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ordre du Roy de me demander mon avis fur ce qu'il auroit à faire pour empêcher la guerre, en cas que le Roy d'Espagne vînt à mourir, y ayant beaucoup d'apparence que cela n'iroit pas loin, parceque je fçavois que depuis long-temps il n'avoit eû de deffeins que pour la paix, je lui répondis, que j'eftimois que de tous côtez on devoit fonger à faire le fils de M. l'Electeur de Baviere Roy d'Efpagne, il m'avoua que c'étoit la penfée de fon maître, qui lui avoit défendu de me la dire, avant de m'en avoir fait la question, nous nous étendimes fur toutes les raisons qui appuyoient cette penfée, je me fçus bon gré de m'être fi bien tiré d'affaire. Ayant eû répon fe du Roy d'Angleterre après cette entrevûe, il me vint voir fans façon, pour me faire ene

core des amitiez de la part de Sa Majefté. J'appris que quelqu'un ayant conté à une Dame de merite qui a beaucoup d'efprit la premiere réponse que j'avois fait au Milord Portland, elle répondit, on difoit que Gourville avoit perdu fon efprit, mais il me femble qu'il faut qu'il en ait encore pour avoir parlé comme il a fait. J'ai lieu de croire que l'honneur & le plaifir que me fit cette visite ramena mes efprits & Dieu m'a fait la grace de revenir dans mon naturel, mais je ne m'en fuis pas tout-à-fait bien apperçu, que dans une rencontre, que je dirai dans la fuite, après laquelle je me trouvai comme je pouvois fouhaiter d'être. J'ai repris mon train & mes maximes ordinaires, ayant réglé ce que je dois dépenfer pour vivre honorablement felon mon re

venu & recommencé à voir tous

les matins par détail la dépenfe que j'avois fait le jour auparavant, comme j'ai toujours pratiqué depuis que j'ai été en état

d'en faire.

Il y a deux ans & demi ou environ, que ne pouvant avoir aucune raison ni justice de quelques perfonnes à qui j'avois fait plaifir, je me trouyai obligé, après une longue patience, d'intenter un procès, & comme je ne m'étois nullement attendu au procedé que l'on avoit avec moi, j'en fus si scandalisé & fi fâché, qu'étant necessaire de faire un Memoire pour inftruire mon Avocat, je me trouvai dans une émotion qui me fit entreprendre de le dreffer & de le faire écrire, avec tant de précipitation, que je l'achevai fans l'aide de perfonne, cela me fit préfumer que mon efprit étoit

encore

encore plus revenû que je ne le penfois, & même ceux qui étoient témoins de ce que je venois de faire en furent furpris auf, fi-bien que moi. Apès tout il ne fe paffoit point d'heure dans la journée que je ne remerciaffe Dieu de la grace qu'il m'avoit accordée, en me faisant connoî tre le bon état où j'étois, les vi fites & les converfations que j'a vois, ainsi que j'ai marqué ci-devant y contribuerent beaucoup & à me rendre ma gayeté, par la joie que j'en reflentois & l'honneur qu'elles me faifoient dans le Monde, car il eft conftant qu'après cela je me retrou vai dans mon naturel, & fi je l'ofe dire auffi-bien & peut-être mieux que je n'ai jamais pensé.

Je fuis bien aife de dire ici, que lorsqu'on résolut d'abattre les Prêches qui étoient dans le Royaume, le Roy m'accorda Bb

Tom. II.

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celui de la Rochefoucault, pour y établir une Charité, que je fis feparer de murailles qui diftinguoient le lieu où étoient les hommes d'avec celui où devoient être les femmes, & au bout je fis bâtir une Chapelle, où l'on dit la Meffe tous les jours pour les pauvres malades. J'avois envoyé tous les ornemens neceffaires. Il y a douze filles établies d'une pieté exemplaire, qui ont fait des voeux de fervir les pauvres malades, elles occupent l'Apartement qu'avoit le Miniftre. Après que je leur eû fait present d'une Lampe & d'un Encenfoir d'argent, elles me manderent que la Maison joignant la leur, & qui en avoit été feparée, étoit à vendre pour environ deux mille livres, auffitôt je donnai des ordres d'entrer en propofition pour l'acheter mais comme elle apartenoit aux

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