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voulû jouer le rôle de Premier Miniftre, quand même il l'auroit pû, par la crainte d'être chargé des mauvais évene. mens; en un mot il étoit né fage, mais avec un peu de penchant à la rancune, ce qu'il marqua affez à l'occafion de Monfieur Defmaretz neveu de M. Colbert. Je me souviens qu'un jour à Fontainebleau, me parlant de l'acquifition qu'avoit fait M. de Louvois à Meudon, il m'exhorta de lui infinuer autant que je pourrois de vendre le Château à quelque Communauté; craignant peut-être la grande dépenfe qu'il faudroit faire pour l'embellir, & que cela ne convenoit point, furtout à caufe du voifinage de Verfailles, fur quoi il me cita ce qu'il avoit fait à Chaville. Je lui répondis, que fa modération & fa fageffe ne pouvoient pas fervir d'exemple & qu'il

faudroit être né comme lui naturellement fage, dont il ne devoit être particulierement re devable qu'à Dieu; que je ne croyois pas que l'expérience & les réflexions puffent jamais faire un homme auffi fage qu'il l'avoit toujours été & que par def fus cela j'étois perfuadé, qu'il y avoit toujours des temps, où il courroit des maladies d'efprit comme du corps, par les folies que j'avois vû faire à beaucoup de gens dans les bâtimens & les jardinages, dont je m'étois moimême fenti fi frappé, que j'a vois entrepris de faire S. Maur une maison agréable & que j'avois commencé des terraffes & un jardin dans un endroit où il y avoit une vilaine carriere, d'où on avoit mêmestiré de la pierre pour bâtir la maifon, mais que pour couvrir ma folie, je difois, que cela ne m'incommoderoit

moderoit pas, puifque par le traité que j'avois fait avec M. le Prince, je trouverois ma vie dans l'argent que j'y employe rois. M. le Tellier me croyoit fi bien dans les bonnes graces de M. de Louvois, que ce n'eft pas la feule fois, qu'il a jetté les yeux fur moi pour lui infinuer des chofes qu'il ne vouloit pas ou n'ofoit lui dire, M. de Louvois ayant obtenu du Roy la furvivance de fa charge pour M. le Marquis de Courtanvaux fon fils aîné, qui paroifloit avoir le merite de M. fon pere, mais qui fembloit n'être pas tout-àfait tourné à la destination qu'il en faifoit, & m'étant persuadé par tout ce qui m'étoit revenu des difpofitions de M. de Barbezieux, que ce dernier y auroit été plus propre, Monfieur le Chancelier l'ayant fçû & fait fes réflexions fur cela avec M. Tom. 11. Dd

l'Archevêque de Rheims, ces Meffieurs me prierent d'en vouloir parler de leur part à M. de Louvois, felon ma pensée, & étant venus à ma maison pour m'y engager, je m'en excufai, en les priant de confiderer, que comme c'étoit une affaire purement de famille, la bienséance vouloit plutôt que ce fût Monfieur le Chancelier ou lui, qui en fît l'ouverture, mais m'ayant répliqué, qu'ils auroient bien fouhaité que ce fût moi, je leur dis que s'ils vouloient faire fentir à M. de Louvois que ç'avoit été ma pensée, & que cela lui donnât occafion de m'en parler, je repondrois volontiers comme ils pourroient attendre de mon zele. Quelques jours après M. de Louvois me dit, qu'il avoit fujet de fe plaindre de moi de n'avoir pas voulu l'avertir d'une chofe que j'avois pense &

qui étoit d'une grande conféquence pour fa famille, puifqu'il avoit réfolu avec M. le Chancelier & M. l'Archevêque de Rheims de fuivre mon avis,' je lui répondis que je n'avois pas cru devoir faire davantage, puifque Monfieur le Chancelier & M. l'Archevêque de Rheims étoient entrez dans ma pensée, qu'il leur convenoit mieux d'en parler qu'à moi, il me dit qu'il ne laiffoit pas de m'en avoir obligation, mais qu'il exigeoit de moi de lui parler à l'avenir ouvertement fur tout ce qui pouvoit le regarder, fans exception, je lui promis de n'y pas manquer en le remerciant de l'honneur qu'il me faifoit. M. le Chancelier étant tombé dans un état qui ne lui permettoit pas de croire qu'il eût encore long-temps à vivre & defirant que M. le Pelletier pût étre Chancelier,

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