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m'empêcher d'y faire quelque ré fléxion. Qu'est-ce que c'est que ceci? me dis-je ; je me fens comme obligée d'aimer ce jeune homme! Là-deffus, je me recommandai à Dieu qui difpofe de tout, & le priai de vouloir bien, dans les fuites, me manifefter fa sainte volonté fur une avanture qui m'étonnoit moi-même.

Hé bien, Coufine,lui dis-je alors; ce jour-là, nos prieres partirent donc l'une quant & quant l'autre; car pendant que vous faifiez la vôtre, je fis auffi ma petite oraifon à part. Mon Dieu! difois-je, qui avez mené Jacob fur ce PontNeuf, mon Dieu, que vous feriez clement envers moi, fi vous mettiez dans la fantaisie de cette honnête Demoiselle de me garder toute fa vie, ou feulement toute la mienne à fon aimable fervice!

Eft-il bien poffible, me répondit MademoiselleHaberd, que II. Part.

I

cette idée-là te foit venuë? mon

garçon,

Par ma foi oui, lui dis-je, & je ne la fentis point venir, je la trouvée toute arrivée.

Que cela eft particulier! repritelle. Quoiqu'il en soit, tu m'aidas à revenir chez moi; & durant le chemin, nous nous entretînmes de ta fituation. Je te fis plufieurs questions; & je ne fçaurois t'exprimer combien je fus contente de tes réponses, & des mœurs que tu montrois. Je te voyois une fimplicité, une candeur qui me charmoit, & j'en revenois toujours à ce penchant que je ne pouvois m'empêcher d'avoir pour toi.Toujours je demandois à Dieu qu'il daignât m'éclairer là-deffus, & me manifefter ce qu'il vouloit que cela devînt. Si fa volonté eft que j'épouse ce garçon-là, disois-je, il arrivera des chofes qui me le prouveront pendant qu'il demeurera chez nous.

Et je raifonnois fort bien: Dieu ne m'a pas laiffé long-tems dans l'incertitude. Le même jour, cet Eccléfiaftique de nos amis vint nous voir, & je t'ai dit la querelle que nous eûmes ensemble.

Ah!ma coufine, la bonne querelle ! m'écriai-je; & que ce bon

votre

Directeur a bien fait d'être fi fantafque! Comme tout cela s'arrange! Une rue où l'on fe rencontre, -une priere d'un côté, une oraison d'un autre, un Prêtre qui arrive, & qui vous reprimande foeur qui me chaffe ; vous qui me dites, Arrêtes; une division entre deux filles pour un garçon que Dieu envoye; que cela eft admi-rable! & puis vous me demandez fi je vous aime? Eh! Mais cela fe peut-il autrement? Ne voyez-vous pas bien que mon affection fe trouve-là par Prophetie divine, & que cela étoit decidé avant nous ? Il n'y a rien de si visible...!, En vérité, tu dis à merveilles,

me

répondit-elle, & il femble que Dieu te fourniffe de quoi achever de me convaincre. Allons, mon fils, je n'en doute pas, tu es celui à qui Dieu veut que je m'attache; tu es l'homme que je cherchois, avec qui je dois vivre, & je me donnerai à toi.

Et moi, lui dis-je, je m'humilie devant ce bienheureux don,ce beni mariage que je ne mérite point, ¡finon que c'eft Dieu qui vous l'ordonne,&que vous étes trop bonne Chrétienne pour aller là contre. Toutle profit en est à moi,& toute la charité à vous.

Je m'étois jetté à genoux pour lui parler ainfi, & je lui baifai la main qu'elle crût devotement devoir abandonner aux transports de ma reconnoiffance.

Leve-toi,la Vallée. Oui, me ditelle après, oui, je t'épouferai ; & - comme on ne peut fe mettre trop tôt dans l'état où la Providence nous demandes que d'ailleurs

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malgré notre parenté établie, on pourroit trouver indécent de nous voir loger ensemble, il faut hâter notre mariage.

Il eft matin, répondis-je ; en fe tremouffant le refte de la journée, en allant & venant, eft-ce qu'on ne pourroit pas faire enforte avec le Notaire & le Prêtre de nous benir après minuit? Je ne fçai pas comment cela fe pratique.

Non, me dit-elle, mon enfant, les chofes ne fçauroient aller fi vîte; il faut d'abord que tu écrives à ton pere de t'envoyer fon confente

ment.

Bon! répartis-je, mon pere n'eft pas dégoûté; il confentiroit, quand il feroit mort, tant il feroit aise de ma rencontre.

Je n'en doute pas, dit-elle, mais commences par faire ta lettre ce matin; il nous faudra des témoins, je les veux difcrets; mon deffein eft de cacher d'abord notre mariage, à cause de ma foeur, & je ne Içai qui prendre. I iij

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