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être enrichi au delà de fes efperances. Outre le temps qu'il employoit aux affaires de Sa Majefté, il en prenoit encore pour apprendre le Latin & fe fit recevoir Avocat à Orleans, dans la vûe & l'efperance de devenir Chancelier. Il préfumoit fort du bon état où il avoit mit les affaires du Roy, dont il avoit rendu le revenu certain au deffus de cent millions, qu'il croyoit fuffifant pour faire la guerre. Ayant fupputé qu'il y avoit un fonds plus grand que la dépenfe n'avoit encore été, il fit rendre un Arrest, je ne fçai pas pourquoi, par lequel il étoit défendu aux Gens d'affaires de prêter au Roy fous peine de la vie, & s'étant trouvé enfuite dans la néceffité de faire des emprunts, il s'en ouvrit à moi & me demanda, fi je croyois qu'il fallût donner un Arrest contraire au pre

mier; je lui dis que je penfois, qu'il n'y avoit qu'à oublier qu'il eût été donné, & emprunter comme on auroit pû faire aupa

ravant.

Il m'a fouvent paffé par l'ef prit, que les hommes ont leur proprieté à peu près comme les herbes, que leur bonheur confifte d'avoir été deftinez ou de s'être d'eftinez eux-mêmes aux chofes pour lesquelles ils étoient nez, & c'est pour cela que j'ai pensé que le bonheur de M. de Pontchartrain, l'ayant conduit dans les finances, il a fi bien réussi, que je ne crois pas que jamais homme ait en plus de talens & de difpofitions, que lui pour le maniment des affaires des finances. J'eus le bonheur d'en être connû auffi-tôt qu'il commença de s'en mêler, & j'oferois quafi affurer, que j'étois né avec la proprieté de me

faire aimer des gens à qui j'ai eu affaire, & que c'est cela proprement qui m'a fait jouer un affez beau rolle; mais je me fuis en quelque façon propofé de faire le portrait de M. de Pontchartrain, & non pas le mien. Il me femble qu'il avoit bien-tôt pris des notions dans les Finances, qui ne feroient venues qu'avec peine à un autre, il fçavoit diftinguer ceux qu'il croyoit plus habiles que lui, & je m'apperçûs bientôt, qu'il en fçavoit autant & plus qu'eux, mais cela n'a pas empêché qu'il n'en ait toujours en un petit nombre avec qui il étoit bien aise de s'entretenir. Il les invitoit à lui parler de tout ce qui leur venoit dans l'efprit fur le fait des affaires, dont il étoit chargé. Il donnoit tout le temps neceffaire au travail, mais après cela dans la conversation, il confervoit une

grande gayeté & a mon avis avoit peu de fouci. Je ne crois pas devoir m'étendre davantage fur fes bonnes qualitez, me fouvenant de l'opinion qu'eurent M. de Louvois & M. de Croiffy, lorfque je leur racontai toutes celles que je croyois avoir trouvé en la perfonne.de M. le Prince d'Orange, ils s'imaginerent que le bon traitement que j'en avois reçû, m'avoit grof fi les objets au-delà de ce qui étoit en effet, mais ici je n'ai qu'à me confirmer dans mes penfées, par les marques que M. de Pontchartrain, a reçû des bontez du Roy pour fon élévation.

J'ai fort connu M. de Pomponne à l'Hôtel de Nevers, même avant qu'il fût à la Cour, il étoit regardé par un certain nombre d'honnêtes gens & d'ef prit, qui faifoient leurs delices de cette Maison, comme un hom

me de bien & d'un bon efprit. Il réuffit fi bien dans fes Ambaffades, & le Roy prit tant de goût pour lui, par le bon ftile de fes Lettres, que M. de Lionne étant venû à mourir, le Roy fans aucunes follicitations, & fans que perfonne en fçût rien, lui envoya un de fes Gentils-Hommes à Stokolm, où il étoit pour lors Ambaffadeur, qui le furprit extrêmement, en lui aprenant que Sa Majesté l'avoit fait Secretaire d'Etat, & lui mandoit de venir inceffamment en prendre poffeffion. Ce ne fut qu'au retour de ce Courrier, que l'on fçût ce que le Roy avoit fait à cet égard, ce qui fit que ceux qui le connoiffoient donnerent de grandes louanges à Sa Majesté du bon choix qu'elle avoit fait, il s'acquita fort bien de fon de voir : mais cela n'empêcha pas que M. de Louvois ne prît oc

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