ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub
[blocks in formation]

Une protection aussi marquée que celle, dont il a plû A VOTRE ALTESSE d'honorer ma Tragedie de m'autorife aujourd'hui dans la liberté que je prends de vous en faire des remercimens publics; &

Mariamne,

V

de la mettre à l'abri de votre Augufte Nom. Oui, MONSEIGNEUR, élevé à l'ombre du Trône, formé dans le fein de la Gloire & des Arts; dans cette longue habitude où vous êtes de voir & de fentir les beautés dans tous les genres, l'honneur de vos fuffrages & le prix de vos applaudiffemens devroient être en faveur de Mariamne, des titres bien impofans.

Fe fuis avec un très-profond respect,

MONSEIGNEUR,

DE VOTRE ALTESSE, le très-humble, &c.

PREFACE.

LUSIEURS Perfonnes de confideration dont je refpecterai toûjours les confeils, ont bien voulu me faire entendre que j'étois dans une obligation particuliere de faire imprimer ma nouvelle Tragedie, & de mettre fous les yeux du Public & dans le recueillement d'une lecture , une Piece qui a été fi fort defigurée par le défordre qui en a troublé la premiere Repréfentation.

D

Perfonne n'ignore que le Parterre ne foit compofé d'une infinité d'honnêtes gens, & de veritables Connoiffeurs, dont la décifion eft digne de faire en partie la deftinée des Pieces de Théatre. Mais il y a une portion de ce même Parterre qui met à la place du difcernement & de la raison une partialité vile, & quelquefois vénale.

Je n'ai point traité un fujet nouveau. La Mariamne de Tristan a fubfifté long-tems fur nos Théa tres. Les fureurs d'Herode ont couté la vie au célebre Mondori, l'un des plus grands Comediens de fon tems. De nouvelles bienféances du Théatre que le libertinage peut-être y a feul introduites, ne nous ont plus permis d'y fouffrir quelques perfonna ges de la Piece de Triftan. Non que les mœurs de la plupart des Spectateurs fe foient épurécs; mais il eft arrivé, que par je ne fçai quelle bizarerie, plus il y a de corruption dans le cœur, plus on eft devenu délicat fur les expreffions, & fur les images. Ce n'eft point l'idée en foi qui doit bleffer; mais Fimagination en mouvement la faifit, & la déve loppe, & la malignité alors ne manque jamais de s'exalter. Peut-être même qu'en recherchant la mé

canique de celles de nos Picces qui ont eu le plus de fuccès, on trouvera que c'eft en elles un fond de ce même libertinage qui produit dans la repréfentation je ne fçai quelle efpece d'illufion & d'enforcellement ; & qu'elles relemblent en quelque forte à ces coquettes qui ne plaifent que par leurs défauts & ne tirent leur avantage que de leur infidelité.

Ces nouveautez dans nos Tragedies font regar dées par quelques uns comme des reffources de l'efprit humain, & des découvertes dans le merveilleux; mais je ne fçai au contraire s'il ne les faut point envifager comme des préfages de quelque révolution dans les Lettres, & des avant-coureurs de la deftruction du goût.

La famille d'Herode auffi-bien que celle d'Oedipe, a fourni des fujets fufceptibles de tous les interets capables de remuer l'ame du Spe&ateur.

Herode étoit un particulier que fes vices & les vertus avoient placé fur le Trône.

Mariamne une Princeffe attachée à l'orgueil de fa naiffance & encore plus à fa douleur & à fa vertu, & qui n'a eu dans fon parti que fes larmes & fa beauté.

Salome fœur d'Herode eft une de ces femmes artificieufes & capables felon leurs vûës & leurs interêts de mettre dans une Cour orageufe toutes les paffions en mouvement.

Quels caracteres n'a-t'on point par-là à déployer fur la Scene? Et fur quoi peuvent le fonder ceux qui traitent de détails de ménage, & d'affaires purement domeftiques, les malheurs de la famille de Mariamne & extinction entiere de la race des Afmonéens, qui en roit dans le plan de la fageffe éternelle, comme une révolution des plus éclatantes & l'époque la plus marquée de l'exécution de fes décrets?

« ÀÌÀü°è¼Ó »