifon d'une façon plus fage. Comme l'amour pour lui me touche foiblement, Il n'entre point dans mon reffentiment Ni defefpoir, ni fureur, ni trifteffe. Je n'en veux point aux jours de món Amant; Je ne viens point percer le cœur de la Comteffe. Non, le mouvement qui me preffe . N'eft qu'un defir malin de m'en venger gayment; Et c'est au Bal d'hier, que j'en dois la pensée. Cette vengeance eft plus fenfée : Je trouve, en l'exerçant, l'art de me réjouir; Et ce matin ici, je viens pour la finir. Mais fongez-vous bien, je vous prie, Peut arriver à chaque inftant 1 Que j'ai conçu dans le moment, Je vous écoute avidement. LAURE. Je préviens, j'avertis tout bas adroitement, Un de leurs Officiers, qui vient à ma rencontre, Que le Marquis vient d'avoir fur le champ, Avec fon Camarade un démêlé fanglant; 3 En même tems du doigt à fes yeux je les montre, Ajoutant que tous deux, d'un coup d'œil mena çant, Se font donné le mot, pour fe battre en fortant. Qu'ils fe levent alors, en fe ferrant la main ; Il marche fur leurs pas; l'Amant dont je me ma que, A la porte fe voit arrêté le premier. L'Officier, fans vouloir l'entendre, Dans leur Hôtel le force de fe rendre, Et jufqu'à nouvel ordre, on l'y tient prisonnier. Le plaifir que j'en ai, ne fçauroit fe comprendre > Et juge, à fes dépens, fi je fçai m'égaïer. FINETT E. Vraiment à fe venger, votre amour n'est pas gau ché, Et le trait est malin autant que fingulier. LAURE. De ceux qui le fuivront, ce n'eft-là qu'une ébauche. Le Bal d'Auteuil fuccéde à celui de Paris. J'y viens fur nouveaux frais, fous les mêmes ha J'y viens rire aux dépens de l'Ingrat qui m'offense; J'y viens goûter le plaifir fans égal, De le doubler en fon absence, Et de remplir fon rôle auprès de la d'Erval; Et le jufte tribut qu'on doit à l'inconftance. D'une vengeance férieuse, L'éclat rejailliroit fur moi plus que fur lui. Que dis-je ? Il en feroit plûtôt enorgueilli ; |