ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

morts.. Celui qui fous de fauffes apparences eft exposé au danger prochain d'être enterré vivant, n'évitera pas ce malheur, fi quelqu'un ne lui donne les fecours qui lui font néceffaires; mais quelqu'interêt que les furvivans puiffent prendre à la perfonne dont la perte excite leurs regrets, il ne contrebalance point les raifons qui se tirent,à son désavantage de la probabilité de la mort, du désagrément,de l'embarras & des fuites de l'infection que la confervation des morts entraîneroit néceffairement fi on les gardoit jusqu'à la putréfaction. Ainfi quoiqu'on convienne généralement avec M.. Bruhier que la précipitation des enterremens eft une coutume meurtrière, (ce qui cependant ne feroit vrai, qu'autant qu'il n'y auroit aucun figne de la mort que la putréfaction) on n'applique cette idée à aucun cas particulier, parce qu'il y

a plufieurs motifs qui dans les cas particuliers déterminent à rejetter dans la pratique ce que l'on avoit admis dans la spéculation.

L'argument que fournit la probabilité de la mort, lorfqu'on en voit les apparences, est assurément un motif par lequel les furvivans évitent un délai qui leur donneroit d'ailleurs du défagrément & de l'embarras. Toutes les morts ne font pas doureuses aux yeux mêmes du vulgaire. Dans le plus grand nombre des cas, la mort est annoncée par des fimptômes fâcheux aufquels on ne peut fe méprendre; & lorfqu'elle arrive dans ces cas ordinaires, elle eft indiquée par des fignes, qui joints à ceux qui l'ont précédée,fuffisent pour affeoir le jugement qu'en portent avec certitude les perfonnes les moins éclairées.Dès que les apparences font réelles dans le plus grand nombre de cas, il n'eft pas

furprenant qu'on les juge telles dans tous indistinctement. Tout examen eft pénible, le doute eft un état de contrainte; il est plus fimple de fe décider avec ou fans raifon; c'est auffi ce que l'on fait. Les apparences qui communément ne font pas trompeufes, font le garant fautif de la conduite l'on tient. Je ne parta

que

ge point l'étonnement de M. Bruhier, je ne fuis pas furpris que tout le mon de foit perfuadé de la néceffité de prendre des précautions, & que perfonne n'en prenne. Cette contradiction entre la conduite & la façon de penfer, n'en eft une que dans l'efprit de ceux qui ne connoiffent point la marche ordinaire de l'efprit des hommes.

La perte de la vie par la précipitation d'un enterrement, eft un accident très-formidable, & il n'y a perfonne qui ne croye qu'il eft de la

prudence de ne négliger aucunes précautions pour s'en garantir; mais, comme nous l'avons dit, perfonne në peut en prendre pour foi: c'eft de l'attention des autres qu'il faut les attendre,en cas qu'on fe trouve dans ce danger. Les hommes font fujets à faire de mauvais raifonnemens fur les accidens futurs.L'Auteur de la Logique de Port. Royal nous a confervé entr'autres celui d'une Princeffe qui ayant oui-dire que des perfonnes avoient été accablées par la chûte d'un plancher, ne vouloit jamais enfuite entrer dans une maison fans l'avoir fait vifiter auparavant; & elle étoit tellement perfuadée qu'elle avoit raison, qu'il lui fembloit que tous ceux qui agif foient autrement étoient imprudens. Il n'y avoit fans doute perfonne qui ne regardât ces précautions comme exceffives & ridicules; par la raison que pour juger de ce que l'on doit

faire pour éviter un mal, il ne faus pas feulement confidérer le mal en foi, mais auffi la probabilité qu'il arrive ou n'arrive pas. Ainfi quoiqu'il ne foit pas rare qu'on enterre des perfonnes qui ne font point mortes, il feroit déraisonnable qu'on eût pour foi une crainte incommode de cet accident. On devroit craindre également d'aller à pied par les rues, parce que plufieurs perfonnes y font journellement écrasées: d'après de pareilles réflexions on ne voudroit point aller en caroffe, car on a vu des perfonnes qui ont péri par des accidens qui ne leur feroient point arrivés dans une autre circonftance: on pourroit faire le même raifonnement fur toutes les pofitions poffibles, & les précautions que l'on prendroit feroient un plus grand mal que le danger de l'accident que l'on craindroit. Pour rendre les hommes plus

« ÀÌÀü°è¼Ó »