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laquelle elles y touchoient, qu'elles fe perfuadoient être fobres, en fe confervant le plaifir de ne pas l'être; c'étoit à la faveur de cette fingerie, que leur devotion laiffoit innocemment le champ libre à l'intemperance.

Il faut avoüer, que le diable eft bien fin, mais auffi, que nous fommes bien fots!

Le deffert fut à l'avenant du repas; confitures féches & liquides, & fur le tout de petites liqueurs, pour aider à faire la digeftion, & pour ravigoter ce goût fi mortifié.

Après quoi, Mademoiselle Haberd l'aînée difoit à la cadette: Allons,ma fœur,remercions Dieu. Cela eft bien juste, répondoit l'autre avec une plenitude de réconnoiffance, qu'alors elle auroit affurément eu tort de difputer à Dieu.

Cela eft bien jufte, difoit- elle donc, & puis les deux fœurs fe levant de leurs fieges avec un recüeillement

cüeillement, qui étoit de la meilleure foi du monde, & qu'elles croyoient auffi méritoire que gitime; elles joignoient pofément les mains › pour faire une priere. commune, où elles, fe répondoient par verfets, l'une à l'autre, avec des tons que le sentiment de leur bien être, rendoit extrêmement pathétiques.

Enfuite on ôtoit le couvert ; elles fe laiffoient aller dans un fauteuil, dont la molleffe & la profondeur, invitoit au repos; & là on s'entretenoit de quelques réfléxions qu'on avoit faites d'après de faintes lectures, ou bien d'un fermon du jour, ou de la veille, dont elles trouvoient le fujet admirablement convenable, pour Monfieur, ou pour Madame une telle.

que

Ce Sermon-là n'étoit fait pour eux; l'avarice, l'amour du monde, l'orgueil & d'autres imperfections y avoient fi bien été débat uës.

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Mais difoit, une, comment peuton affifter à la fainte parole de Dieu, & n'en pas revenir avec le deffein de fe corriger ; ma fœur, comprenez-vous quelque chofe à

cela?

Madame une telle, qui pendant le Carême eft venuë affiduëment au Sermon, comment l'entend-elle? car je lui vois toujours le même air de coqueterie ; & à propos de coqueterie? mon Dieu! que je fus fcandalisée l'autre jour de la maniere indécente, dont Mademoiselle** étoit vêtuë. Peuton venir à l'Eglife en cet état-là? Je vous dirai, qu'elle me donna une distraction, dont je demande pardon à Dieu, & qui m'empêcha de dire mes prieres. En verité, cela eft effroyable!

Vous avez raison, ma fœur, répondoit l'autre, mais quand je vois de pareilles choses, je baisse les yeux; & la colere que j'en ai, fait que je refufe de les voir, &

que

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priant

tie Dieu de la grace qu'il te de m'avoir du moins prévée de ces pechés-là, en le riant de tout mon cœur, de vouloir bien éclairer de fa grace les perfonnes qui les commettent. Vous me direz, comment avezvous fçû ces entretiens, où le prochain effuyoit la digestion de ces Dames?

C'étoit en ôtant la table, en rangeant dans la chambre, où elles étoient.

Mademoiselle Haberd la cadete, après que j'eus deffervi, m'appella, comme je m'en allois dîner; & me parlant affez bas, à cause d'un leger affoupiffement, qui commençoit à clore les yeux de fa foeur, me dit ce que vous verrez dans la deuxième Partie de cette Hiftoire.

Fin de la premiere Partie.

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