ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub
[ocr errors][merged small][merged small]

C'E

ALEXANDRE feul.

'En eft donc fait je vais rejoindre Ma
riamne ;

Au fort qu'elle a fubi mon pere me condamne!
Manes facrez, chere Ombre, attachée à mes pas,
Dont les cris m'excitoient à venger fon trépas,
Au lieu de tout le fang que je dois à fa cendre,
Daigne enfin accepter le mien qu'on va répandre.
Et du moins à ce prix appaife tes clameurs,
Ileft vrai, je n'ai pû te venger: mais je meurs.
Je touche, tu le vois, à l'heure infortunée
Où le Ciel pour jamais tranche ma destinée.
Mais d'où vient que mon cœur dans ce dernier mo-

ment

Se trouve plus de calme & de foulagement?

La crainte de la mort nous trouble & nous accable :
Mais dès lors que l'arrêt en eft irrévocable,

Le cœur n'eft plus frapé de tout ce qu'il a craint;
La vertu fe ranime, où l'efpoir eft éteint.
Trône, Sceptre, Grandeurs, dont s'irrite l'envie,
Qui faites le tourment & l'éclat de la vie,
Je ne fens plus fur moi ce que vous avez pû;
Le voile fe déchire, & le charme eft rompu:
Je ne vois plus de vous que l'affreux précipice
Qu'a creufé fous mes pas la plus noire injuftice,

[ocr errors]

Dans cet état funefte où la rigueur du fort
Ne laiffe plus d'efpace entre nous & la mort,
Où prête à s'affranchir d'une indigne matiere,
L'ame agit toute feule, & regne toute entiere.
Sous des traits différens je commence à vous voir,
Vains & brillans objets, dont je n'eus que l'efpot:
Mais lorfque contre moi je puis voir fans murmure
Dans fes droits les plus faints outrager la nature,¡
Que d'un fupplice infame & l'horreur & l'effroi,
Au lieu de m'accabler, ne regnent plus fur moi,
Aimable Glaphira, vous m'occupez encore,›
Mon infortune accroît les charmes que j'adore.
Je brûle, avant ma mort, de vous entretenir !
Sçachez ce que j'ai fait pour pouvoir l'obtenir,
J'ai demande Salome, & par fon entremise
Votre vûë en ces lieux pourra m'être permise,
Je n'ai pû recourir qu'à ce dernier effort:
C'eft le bien que j'attends pour tout fruit de ma mort,
Oui, je vais l'obtenir, je m'en fie à fa rage:
Elle croira par là m'accabler davantage;

Et qu'à mes yeux encore, offrant ce que je perds,
Elle mettra le comble aux maux que j'ai foufferts.
Mais on vient..

SCENE II.

ALEXANDRE, SALOME.

ALEX ANDRE.

IL eft temps de finir votre haine

Madame, mon trépas, le meurtre de la Reine, Thirron même fans doute expiré fous vos coups Ne laiffent plus d'objets à votre fier courroux. Mais dans l'affreux moment qui finit ma carriere,

Si jec

Si je puis obtenir une grace derniere,
Tous mes reffentimens par là font effacez
Et recourir à vous, c'eft vous la dire affez.
SALOME.

Prince, tout ce difcours a lieu de me furprendre ;
De mes foins cependant vous pouvez tout attendre,
Mais que puis-je pour vous?

ALEXANDRE.

L'état où je me voi M'apprend trop que vos foins peuvent tout fur le Roi Daignez m'en accorder le fecours favorable; Vous le devez aux vœux d'un Prince déplorable. Euffai-je merité tous les maux que je fens, Le fupplice nons lave, & nous rend innocens.

Tout vous porte à remplir le defir qui me preffe ; Vous fçavez quelle ardeur m'attache à la Princeffe, Ne puis-je.......

SALOME.

Ignorez-vous quel eft votre pouvoir, Prince? Vous êtes libre, & vous pouvez la voir: Dans vos juftes defirs rien ne peut vous contraindre Et du courroux du Roi vous n'avez plus à craindre Les foins de la Princeffe ont calmé fon transport, Un moment a changé l'horreur de votre fort;

Ce

que n'ont pû les cris de toute la Judée, Votre grace, Seigneur, lui vient d'être accordée.

[ocr errors]

ALEXANDRE.

Quoi, du courroux d'Hérode elle arrête le cours? Et je dois à fes foins le falut de mes jours?

SALOME.

Je l'ai vue à fes pieds, Seigneur, j'ai vû fes larmes, Relevant le pouvoir & l'éclat de fes charmes, Attendrir votre pere, ou plutôt de fon cœur Défarmer tout à coup l'inflexible rigueur; Confondre en les tranfports une haine éclatante. Ce fuccès ne doit point étonner votre attente;

N

Une grace nouvelle animoit fes difcours,
Et n'avoit point de l'art dédaigné les fecours.
Pour vous tout confpiroit, foit gloire, foit tendreffe,
Soit qu'un nouvel efpoir en fecret l'intéreffe,
L'aimable Glaphira jamais jufqu'à ce jour

N'a montré tant d'attraits, ni le Roi plus d'amour.
Sans doute le falut d'une tête fi chere

Dépendoit......

ALEXANDRE.

Et dit-on quel en eft le falaire?
SALOME.

Et qu'importe, Seigneur, dans cette extrémité,
A quel prix votre fang puiffe être racheté ?
Vivez, & foutenant l'honneur de votre race....
ALEXANDRE.

Non, je n'accepte point cette funefte grace:
Trop inftruit des fureurs dont Hérode est épris,
De mes jours rachetez je reconnois le prix.
Plus cruelle que lui vous avez pû prétendre,
Glaphira.....

SALOME.

Le Roi vient; il pourra vous entendre. Et fans pouffer plus loin un confeil hazardeux, Pour mieux vous éclaircir, je vous laiffe tous deux.

SCENE

I I I.

HERODE

ALEXANDRE.

HERODE.

Ui, votre fort, ingrat, a pris une autre face; Vous vivrez, & je viens d'accorder votre grace. Mon cœur, dans fon efpoir trop prompt à s'abufer, Aux foins de Glaphira n'a pû la refufer. De ma félicité j'ignore encor la fuite.

Faites fi bien du moins, par une autre conduite,
Que je ne puiffe point un jour lui reprocher
Le pardon que fes pleurs viennent de m'arracher.
ALEXANDRE.

Ainfi, Seigneur, fes pleurs ont lavé mon injure 3
Ils ont plus fait fur vous que n'a fait la nature?
Du fang en ma faveur les droits mal écoutez.....
HERODE.

Sçavez-vous les efforts que vous m'avez coûtez ?
Je vous pardonne, ingrat. A moi-même contraire,
Mon cœur a fait pour vous plus qu'il ne devoit faire.
Qu'attendiez-vous encor ? Vous vivez, il fuffit.
ALEXANDRE.

Ah! fi votre bonté jufques-là vous trahit, .
Reprenez, j'y confens, une grace funefte,
Et ne me laiffez point un bien que je déteste :
La mort m'affranchira d'un trouble trop preffant;
Souffrez du moins, fouffrez que je meure innocent.
HERODE.

Ah ! perfide, eft-ce ainfi que ma bonté te touche
Ton falut accordé tetrouve plus farouche!
Oui, fous ces vains dépits que tu me laiffes voir,
Tu caches de ton coeur l'orgueilleux défefpoir.
C'eft la foif de mon fang, cruel, qui te dévore:
Crois-tu qu'en ta faveur on me furprenne encore?
Que l'on puiffe à mes yeux déguifer ta fureur?
Non, ne t'en flatte plus, ingrat.....

ALEXANDRE.

Du moins, Seigneur,
Si vous tranchez mes jours, n'offensez point ma
gloire.
Ne chargez point mon nom d'une indigne memoire.
D'un foin bien different mon cœur eft combattu:
Et m'on juftifier c'eft fouiller ma vertu.

Je ne vous dis plus rien: fuivez votre colére:
Condamnez votre fils à rejoindre fa mere;

« ÀÌÀü°è¼Ó »