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Cher Soëfime, auffitôt tranche le cours fatal,
Sauve à mon Ombre encor la honte d'un Rival:
Mon ame fans horreur ne conçoit point l'idée
Que dans les bras d'un autre elle en foit poffedée.
J'exige de ta foi cet effort éclatant.

Je pars fûr de ton zele, & je mourrai content.
MARIA M N E.

Et qu'est-ce qu'a produit ce difcours fur votre ame?
Que lui promites-vous ?

SOES ME.

Je promis tout, Madame.
A cet ordre cruel tout fembloit m'aflervir,
Et je ne l'acceptai que pour mieux vous fervir.
MARIAM NE.

Jufques ici comment avez-vous pû vous taire ?
SOES M E.
Je cacherois encor ce funefte mystere

Mais fi le Roi n'eft plus, Madame, j'ai jugé
Que d'un ordre pareil un autre étoit chargé,
Et j'ai besoin de vous contre cette entreprise.
Le Ciel foutient l'ardeur dont mon ame est éprise.
Heureux ! fi dans ce jour vous obfervant de près
De tout autre complot j'écarte les apprêts.
Sans doute un droit facré dégage ma promeffe.'
Mais Alexandre vient, Madame, je vous laiffe.
Ne blamez point mon zéle, & daignez recevoir
Pour garands de ma foi vos pleurs & mon devoir.
SCENE III.

MARIAMNE, ALEXANDRE.

MARIAMNE.

On fils vient. S'il fe peut, renfermons dans mon

Mon fils vient. S'il fe

ame

Le trouble dont je fuis agitée.

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ALEXANDRE.

Ah! Madame;

Permettez que mon cœur percé de mille traits
Vienne dans votre fein repandre fes regrets.
Mon Pere n'eft donc plus? La fortune ennemie
En retranchant les jours les couvre d'infamie?
Ainfi le fang des Rois ne fe refpecte plus.
D'Augufte tant vanté font-ce là les vertus?
Jufques là fouille-t'il la gloire de fes armes ?
J'entrevois vos confeils, & je fens que vos larmes ?
Réchauffent dans mon cœur ces fiers reffentimens
Qu'une vengeance illuftre irrite à tous momens;
Qu'enfin tout doit ceder aux douleurs que j'éprouve.
MARIAMNE.

Calmez, mon fils, calmez un tranfport que j'approuve
Moi-même encor du Roi j'ignore le destin:
On n'a fait de fa mort qu'un rapport incertain.
Que fçai-je ? plus heureux il refpire peut-être,
Mais Augufte eft vainqueur, refpectez un tel maître.
Peut-être un jour mon Fils vous en aurez befoin,
Ne pouffez point ici vos murmures plus loin.
Et qui fçait fi l'effort d'une main fanguinaire....
ALEXANDRE.

Ciel !

MARIAMNE.

Mon Fils, votre afpe&t me rappelle mon frere."
La nature fe joue en de vivants portraits.
Il étoit votre image, ou vous avez fes traits.
Les graces, la douceur des vaillans Machabées |
Brilloient encor en lui du Ciel même tombées.
Que fa tête charmante, & fa noble pudeur
De fa Tiare encor relevoient la fplendeur!
Quand fur fes pas en foule accouru dans le Temple,
Avec avidité le peuple le contemple,
Et qu'il admire en lui le reste de fes Rois.
Ce fut pour la premiere, & la derniere fois,

Hélas! de ma maison j'ai vu tomber la gloire.
Ce jour, ce cruel jour frappe encor ma mémoire,
Où plongé dans les eaux par de perfides mains,
A peri devant moi le plus cher des humains.
L'horreur fur fon vifage eft tout-à-coup empreinte ;
Et de fes yeux ouverts la lumiere est éteinte,
Il n'offre plus qu'un corps meurtri, defiguré.
Le Temple en fut émû, le voile dechiré,
Le Ciel gronda, le jour fe couvrit de nuages,
Et le Jourdain fanglant inonda fes rivages.
ALEXANDRE.

Ciel! où votre douleur va-t'elle s'égarer?
Quel fouvenir encor vient de vous déchirer?
Oubliez les malheurs de votre augufte Race.
Songez aux maux préfens, & qu'une autre difgrace
Affaillit votre cœur déja trop abattu,

Et plus cruelle encor s'offre à votre vertu.
Mon ame à ce transport ne s'eft point attendue.
He quoi! vous ne pouvez détourner votre vûë
Des objets éloignés qui viennent vous frapper,
Quand l'interêt d'un Fils doit feul vous occuper?
Ciel à qui dans mes maux faut-il que je m'adresse?
MARIA MNE.

Mon Fils, vous devez mieux juger de ma tendreffe.
Ne me condamnez point. Vous fçaurez tôt ou tard
Ce qui caufe mon trouble & d'où ina douleur part.
Mais fçachons quel avis Phodime nous apporte.

SCENE

IV.

MARIAMNE, ALEXANDRE, SALOME, PHOEDIME,

PHOEDIME.

Adame, j'ai laiffé Salome à votre porte,

MARIAMNE.

Tu peux la prévenir, je ne la verrai pas.
Tu ne connois que trop l'accueil qu'elle merite,
Tu fais jufqu'à quel point fa préfence m'irrite.
Voudrois-tu dans mon trouble,avec un nouveau foin,
De fcs perfides pleurs me rendre le témoin ?
Phoedine, jufques-là je ne puis me contraindre.
Allons, mon Fils rentrons.
Marianne & Alexandre fortent!

PHOEDIME.

Ah! que j'ai lieu de cráindre

D'un mépris trop marqué les retours éclatans!

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Je fçai de fes chagrins la caufe déplorable,
Et prendrai pour la voir un moment favorable.
Mais qu'elle fçache au moins que dans mes déplaifirs,
Je venois joindre ici mes pleurs à fes foupirs,

Et dans le bruit public d'un changement funefte,
De mes foibles fecours offrir tout ce qui refte.
PHOEDIME.

Madame, c'eft affez.

SCENE VI.

SALOME, ELISE.

SALOME.

DE tes cruels mépris

Avec ufure encor je te garde le prix,

Reine trop orgueilleufe, & tu vas me connoître.
As-tu crû qu'à l'outrage infenfible peut-être,
Efclave comme un autre, & timide à mon tour
De ta vaine faveur j'attendrois le retour?
Que je la briguerois? Avec quelle infolence
Tu m'as fait mille fois rougir de ma naissance?
Si la fplendeur du fang n'eft point donnée à tous,
La gloire pour le moins ne dépend que
de nous
Elle éleva mon Frere au Trône de Judée.

ELISE.

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Que dites-vous, Madame? Et quelle eft votre idéel
Quel tems votre courroux prend-il pour éclater?
Dans quels périls vous-même allez-vous vous jetter ?
Si le Roi ne vit plus, que devient votre haine?
Et pouvez-vous douter qu'Alexandre, la Reine,
Ne trouvent bien-tôt grace auprès de l'Empereur?
SALOME.

Elife, il en eft tems, fors toi-même d'erreur.
Au gré de mes defirs aujourd'hui tout confpire.
Herode vit encor. Mais c'eft peu qu'il refpire,
Les foupçons devant lui d'abord font disparus,
Sa gloire eft confirmée & fes honneurs accrus.
Que te dirai-je encor? foit prudence, ou caprice;
Le Roi doit à Cefar offrir un facrifice.
C'est ce qu'en arrivant lui-même il s'eft promis

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