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Voilà le Livre faint, c'eft la Loi de l'Empire,
Où de ces mêmes Dieux la Majefté refpire,
Où leur efprit repofe & fe plaît d'habiter,
Jure-moi d'y foufcrire & de l'exécuter.
OSAR PHIS.

Oui, par le Ciel auteur de nos deftins profperes;
J'efpere d'obéir à la Loi de mes Peres:

Je fçai que le premier je dois m'y conformer.
PHANE'S.

Selon l'ufage au Temple il faut le proclamer. Mais pour le faire encor fous de plus faints aufpices;

Pour rendre à tes projets les Dieux toujours propices,

Daigne entendre nos cris; un Hebreu dans ces murs,
Enfant d'un Peuple vil, & d'efclaves obscurs,
Y doit de fa valeur confacrer la mémoire,
Et de fa Nation y rélever la gloire,
Humilier l'Egypte, & par de grands exploits
Marcher impunément fur la tête des Rois:
Avec lui de fon Dieu, tel fut, dit-on, le pacte:
Ordonne qu'on en faffe une recherche exacte
Que fes jours immolés diffipent notre effroi.
Voilà ce que ton peuple exige encor de toi.
Par ce fanglant tribut viens confirmer ta gloire,
Et fatisfaire aux Dieux auteurs de ta victoire.
OSARPHIS.
Je fçai que fur la foi des Prêtres d'Ofiris,
D'une vaine frayeur Pharaon fut furpris.
Une fanglante foi par lui-même ordonnée,
De tout Hebreu naiffant tranchoit la destinée,
Ettel, dont la pitié l'eut fouftrait à la mort,
Sur lui, fur tous les fiens en détournoit le fort.
Le Nil vit en courroux dans fes flots moins perfides;
Les Peres & leurs Fils devenir homicides;
Une Mere éperduë à ces objets nouveaux,

D'une tremblante main les plonger dans les eaux,
Un peuple tout entier cédoit à la difgrace.
Et c'étoit en effet en éteindre la race,

Si bien-tôt Pharaon rejettant ses terreurs,
N'eut lui-même arrêté le cours de tant d'horreurs.
Et qu'a fait Ifraël à fes fuperbes Maîtres ?
Ne fe fouvient-on plus de l'un de ses ancêtres,
Que jadis parmi nous le fort avoit jetté
Entre Hebron & Sichem jeune esclave acheté ?
Que ne peut la vertu dans le cœur qu'elle infpire
Il approcha vos Rois, il gouverna l'Empire,
D'une longue famine il détourna le cours.
Hé, quel fut pour les fiens le prix de fes fecours!
On n'a point encor mis de bornes à leurs peines.
L'injufte autorité les accabla de chaînes,
Elle aigrit leur mifere, à des tourmens nouveaux
Ajoûta le mépris pire que les travaux.

Mais dans leurs maux toujours quelque efpoir fe ro

trouve,

Et tout femble fervir un Dieu qui les éprouve: Sans que la main qui tient chacun d'eux abattu, Tente leur patience ou laffe leur vertu.

PHANE'S.

Toi-même contre toi quelle pitié t'inspire?
Parmi ce peuple enfin ton ennemi refpire.
A l'ombre de ce Trône en fecret élevé,

C'eft peut-être en ton fein que tu l'as confervé.
OSARPHIS.

Le Dieu du Ciel, ce Dien qui marche fur les nuës
Ouvre à tous fes confeils des routes inconnuës.
Dès qu'il voudra fauver cet Hebreu du trépas,
Par quels efforts, comment l'arracher de fes bras?
Le Ciel d'ailleurs veut-il de pareils facrifices?
Quoi, de monregne ici, ce feroient les prémices:
Sur la foi d'un Oracle ardent à m'engager
Dans le fang innocent je pourrois me plonger?

PHANE' S.

Des Dieux dans leurs decrets refpecte la colere.
Garde-toi de vouloir en percer le mystére.
Songe, dans le pouvoir dont ils t'ont revêtu,
Que le crime les fert autant que la vertu.
OSARPHIS.

Ne fonde point ici la Sageffe éternelle,
Et d'accord avec toi, fi ce n'eft avec elle,
Miniftres des Autels, c'eft à toi de fçavoir
Qu'elle eft de tes pareils la gloire & le devoir.
Ce n'eft point fur leurs pas que l'orage doit naître,
A l'efprit feul de paix ils fe font reconnoître ;
Un zéle toujours pur animant leurs projets,
Donne aux Rois des leçons & l'exemple aux Sujets.
De tes deffeins, crois moi ; j'entrevois le mytére,
Et quant à cet avis que tu crois falutaire,
Sans en faire l'objet d'un plus long entretien,
Je ferai mon devoir; fonge à remplir le tien.
PHANE'S.

Ah! je fçaurai du moins prévenir ta vengeance.

SCENE V.

AMENOPHIS; PHANE'S.

PHANE'S.

Ui, Prince, tout dépend de notre intelligen

ce;

Et fans doute Ofarphis prêt à nous foupçonner,
A quelque coup d'éclat peut fe déterminer.
Vous fçavez de quel oil lui-même il envisage
Cet avis de nos Dieux, ce terrible préfage....

AMENOPHIS.

Je refpire, Phanés. Ton zéle & tes fecours
Scauront de mes malheurs interrompre le cours.
Ah! fans prendre pour loix fon rang ni fon audace
Va de l'Oracle au peuple annoncer la menace.
Le peuple en fon effroi ne connoit plus de frein:
De l'injufte Ofarphis peins-lui le cœur d'airain,
Ofe-lui donner même une ame Ifraëlite.
Et moi de mes amis j'affemblerai l'élite.
Du moins je puis au nombre opposer la vertu.
L'efpoir dans un grand cœur ne peut
être abattu,
Et ces extrémités dont tu me peins l'image,
Avec elles toujours portent leur avantage.

Non, qu'en aveugle ici je cherche à m'expofer;
Mais on peut tout, Phanés,quand on peut tout ofer
PHANE'S.

Le fuccès ne dépend que de votre prudence....
Vous connoiffez la Cour, combien fa dépendance...
AMENOPHIS.

De l'orgueil d'Ofarphis déja la Cour fe plaint.
Autant qu'elle l'admire, autant elle le craint.
Trop de gloire lui pefe, & laffant fon hommage
D'un pouvoir tyrannique offre à fes yeux l'image.
Que fçais-je ? fous ce joug qu'elle porte à regret
Peut-être mon malheur l'attendrit en fecret.
Tout doit favorifer le zéle qui le preffe.

PHANE'S.

Le Ciel vous affûra des vœux de la Princeffe:
Moi-même ici pour vous j'en reçus les fermens:
On fait quel noble orgueil entre fes fentimens
Quelles hautes vertus Tharbis eut en partage,
Elle eft chez Jocabel, fans tarder davantage,
Seigneur, il faut le voir.

AMENOPHIS.
Oferois-je penfer

PHANE'S

Qu'entre le Trône & moi fon cœur pût balancer?

PHANE'S.

N'en doutez point, fidele à fa premiere flame.... Mais la voici, Seigneur, je vous laiffe.

SCENE

VI.

THARBIS, AMENO PHIS.

AMENOPHIS.

H!Madame, Quel que foit le traité qui vous offre en ces lieux, Je ne puis vous y voir fans rendre grace aux Dieux. Mes pleurs, mon défespoir, mes regrets, mes allarmes

Dans ce moment tout céde au pouvoir de vos char

mes:

J'en oppofe l'aspect au deftin irrité. Mais, hélas! Jocabel a-t-elle mérité D'être de vos projets feule dépofitaire ? Cet hymen que rompit la mort de votre Pere, Ne vous a-t-il de moi laiflé nul fouvenir? De mes propres malheurs venez-vous me punir ? L'excès de mon bonheur excita feul l'orage. Mes cruels ennemis en prirent trop d'ombrage: Au bruit de cet hymen on les vit éperdus, Ils craignirent vos droits dans les miens confondus Ah! de quels déplaifirs j'ai fenti les atteintes! Ce Palais doit encor retentir de mes plaintes. Aux Autels de nos Dieux mes cris furent portés :)] J'implorai leur juftice & l'honneur des traités ; J'ofai femer le trouble & crus dans ma difgrace Pouvoir de mes amis intéreffer l'audace.

Mais je fus jufques-là perfecuté du fort

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