LA COMTESSE. L'apparence vous trompe,& je m'y connois mieux; Il s'eft contrefait à vos yeux; Mais grace à mon heureuse étoile ; Ou plûtôt par l'effet de mon déguisement, Et je n'ai vu dans lui, mon rapport eft fidéle, DAMO N. Non, il est né modefte, & fa pudeur eft telle Il a rougi d'orgueil, d'abbaiffer tous fes charmes, Si pour ce que je fuis il m'avoit reconnue, Et m'auroit imposé par un mérite faux. DAMON. Mérite faux ! LA COMTESSE. Très-faux vous dis-je ; Son caractere, l'eft auffi, Son cœur, fes fentimens; oui, tout eft faux chez lui, Puifqu'à le déclarer, votre discours m'oblige. DAMON. Quelle preuve avez-vous de tant de fauffetés? Quand à vos pieds je l'ai furpris tout, transporté, Vous flattez-vous qu'il foit épris de vos beautés ? Et jugez par ce trait qui révolte fi fort, SCENE VIL DAMON, LA COMTESSE, CRISPIN. CRISPIN. Es Dames, en ces lieux votre oncle eft de MES Il vient pour augmenter l'embarras de mon ame: CRISPIN. Il veut ici vous dire un mot à toutes deux. DAMON. Je fuis & ne veux pas me montrer à ses yeux Dans cet équipage de femme. Il fort avec Crispin. J LE COMMANDEUR. E fuis parti fort gai, je reviens plus joyeux; LA COMTESSE Mon Oncle, il l'eft. LE COMMANDEUR. Tant mieux, comment l'as-tu trouvé ? Charmant, fans doute. LA COMTESSE., Mais LE COMMANDEUR. Fort bien je dois t'entendre. Il t'a paru plus beau que les Amours. Il fuffit, va ton trouble M'en dit plus que tous les difcours. Ce nœud va prolonger le fil de mes vieux jours, Un lien fi parfait que je brûle de voir; Ne preffez rien, Monfieur, & daignez me permet tre... LE COMMANDEUR. Difcours! Je fçai comment je dois l'interpréter. Vous vous trompez, mon Oncle, & la chose mérite... LE COMMANDEUR C'est me dire tout bas que je la précipite. Vous ne daignez pas m'écouter. LE COMMANDEUR. Tu voudrois, je le vois, qu'elle fût déja faite ; Mais elle le fera dans peu ; Le Notaire eft mandé, tu feras fatisfaite; Et pour rendre aujourd'hui la fête plus complette, Je prétens avec toi rendre heureux mon neveu. LA COMTESSE. De fon bonheur je fuis flat tée ; Vous allez donc, Monfieur, le marier auffi Oui, depuis que je t'ai quittée, Je viens de lui trouver un excellent parti; Qu'il a refufé l'autre année ; Qu'il le prendra d'un ton plus radouci Je fçai que fon penchant n'eft pas pour la jeuneffe, A cet égard j'approuve fa fageffe, Et dans fon goût je l'ai fervi : Celle dont il s'agit eft une beauté mûre; Mais fraîche, & d'un éclat qui n'est point effacé: Ah! c'est un port, un Telle qu'on en voyoit dans le air, une figure, fiécle paffé ; Elle joint, à l'efprit, une grande naiffance Et fi j'ofe le dire encor, Une plus diftinguée & plus haute opulence; Pour mon Neveu, c'eft un trésor, LA COMTESSE Peut-on fçavoir qu'elle eft cette rare perfonne? LE COMMANDEUR. C'est, puifqu'il faut te dire enfin fon nom, |