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d'atteindre Louis XIV derrière Molière en répondant à l'Impromptu; mais la haine fut plus forte que la prudence, et, dans le courant du même moisde novembre, l'Hôtel de Bourgogne joua tour à tour l'Impromptu de l'Hôtel de Condé, de Montfleury fils, puis la Vengeance des marquis par de Villiers. Nous ne pouvons nous empêcher de faire remarquer ici l'extrême rapidité avec laquelle fut poursuivie cette lutte, qui avait produit six comédies, dont cinq jouées sur le théâtre, dans l'espace de moins de six mois: commencée le 1er juin 1663, avec la Critique de Molière, elle se terminait sur la scène avec la Vengeance des marquis, avant la fin de novembre. Nous ne comptons pas les Amours de Calotin, de Chevalier, pièce indécise par laquelle le théatre du Marais semble avoir voulu simplement faire acte de présence dans la lutte engagée, sans s'y compromettre '. Mais, en dehors du théâtre, la lutte se continua encore quelque temps. En 1664 parut, chez Gabriel Quinet et chez Nicolas Pépingué, in-12, le Panégyrique de l'École des femmes, ou Conversation comique sur les œuvres de M. de Molière, pièce anonyme, attribuée par quelques-uns à l'abbé Dubuisson, par le catalogue Soleinnes à de Nonantes. On voit par divers passages de cet ouvrage, et entre autres par celui que j'ai cité tout à l'heure en note, qu'il avait été composé immédiatement après le Portrait du peintre, et avant l'Impromptu de Versailles' ; mais on voit aussi par la date (1664) qu'il ne parut qu'après cette comédie, et l'auteur l'explique dans son avis au lecteur : « C'est parler, ce semble, d'une chose lorsque l'on n'en dit plus mot, et, selon le proverbe, réveiller le chat qui dort; mais il y a plus de trois mois que ceux qui te débitent ce panégyrique l'ont entre leurs mains. Néanmoins ce ne sera pas le dernier ouvrage sur le mesme sujet, puisqu'il en paroist un depuis quelques jours, sur le théastre de la seule troupe royale, qui fait beau bruit, et duquel on a ajouté quelque chose en celui-cy. » Ce Panegyrique, écrit sous forme de conversation entre des amants et leurs maîtresses, est une œuvre aussi lourde qu'équivoque l'auteur prend soin de prévenir le lecteur que « de quelque opinion et de quelque goust qu'il soit, il y trouvera quelqu'un de son party ». En effet, les uns plaident le pour, les autres le contre, et si, à la fin, les deux personnages qui soutenaient le parti d'Élimore (Molière) finissent par se ranger contre lui, c'est uniquement, comme d'ailleurs l'explique l'auteur, par complaisance pour leurs belles et pour ne pas se faire tort dans leurs bonnes gråces. Néanmoins le contre semble développé avec plus d'abondance et de satisfaction que le pour, et, s'il était possible de deviner sûrement l'intention de l'auteur, elle pencherait plutôt vers la satire que vers l'éloge 3.

Voir cette comédie dans le volume de ce recueil consacré au Th, du Marais,

2 Il est parlé, à la page 68, du succès qu'a l'École des femmes depuis six mois; mais il ne faut pas prendre cette indication à la lettre, elle n'est qu'approximative. Ea effet, l'École des femmes avait été représentée pour la 1re fois le 26 décembre 1662, et les six mois écoulés depuis nous reporteraient seulement à la fin de juin 1663; mais le Panégyrique de l'École des femmes fait mention du Portrait du peintre, qui ne fut joué que plus tard.

3 C'est ce qui m'empêche de croire, avec quelques critiques, que cette pièce soit celle dont parle Molière dans sa préface de l'École des femmes. On pourrait encore comprendre que son amitié pour l'auteur lui eût fait trouver, ou du moins lui eût fait

La même année parut aussi chez Pierre Bienfait, in-12, la Guerre comique ou la Défense de l'École des femmes, par le sieur de la Croix, petite comédie, ou plutôt conversation en cinq disputes, - prose mêlée de vers, et dialogue mêlé de récits. Toutes les opinions y ont également leurs interprètes, mais sans qu'on reste indécis sur celle de l'auteur : c'est bien une défense de la comédie de Molière, et une défense judicieuse, fort supérieure au Panégyrique. Le début seul est un peu lourd et lent, mais le reste de l'ouvrage marche avec vivacité, et tient plus que ne promettaient les premières pages. Le plan est jeté dans un moule alors très à la mode : Apollon fait comparaitre, par l'intermédiaire de Mercure, devant l'Olympe et les Muses, tous ceux qui ont à se plaindre de Molière. On voit défiler successivement des gens de qualité, un marquis ridicule, un bourgeois jaloux, un poëte, et un comédien représenté par le La Rancune de Scarron; après avoir écouté leurs griefs, qui sont réfutés par un admirateur de Molière, Apollon prononce son arrêt en faveur de celui-ci.

Enfin, la même année encore, de Villiers publia, dans son volume des Diversitez galantes (Barbin, 1664), sa Lettre sur les affaires du théâtre, dirigée presque tout entière contre Élomire (Molière), l'École des femmes et l'Impromptu de Versailles'.

Tant de bruit et tant de fureurs étaient le plus sûr témoignage du succès de Molière Villiers eut du moins l'esprit de s'en apercevoir, et de le confesser d'assez bonne grâce vers la fin de sa Lettre. On s'en apercevra mieux encore en lisant ceux de ces ouvrages que nous avons reproduits.

Nous n'avons pas à nous occuper ici des autres croisades entreprises dans la suite contre Molière, surtout à propos du Festin de Pierre et de Tartufe, ni des deux pièces de Le Boulanger de Chalussay, qui semble avoir été l'un des plus déterminés ennemis du grand poëte comique, contre lequel il publia, en 1670, son Élomire hypocondre ou les Médecins vengés (Ch. de Sercy, 1670, in-12), et, également en 1670, fit jouer au théâtre du Marais, suivant quelques critiques, l'Abjuration du marquisat, qui ne fut probablement pas imprimée.

Pour en revenir au Portrait du peintre, de Boursault, la date précise de

dire qu'il trouvait galante et spirituelle une pièce si indigne de lui; mais comment comprendre ce qu'il ajoute qu'il n'osa la produire sur son théâtre, parce qu'il y trouva des choses trop avantageuses pour lui, et qu'il eut peur qu'on ne l'accusât d'avoir mendié ces louanges? Suivant les Nouvelles nouvelles, qui sont de Villiers (voir notre Notice sur de Villiers), l'auteur de l'ouvrage sur lequel Molière s'exprime en ces termes était l'abbé Dubuisson; mais alors l'abbé Dubuisson ne peut être l'auteur du Panégyrique.

I Nous donnons dans ce volume toutes les pièces relatives à ce débat qui ont été jouées sur le théâtre de l'hôtel de Bourgogne. Pour ces pièces nous n'avons pas craint de multiplier les notes, en y reproduisant, sous forme de rapprochements, de manière à éclairer, compléter, rectifier au besoin chaque détail, tout ce que les autres écrits contemporains sur Molière, et particulièrement ceux que je viens de citer, renferment de curieux. Ainsi le lecteur pourra se faire une idée des obstacles et des difficultés qu'eut à surmonter Molière, des ennemis qu'il cut à combattre, de la nature des attaques passionnées et persistantes dirigées contre son œuvre.

sa représentation n'est pas nettement indiquée. Comme la Critique de l'École des femmes avait été jouée en juin 1663, et qu'entre cette pièce et le Portrait du peintre avait paru la Zélinde de Villiers; comme, en outre, l'Impromptu de Versailles fut représenté pour la 1re fois du 16 au 21 octobre à Versailles, et que Molière s'est vanté d'avoir fait cette réponse en huit jours, on en doit conclure, ce semble, que le Portrait du peintre fut représenté au mois de septembre, peut-être au mois d'août, à l'Hôtel de Bourgogne. Mais il ne fut imprimé qu'après l'Impromptu, auquel Boursault répond dans sa Préface.

LE MÉDECIN VOLANT,

COMÉDIE EN UN ACTE.

1661.

PERSONNAGES.

CLÉON, amant de Lucresse.

LISE, servante de Lucresse.
LUCRESSE, maistresse de Cléon.
CRISPIN, valet de Cléon, médecin volant.
FERNAND, père de Lucresse.
PHILIPPIN, valet de Fernand.
CANTEAS, habile médecin.

La scène est devant la maison de Fernand.

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