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ES Préfaces que l'on a accoutumé de
Prefaces

mettre à la tête des Poëmes Dramatiques, ne roulent le plus ordinairement, que fur l'éclairciffement du fujet, fur la conduite de l'Auteur dans la confection de fon ouvra ge, fur la réponse aux objections qui fe font. élevées dans le Public contre lui & enfin fur le plus ou le moins de libertés qu'il a prifes.

La Tragedie d'Ofarphis n'a point été jouće, quoique reçue des Comediens, & même avec acclamations & quoiqu'approuvée d'un Cenfeur public. L'Auteur lui-même a refpe&té les confiderations que le miniftere a oppofées à la représentation de fa Piéce. Le refpect des Sujets facrés eft fi grand & fi augufte, qu'il n'eft préfque pas poffible de n'en pas abufer, & j'ai avancé moi-même dans la Préface de Saül, la première de mes Tragedies, Que ceux qui ont traité de facrilege, » la moindre alteration des circonstances tant » foit peu confiderables de l'Ecriture fainte nous ont appris par leur exemple à negli

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»ger quelquefois leurs préceptes.

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Ce n'eft pas que les confiderations d'Etat ne puiffent, fans bleffer la Religion, porter le miniftere public à gliffer un peu fur cela & à fe relâcher de fa premiere feverité à l'égard des fpectacles. Cette conciliation du moins à l'égard des Acteurs, ce qui revient à peu près au même, n'est pas fans exemple dans des conjonctures encore plus délicates. Dans les premiers tems du Chriftianifine, il étoit dé fendu à celles des Comediennes qui s'étoient converties à la foi, de continuer dans l'exercice de leur profeflion.

Des raifons de politique obligerent Honorius & Theodofe de lever cette difficulté, & l'on vit alors au fortir du Baptême réparoître fur la Scene plufieurs Actrices que la fageffe & l'autorité des loix arrachoit des bras même de l'Eglife. Ad proprium Officium fumma inftantia revocari decernimus.

Cette Preface de la Tragedie d'Ofarphis, dès qu'elle n'a point été représentée n'eft point fufceptible de la même forme que celle des autres Prefaces. Je n'ai point à y repondre au Parterre, fur tout à cette partie du Parterre, fur qui le plaifir & l'émotion prévalent quelquefois aux interêts des mœurs: non que le Spectateur prenne le change fur cela autrement que par une illufion momen

tanée, ni que le triomphe d'un Auteur qui fe plait à nous furprendre foit réel & durable: fa Piece dépouillée de la représentation & expofée à une lecture froide & éclairée perd bientôt des avantages qu'elle doit bien moins au genie du Poëte, qu'en general, la corruption du cœur humain.

à

Je me renfermerai donc dans l'éclairciffement du titre de ma Piece, & dans la reponfe à quelques objections particulieres de perfonnes éminemment refpectables & qui en les faifant, n'ont eu pour principe que la délicateffe de leur pieté & des vues d'une décence & d'une édification, qu'il eft moins poffible aux Auteurs de fauver au Théatre, qu'au Miniftere de lui interdire de pareils fujets & d'abattre fi j'ose ainfi parler, ces Au tels que quelques Poëtes éleverent infenfi blement à l'impudicité fous le nom & l'éten dart même de la Religion.

Si je n'ai point donné à ma Piece le nom de Moife, c'est parce que ce nom Hebreu qui veut dire fauvé des eaux eût anticipé fa reconnoiffance & découvert pour ainfi dire le fecret de fa deftinée & que d'ailleurs les Hebreux donnoient à Moïfe avant fa reconnoif fance le nom d'Ofarziph ou d'Ofardiph, que pour rendre plus doux & plus conforme au

Pays, j'ai changé en celui d'Ofarphis.

» On m'objecta d'abord que je me fervois » du nom de Juif, quoiqu'il n'eût été don»né aux Ifraëlites que beaucoup de Siecles

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après. Je n'ignorois pas que ce n'étoit en effet que depuis la captivité, que le mot de Juif étoit devenu le nom général de la nation; mais j'aurois cru pouvoir fuivre l'ufage. St. Paul lui même fous le nom de Juifs & fans aucune diftinction des tems, avoit confondu toutes les Tribus, lorfqu'il avoit dit nos natura Judæi, & non ex gentibus. C'eft dans ce même efprit que Racine fait dire à Joad dans Athalie :

"

N'êtes-vous pas toujours fur la montagne fainte
Où le Pere des Juifs fur fon Fils innocent
Leva fans murmurer fon bras obéiffant ?

Cela ne m'a pas empêché d'ôter le mot de »Juifs, pour y fubftituer celui d'Hebreux » ou d'Ifraëlites: mais on ma reproché que »je mettois ceux-ci dans le nombre des » Troupes qui fervoient les Egyptiens : » ce qui eft entieremeut, dit-on, contre les » mœurs de cette Nation. A quoi je réponds que les Ifraëlites ne font point ici un corps de nation; qu'ils ne doivent être régardés que comme quelques particuliers d'entre les Hebreux, ou comme gens affidés que la pru

dence de Jocabel avoit trouvé moyen de placer auprès de Moïfe, pour plus grande fûreté de fa perfonne. Si le fervice des Troupes des Egyptiens eût fouillé la Religion d'un Hebreu, comment concilier dans la perfonne de Moïfe, le caractere de fa naiffance & le commandement des Armées de Pharaon ? Que devenoit alors la délicatesse & la pieté de Jocabel? & s'il faut s'appuyer d'un grand exemple, Mardochée, c'eft-à-dire celui de tous les Juifs qui étoit le plus attaché aux mœurs de fa Nation, n'étoit-il pas un des principaux Officiers de la garde d'Affuerus?

» D'ailleurs on ne veut pas que Moïfe » ignore fa naissance, son sort & fa Religion, fa mere, dit-on, étoit toûjours auprès de lui, » & peut-on fuppofer qu'elle ne l'en auroit pas inftruit pour le garentir des fauffes erreurs des Egyptiens. Il eft bien dit dans l'Ecriture qu'il étoit inftruit dans la science des Egyptiens; mais non pas qu'il fût imbu de leurs erreurs. La providence qui avoit deftiné la mere de Moïfe pour la nourrice; » ne l'avoit fait qu'afin de lui apprendre de » bonne heure fa Religion. L'Ecriture ne marque nullement à quel âge de Moïse sa mere lui apprit quels étoient fon état & fa famille. C'eft ce filence de l'Ecriture qui m'a

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