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Je n'ai point cru par-là qu'on me pût outrager
Entre Salome & moi, c'eft au Roy de juger.
SALOM E.

Où tendent ces difcours quelle eft cette menace?
Mais je ne vois que trop d'où vous nait tant d'audace.
Le Prince eft de retour: qui fert fes attentats,
Peut rencontrer l'abime où s'engagent ses pas.
Vous pouvez lui parler; il vient; je me reiire.
O Ciel de mes complots auroit-il pû s'inftruire?"
A part.

THIRRON.

C'eft à toi de trembler, contre toi dans ces lieux
Tu me revois chargé d'un fecret odieux.

A part.

SCENE I I I.

ALEXANDRE, THIRRON.

E

ALEXANDRE.

St-ce-vous, cher Thirron, que le Ciel me ren-
voye ?

Témoin de mes malheurs foyez-le de ma joye.
Sans crainte, & fans relâche attaché fur mes pas,
A mes juftes tranfports daignez ouvrir vos bras.
THIRRON.

Honorez moins, Seigneur, le zéle qui m'anime,
Mon devoir fur vos pas m'appelle dans Solime.
Heureux ! fi j'y pouvois, aux depens de mes jours,
Du deftin qui vous rit éternifer le cours.

ALEXANDRE.

Ignorez-vous quel fort mon pere ne prépare?
Dans ces lieux,cher Thirron, pour moi tout fe déclare.
Tout eft changé, le Ciel confond mes ennemis:
Et le plus doux efpoir à present m'eft permis...

Si vous fçaviez, Thirron, avec quelle tendreffe,"
De quels yeux à la Cour le Roy voit la Princeffe.
Satisfait & flatté d'un hymen glorieux,

Il perd en la voyant des tranfports furieux,
Qui renaiffant toujours de fa douleur amere,
Vengent depuis quinze ans les malheurs de ma mere.

THIRRO N.

Je vous en crois, Seigneur : mais eft-il encor temps Qu'à des tranfports fi doux votre cœur....

ALEXANDRE.

Ah! j'entens. De la Reine, il eft vrai, la mort n'eft point vengée. Par les foins de l'amour la nature outragée De mon reffentiment v eut de plus prompts efforts, Et pour un feul trépas demande mille morts. O vous, témoins muets d'une injufte colere, Marbres que fouille encor le meurtre de ma mere, Combien votre aspect seul agite mes efprits! Et vous, Manes plaintifs, interrompez vos cris, Puitqu'avec mon devoir tout eft d'intelligence. Oui, Thirron, cet hymen affure ma vengeance: Par là mille fecours s'offrent à mon courroux; Vos vœux bientôt contens. . ..

...

THIRRON.

Prince, que dites-vous? Prévenu dans ces lieux d'un courroux légitime, Vous-même appréhendez d'en être la victime. Des embarras des Rois effet trop dangereux, Qu'une longue habitude a de pouvoir fur eux ! ALEXANDRE

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De quel effroi votre ame eft-elle prévenuë?
THIRRON.

Salome, je le vois, ne vous eft point connuë:
Votre malheur, Seigneur, n'a point fini fon cours;
Votre pere vous aime, il vous aima toûjours:
Mais un cœur prévenu dépend peu de lui-même,

Soupçonneux, inquiet, jaloux du Diadême.
La haine de Salome excitant fes tranfports,
De fon vafte courroux fait mouvoir les refforts.
Né vertueux, fans doute, on a fçu le furprendre:
Jufqu'où ne peuvent point les grands cœurs fe ré-
pandre?

La vertu, dont le crime a pû gagner l'appui,
Eft plus injufte encor, plus cruelle que lui.
Je voulois fuir Salome, & je l'ai rencontrée :
En entrant fa furprife à mes yeux s'eft montrée,
Comme fi mon afpect caufant fon embarras,
Lui reprochoit alors de fecrets attentats.
J'ai parlé. Ses difcours m'en ont dit davantage,
Et mes yeux de plus près ont contemplé l'orage.
Vous n'avez på penfer que prompte à fe trahir,
Elle puifle vous craindre, & ne vous point hair:
Tous fes forfaits paffez excitent fa colere,
Et le crime du fils eft la mort de la mere.
Votre hymen qui s'approche irrite fon courroux;
Le moment eft terrible, & décide entre vous.
ALEXANDRE.

Et que peut contre moi la fureur de Salome,
Lorfque j'ai la faveur & l'amitié de Rome ?
Contr'elle & contre tous fon fecours m'eft offert;
Et je puis.....

THIRRON.

Et c'eft là, Seigneur, ce qui vous perd. C'eft peu que dans ce jour fa prudence funefte Du fang Almonéen pourfuive en vous le refte; De mon retour encor dans ces terribles lieux, Tous les motifs fecrets n'ont point frapé vos

yeux.

Il faut vous en inftruire. Enfin votre ennemie,
Contre vous dans fa haine encor plus affermie
Confirme des foupçons trop juftement conçus.
Salome.

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ALEXANDRE,

Ciel!

ALEXANDRE.

Hé bien, Thirron ?
THIRRON.

Traite avec Silléus

ALEXANDRE.

THIRRON.

Elle fçait pour vous ce que Rome peut faire Et qu'en faveur du fils elle fait grace au pere; Que par vous Silléus perd l'appui des Romains. Votre perte, Seigneur, importe à fes deffeins. Sans ces deffeins peut-être, où fa fureur éclate, Elle eût vû d'un autre ceil cet hymen qui vous flate Sa haine ambitieuse en a repris son cours, Et l'achemine au Trône aux dépens de vos jours ALEXANDRE. Ah! plûtôt elle-même elle affure fa perte. Que ne faififfons-nous l'occafion offerte? Vous fçavez fes deffeins, ofez les reveler.

Le Roi....

THIRRON.

N'en doutez point, je fçaurai lui parler. Mais lorfque je me livre au zèle qui m'enflame, Que vos juftes tranfports s'enferment dans votre ame Sur mes foins quelque temps il faut vous repofer; Contraignez-vous encor, c'eft à moi feul d'ofer. La verité, Seigneur, dans ces lieux ignorée, S'y montre, ou rarement, ou trop défigurée. Je fçai qu'autour du Roi fans ceffe eft répandu Un tas de vils flatteurs à la faveur vendu; Que Salome écoutant fa haine & fa vengeance; Par lui contre lui-même exerce une puiflance, Dont les moyens divers, avec art recherchez, Sont autant d'attentats fous d'autres noms cachez. Mais fur la vertu feule un grand cœur se repose, Il parle fans contrainte, & quoi que nous oppofe

L

Dans fes préventions un Monarque irrité,
L'homme malgré lui-même aime la verité;
Sa lumiere le frape, & toûjours favorable
Le Ciel entr'elle & nous mit un rapport durable ;
Elle emprunte de lui fes droits & fon pouvoir,

Et

pour vaincre les cœurs, n'a qu'à fe faire voir. Mais entrez chez le Roy, Seigneur, je vais attendre Le moment favorable où l'on pourra m'entendre. A vos tris jufqu'ici puiffe le Ciel fermé, Seconder un projet depuis long-temps formé !

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PHILON.

Seigneur, fouffrez qu'ici je vous montre ma joye;

Thirron eft dans ces lieux, le Ciel vous le renvoye: Au fils de Mariamne attaché comme moi

Il

y vient vous prouver & fon zéle & fa foi. Quelle que foit pourtant cette ardeur éclatante Pour vous dans cette Cour fa vertu m'épouvante. "Eh penfez-vous, Seigneur, que d'utiles avis Y loient reçûs fans peine, & fans crainte suivis? Et que la verité par tout fi respectable Approche fans péril d'un Trône redoutable, Ou'le menfonge adroit, préparant fes projets, Aux yeux d'un Roi cruel farde tous les objets? Avec qui diffimule; oui, Seigneur, il faut feindre. ALEXANDRE.

1

Je vous l'ai dit, Philon, je ne puis me contraindre;
Et mon cœur par vos foins vainement combattu,
Contre mes ennemis n'admet que ma vertu.
Je pouvois fuir des lieux teints du fang de la Reine:
Mais enfin vous fçavez l'interêtqui m'entraîne;

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