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Et j'en attens ici ce qu'exige à la fois
La raison, la nature, & le Trône & les Loix.
Vous, Madame, fuivez le foin qui vous infpire;
Un moment feul ici fouffrez que je refpire.

SCENE VII.

HERODE feul.

M Fils ingrat! Mais bientôt je ne te craindrai plus.

Es foins pour t'appaifer ont été fuperflus,

Mais tout à coup en moi quel mouvement s'éleve?
Quel trouble me faifit? Pere cruel acheve;
Laiffe agir le Confeil. Après ce que tu fis,
Il ne te manquoit plus que d'immoler ton fils.
Contre toi des Enfers arme encor la colere :
Joins fon Ombre fanglante aux Manes de fa mere.
Et des Rois fes ayeux déchirez & meurtris,
Dans la nuit du tombeau réveille encor les cris.
Mais cependant pour lui quelle pitié m'abuse?
Et forme un fentiment que l'ingrat me refuse?
J'ai détourné fon bras tout pret à le venger:
Dans le fang de fon pere il alloit le plonger.
Arrête. Que dis-tu ? fa fureur te condamne!
Ton crime a fait le fien: bourreau de Mariamne!
N'impute qu'à toi feul fon courroux obstiné.
Que dis-je? en plein Sénat par toi-même traîné,
Victime de l'envie & de ton injuftice,

Tes cris ont demandé fa perte, & fon fuplice?
Rome fremit encor de tant de cruautez :
Et même fans égard à la foi des traitez,
Tu fufpens un hymen que fon amour efpere..
A ces traits a-t-il dû reconnoître fon pere?
Qu'attendois-tu d'un fils accablé fous tes coups?
II mourra cependant. Inftruit de ton courroux

Le Confeil contre lui va fuivre fes maximes;
Et même en un befoin lui trouveroit des crimes.
Malheureux ! qu'attens-tu de l'équité des loix?
Regnent-elles toujours dans le confeil des Rois?
Leur fentiment ouvert & le regle & l'entraîne :
Notre volonté feule eft la loi fouveraine:
Victimes d'un pouvoir qui peut tout affervir;
On veut nous fatisfaire, & non pas nous fervir.
Non, tu ne mourras point: j'en jure par ce trouble,
Qu'en mon cœur éperdu chaque moment rédouble:
La nature, entre nous divifée aujourd'hui,
Exige plus de moi qu'elle n'a fait de lui.

Et vous moyens cruels, bien plus que légitimes,
Appuis de la fortune, & fource des grands crimes,
Qui donnez aux forfaits le dehors des vertus,
Dures raifons d'Etat, je ne vous connois plus.
Mais on vient : c'eft Achas.

SCENE III.
HERODE, ACHAS

HERODE.

Que venez-vous m'apprendre?

Parlez, Achas, quel eft le deftin d'Alexandre ?
A CHA S.

Seigneur, dans le Confeil en tumulte affemblé,
Alexandre introduit, fans paroître troublé,
Plus fier même d'un fang que le reproche offenfe;
D'abord a dédaigné le foin de fa défense;
Traité nos Jugemens de crimes, d'attentats;
Irrité la Fortune, & bravé le trépas:
Il plaignoit feulement le fort de la Princeffe.

HERODE.

ele vois. Son orgueil l'accompagne fans ceffe:

Mais qu'a-t-on refolu?

ACHAS.
Quelque temps incertain,,
Le Confeil agité balance fon deftin.
Après un long amas de raifons ordinaires,
De propos conteftez, de maximes contraires,
Soit que d'ailleurs, Seigneur, de légitimes droits
Des Jugemens humains fauvent le fang des Rois,,
Que le Ciel foumet feul à fa Loi fouveraine;
Soit que prefent encor le meurtre de la Reine,
Source de tant de pleurs, fuivi de tant de cris,
Dans le respect alors tienne tous les efprits,
Soit qu'enfin de nos Rois on respecte la cendre,
Tout le Confeil conclut au pardon d'Alexandre..
HERODE.

'Ainfi donc le Confeil pour lui s'intéreffant,
Dans fon crime furpris le retrouve innocent?
Je l'avoue, étonné de ce commun fuffrage,
J'ai cru que fon falut deviendroit mon ouvrage.
ACHAS.

Chacun de nous Seigneur, quelqu'ordre rigou

reux

Qui lui femblât profcrire un Prince malheureux,
A cru voir dans le Roi la.clemence d'un pere.
HERODE.

Non, non, j'ouvre les yeux, & la raison m'éclaire. Mon cœur pour un ingrat trop prompt à fe trou bler,

Par avance pour lui ne devoit point trembler.
J'ignorois pour ce fils l'ardeur. de votre zéle.
Je ne fçai quel penchant favorife un rebelle......
Devois-je me flatter de pouvoir plus für eux,
Qu'un fils, dont l'efperance entraîne tous les vœux?
Que Rome favorife, & que chacun oppose
A ces triftes retours où lâge nous expofe?
C'est peu qu'en fa faveur on viole la loi.....

ACHAS.

Quoi, Seigneur, vous croyez ....
HEROD E.

Perfide, je le voi,

En le juftifiant, c'eft moi que l'on condamne;
C'est mon fang qu'on immole au fils de Mariamne..
D'un projet criminel complices en effet

Ingrats, votre faveur prépara fon forfait..

ACHAS.

Hé voulez-vous, Seigneur, qu'un Arrêt fangui naire......

HERODE..

Je fçai de vos pareils la conduite ordinaire.
D'une infidelle. Cour les vœux intéreffez
Entre Hérode & fon fils ne font plus balancez:
Et fatiguez d'un Roi, dont les deftins s'achevent,'
Vers cet aftre naiffant tous vos regards s'élevent
Indociles au joug qui vous tient abattus,
Votre malignité lui prête des vertus:

Un long regne vous pefe & laffe votre hommage
Et de la tyrannie il a pour vous l'image:

Chacun forme à fon gré fon fort dans l'avenir
Et fous un nouveau regne on croit tout obtenir.
Efpérances fans borne, & toujours indifcretes!
Eh! ne fçavez-vous pas, aveugles que vous êtes,
Qu'un Prince fur le Trône attendu, fouhaité,
N'eft plus en y montant tel qu'il avoit été ?

Que le Trône a fes mœurs? qu'en vain chacun ef pere ?

Qu'en nous l'ingratitude eft souvent neceffaire ?
Que de raifons d'Etat formant toutes nos Loix
Les crimes des fujets font des vertus aux Rois?
Combien, contre mon gré, pour calmer des tem
pêtes

Ai-je verfé de fang, & fait voler de têtes?
Solíme à peine encor commence à respirer.

Mais jufqu'où mon efprit fe va-t-il égarer?
Et qu'eft-ce que j'attends d'une lente juftice?
Allons, d'un fils ingrat ordonner le fupplice;
Eteindre dans fon fang l'efpoir qui l'a flatté,
Mettre aux dépens des fiens mes jours en fûreté,
De fes amis cruels troubler l'intelligence..

Je fçaurai les connoître ; & ma jufte vengeance
Après tant de devoirs, & tant de droits trahis,
Ne fe bornera point à la mort de mon fils.

Fin du quatrième Alte.

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