A peine font-ils endormis, que deux Bohémiens, & deux Bohémiennes fçavoir le Coëfre, une Vieille, une Fille & le Cagou, viennent pour fe dérober aux pourfuites du Prevôt & de fes Archers, & faififfent l'occafion qui s'offre de troquer leurs habits contre ceux qu'ils voyent étendus à terre, LA FILLE. « Saint Migorce I nous fommes nées coëffées, il ne faut plus que des allouettes nous » tombent au bec; Aga, aga, ma mie, voi>>cy du monde fous ces arbres, qui jouent à » la ronfle , qui ont quitté leurs volans » avec des habits, de peur d'avoir chaud il les faut attrimer, & dire grand mercy jufqu'au rendre, qui fera la femaine aux » trois Jeudis, trois jours après jamais. » cc LA VIEILLE. « Il faut que je laiffe ma tête, & quë je » me ferve de cecy, fans prendre ma me◄ ၁၁ fure. ဘ cc LA FILLE. J'ay fait, que ferai-je ? LE COESRE. « Il ne faut pas icy fe mirer dans fes pluS mes il faut trouffer les quilles, & fes trotains, de peur d'être pris du Galiot; > laiffons nos volans, & le refte de nos ha>>bits à ces pauvres diables, à qui on donnera la fauce, fi on les trouve avec la robe du chat. » 1616. Philippin & Alaigre s'éveillent avant 1616. leurs Maîtres. cc PHILIPPIN. « Alaigre, debout, les Vaches font aux >> champs. >> 55 ALAIGRE. « Je t'enjolle, peigne de bouy: laiffe repofer mon humanité; fi tu m'importune davantage, tu me déroberas un foufflet. » PHILIPPIN. « Je crois qu'on nous a fait grippecheville. Monfieur, Monfieur, levez-vous, aux voleurs, on nous coupe la gorge, aux vo» leurs, aux voleurs, on nous a dévalisé. » « Ha! nous fommes volez depuis les pieds jufqu'à la tête. » LIDIAS. « Tu te mocque de la barbouillée. » ALAIGRE. « Sans raillerie, nous fommes pris pour dupes, il y a de l'ordure au bout du bâ»ton, on nous a jetté le chat aux jambes, » & voicy les habits de quelques Bohémiens qui ont fait la picorée, en prenant les nôtres pour le fauver, ils fe font couverts » d'un fac mouillé. » Ce n'eft pas tout, il faut éviter d'ê tre pris pour ceux dont ils font contraints de porter l'habillement : l'induftrieux Alaigre trouve un expédient, & engage la compagnie à fe fervir de ce traveftiffement pour tromper le bon homme Théfaurus, & le faire confentir au mariage de fa fille. N ACTE III. Os quatre Bohémiens par hazard, ouvrent le troifiéme Acte, en prenant des mesures pour bien jouer leurs rôles. ALAIGRE à Philippin. « Diras-tu bien ce que j'ay mis dans la cruche? Sçais-tu bien river le bis, ou roufcailler bigorne? PHILIPPIN. « Morgoine, je fçais entraver fur le gourd, il ne m'en faut que montrer, j'en dirois 5à cette heure autant qu'il en pourroit ve>nir. Allons vîte, il me tarde que j'en dé»vide une migouflée à ce malotru de Capitaine, qui fera toujours Flouquiere, & pis c'est tout il faut commencer à tourner la vergne : les pieds me vermeillent que je » n'y fois tout chauffé, & tout vêtu. » ALAIGRE. « Il faut embier le pelé jufte la tarque. » Fierabras tout hors d'haleine, vient 1616. 1616. dire à Thefaurus, que malgré fes perquifitions, il n'a pu avoir aucunes nouvelles des fugitifs: mais qu'il a fongé à un moyen fûr, qui eft de confulter des Bohémiens: on fait entrer les quatre en question. On les méconnoît fi bien, fous cette nouvelle figure, que le Docteur même s'adreffe à Florinde, pour la prier de lui dire la bonne avan ture. FLORINDE. « Il vous est arrivé plufieurs choses, & il » vous en arrivera plufieurs autres. Vous avez perdu votre fille la Perronelle que > les >> Gendarmes ont enlevée. C'étoit un bon >> enfant. ALAIGRE à part. « Morbleu, qu'elle fait bien la chate◄ » mitc. כל THESAURUS. « Tarare pompon, vous êtes des devins de Montmartre, vous devinez les fêtes quand elles font venues: mais pouffez vo¬ tre cheval. FLORIN DE. » Vous recouvrerez votre fille, fi elle n'eft perdue. Sçachez qu'elle eft faine & entiere » par la valeur d'un bon Gentilhomme qui la » dépatrouillée des mains de certains gouin» fres, qui lui vouloient ravir fon honneur ce bon Gentilhomme l'a fi bien → plantée, qu'elle reviendra bientôt. ALAIGRE à part. « Voilà le goût de la noix ce plantement- 1616. » là s « Elle l'aime.... FLORINDE. ne foyez dorénavant >> fi cruel qu'un tigre MACÉE pleurant. cc Foin de l'honneur, ma fille en eft gâtée: » fi jamais je la tiens, elle ne m'échapera pas. Hélas! mon pauvre enfant, ton ab fence me donnera la mort au cœur. THESAURUS. « Je vous affure, que dès qu'elle fera venuë, je ferai tuer le veau gras. Fierabras curieux d'apprendre fa bonne fortune, interroge Philippin, qui a endoffé les habits de la vieille Bohémienne; comme il ne paroît pas fort fatisfait des pronoftications qu'on lui annonce, il paffe de l'autre côté, & devenu tout-à-coup amoureux de Florinde, qu'il trouve avoir beaucoup de reffemblance avec la fille de Théfaurus, il lui déclare fes fentimens. La Belle le reçoit affez mal, ( a ) mais elle (a) FIERABRAS. Il faut que j'en dife un mot à cette Brunette Meffieurs n'en foyez |